RCP : à Versailles, des généralistes de ville épaulent les oncologues hospitaliers

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Publié le 19/01/2024
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Depuis plus d’un an, des médecins généralistes des Yvelines participent de façon expérimentale aux réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) en oncologie de l’hôpital privé à but non lucratif La Porte Verte. Ce lien ville-hôpital est rendu possible grâce à la plateforme territoriale d'appui Apta 78 et au soutien de la CPTS Grand Versailles.

L’intégration des médecins de famille dans la boucle des réunions permet d’affiner le choix thérapeutique de l’équipe hospitalière

L’intégration des médecins de famille dans la boucle des réunions permet d’affiner le choix thérapeutique de l’équipe hospitalière
Crédit photo : BURGER PHANIE

Louise Pinhas est satisfaite : les généralistes du territoire versaillais regrettaient beaucoup de perdre le contact avec leurs patients une fois ces derniers pris en charge dans les équipes d’oncologues hospitaliers. Le lien est désormais rétabli. La cheffe de projet de la plateforme territoriale d’appui Apta 78 soutient une expérimentation visant à faciliter la participation des médecins généralistes aux réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) en oncologie, le tout sur le bassin de vie couvert par la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) Grand Versailles.

« Le généraliste est le premier maillon du parcours de santé du patient et le lien entre la ville et l'hôpital. Il est logique de lui ouvrir la réunion pour lui permettre de connaître le projet thérapeutique »

Dr Diaddin Hamdan, oncologue à l’hôpital La Porte Verte (Versailles)

Ce travail se fait en partenariat avec l'hôpital privé à but non lucratif La Porte Verte de Versailles, premier établissement pilote du projet. Oncologue et coordonnateur de la RCP dans l’établissement, le Dr Diaddin Hamdan est un fervent défenseur du dispositif. « Le médecin généraliste est le premier maillon du parcours de santé du patient et le lien entre la ville et l'hôpital, confie-t-il. Il est logique de lui ouvrir la réunion pour lui permettre de connaître le projet thérapeutique, le plan de soins et échanger sur l’environnement et sur la santé du patient. »

L’avis d’un médecin extérieur à l’établissement est très apprécié des hospitaliers car il permet d’affiner leurs choix thérapeutiques. « Je n’osais pas faire de traitements pour une dame de 93 ans, avoue le Dr Hamdan. C’est en discutant avec son généraliste sur l’état global de la patiente que l’équipe a finalisé sa décision. » Mais pour favoriser ce lien entre libéraux et hospitaliers, l’oncologue a dû revoir son emploi du temps. « Je me suis arrangé pour me libérer tous les jeudis entre 12 h 15 et 12 h 30 pour pouvoir échanger avec les généralistes », ajoute-t-il. En amont, les secrétaires de son service avaient préparé la liste des patients et le nom de leur médecin traitant. Ces informations sont ensuite transmises à l’Apta, qui se charge de contacter les libéraux concernés pour convenir d’un rendez-vous vidéo via un lien de connexion. « Ce travail est lourd, sans compter les changements de dernière minute », reconnaît l’oncologue.

« J’avais peur du côté chronophage, mais pas du tout ! »

Cette nécessaire réorganisation du temps de travail a un impact sur l’implication des professionnels de ville. Sur les 165 généralistes contactés depuis novembre 2022, date de lancement de l’expérimentation, 23 ont participé aux réunions. « C’est peu », admet Louise Pinhas. En cause : l’absence de coordonnées des libéraux ou, plus prosaïquement, leur manque de temps malgré un intérêt certain pour ce projet innovant. « 90 % des médecins qui ont refusé faute de temps ont tout de même accepté d’être recontactés », relève la cheffe de projet.

Président de la CPTS Grand Versailles, le Dr Lorenzo Macieira salue cette initiative qui abolit les frontières entre la ville et l’hôpital. L’intégration des libéraux dans la boucle des réunions de concertation pluridisciplinaire est vécue comme une reconnaissance de « la plus-value des médecins de famille dans la prise en charge du patient atteint de cancer ». « On connaît enfin l'environnement psychologique et social du patient, c'est déterminant dans le choix thérapeutique, soutient-il. De plus, le patient est satisfait car il sent une harmonie entre généralistes et spécialistes pour s'occuper de lui. » Le Dr Macieira a participé aux réunions de sept de ses patients. « J’avais peur du côté chronophage, mais pas du tout, se félicite-t-il. On apporte notre savoir de médecin de famille et on n'a pas besoin de s'éterniser. À chaque fois, c’est bien organisé, ça dure 10 minutes et ça casse la routine. »

Pour 2024, l’expérimentation devrait s’étendre à trois nouveaux établissements du territoire. Afin d’attirer davantage de généralistes, l’Apta compte renforcer sa communication auprès des médecins traitants, en s’appuyant en particulier sur le Conseil national de l’Ordre.

L'Institut national du cancer (Inca) a publié, en décembre 2023, de nouvelles règles entourant les réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) hospitalières. Il recommande l’intégration d’autres professionnels à ces rencontres, notamment des médecins généralistes, des pharmaciens et des infirmiers libéraux, de coordination ou de pratique avancée (IPA) pour anticiper la préparation des traitements et échanger sur le souhait et les fragilités des patients.
Mises en place en 2005 en oncologie, les RCP ont pour objectif de structurer les discussions des équipes soignantes sur « la situation d'un patient, les traitements possibles en fonction des dernières études scientifiques, l'analyse des bénéfices et les risques encourus, ainsi que l'évaluation de la qualité de vie qui va en résulter ».

Loan Tranthimy

Source : lequotidiendumedecin.fr