Le Syndicat de la médecine générale (SMG) a accusé l’Assurance-maladie de « vouloir priver et rationner » les praticiens en feuilles de soins papier pour imposer la télétransmission à marche forcée. Dans un communiqué, cette petite organisation non représentative des médecins libéraux affirme que « depuis quelque temps déjà, nous avons du mal à recevoir les feuilles de soins papier que nous demandons via le portail Amelipro ».
Depuis la mise en place de la dématérialisation des facturations, l’utilisation des feuilles de soins papier s’est réduite comme peau de chagrin dans les cabinets libéraux. Mais dans divers cas de figure, les médecins ont toujours besoin de ces feuilles papier lorsque les patients n’ont pas leur carte Vitale ou pour des personnes les plus éloignées des droits sociaux.
Nous ne pouvons pas admettre qu’avec son obsession du tout numérique, l’État délaisse les plus fragiles et restreigne l’accès au droit aux services publics
Syndicat de la médecine générale
100 feuilles par venue ?
Pour certains prescripteurs, se fournir en feuilles de soins papier ressemble à un parcours du combattant, juge le SMG. « Jusqu’alors, nous avions aussi l’habitude d’aller aux entrepôts/archives de la CPAM pour nous ravitailler en feuilles et autres imprimés Cerfa ou enveloppes nécessaires à nos échanges avec les caisses. Mais depuis quelque temps, nous ne sommes plus les bienvenus », écrit le syndicat. Horaires d’accueil restreints, justificatifs exigés, messages affichant que la délivrance de ces formulaires est devenue exceptionnelle… « Nos directions nous ont ordonné de ne pas dépasser un centimètre d’épaisseur, environ 100 feuilles par venue », auraient justifié les agents.
Pour le SMG, cette consigne de « rationnement » « entrave » le travail des soignants qui accompagnent les personnes plus éloignées des droits et des soins. « Nous ne pouvons pas admettre qu’avec son obsession du tout numérique, l’État délaisse les plus fragiles et restreigne l’accès au droit aux services publics », se désole le SMG. Il estime que cette délivrance parcimonieuse des feuilles de soins pourrait être assimilée à « un refus de soins discriminatoire ».
Des caisses traînent un peu les pieds pour renouveler les commandes
Dr Jean-Christophe Nogrette (MG France)
Interrogé par Le Quotidien, MG France partage l’agacement du SMG. Son secrétaire général adjoint, le Dr Jean-Christophe Nogrette, reconnaît que « ce point irritant remonte régulièrement avec des caisses qui traînent un peu les pieds pour renouveler les commandes ». De surcroît, « avant, on les recevait aux cabinets, et aujourd’hui, on doit aller les chercher comme si nous n’avions rien d’autre à faire ! », s’agace-t-il.
La Cnam relativise cet imbroglio et rappelle le contexte de digitalisation massive des facturations. Dans un message écrit au Quotidien, elle explique que l’utilisation des feuilles de soins papier doit être « l’exception et ne représenter qu’un nombre très limité de consultations ». Dans des « situations très exceptionnelles », des caisses primaires peuvent dépanner les professionnels de santé « qui n’auraient pas anticipé de commande ». Mais, ajoute-t-elle, « c’est un service qui a des coûts ».
Missions, consultation et diagnostic, prescription : le projet Valletoux sur la profession infirmière inquiète (déjà) les médecins
Désert médical : une commune de l’Orne passe une annonce sur Leboncoin pour trouver un généraliste
Pratique libérale : la chirurgie en cabinet, sillon à creuser
Le déconventionnement tombe à l’eau ? Les médecins corses se tournent vers les députés pour se faire entendre