En décembre 2020, le Dr Eugénie Izard, pédopsychiatre à Toulouse, avait été condamnée à trois mois de suspension d’exercice de la médecine après un signalement de suspicions de maltraitances pour une patiente de 8 ans. Le conseil d’État a annulé lundi 30 mai cette interdiction provisoire d'exercer la médecine infligée par l’Ordre des médecins.
Présumant des maltraitances de la part du père de sa patiente, la pédopsychiatre avait adressé un premier signalement en octobre 2014 au procureur de la République, puis un second signalement en mars 2015 de nouveau au procureur, ainsi qu'au juge des enfants chargé de la protection de la fillette. Le père de l'enfant avait poursuivi en 2015 la pédopsychiatre devant le conseil de l'Ordre. Elle a été sanctionnée en décembre 2020 pour violation du secret professionnel et pour « immixtion dans les affaires de famille ».
Il était notamment reproché à la pédopsychiatre d’avoir fait le signalement au juge des enfants et pas au seul procureur de la République. « La seule circonstance que ce signalement ait été adressé au juge des enfants (...) ne saurait, à elle seule, alors que le juge des enfants était déjà saisi de la situation de cet enfant, caractériser un manquement » au code de la santé publique, indique le Conseil d'État dans sa décision. « La décision du 10 décembre 2020 de la chambre disciplinaire nationale de l'Ordre des médecins est annulée » et « l'affaire est renvoyée à la chambre disciplinaire nationale de l'Ordre des médecins », poursuit-il.
Protéger les médecins protecteurs
« Nous, médecins, avons besoin de signaler nos suspicions de maltraitance au juge chargé de la protection des enfants », a réagi le Dr Izard, se disant « satisfaite » sur ce point. « Mais je suis toujours susceptible d’être condamnée pour immixtion dans les affaires de famille, étant accusée d’avoir soutenu la mère pour faire reconnaître des maltraitances », précise-t-elle.
Cette affaire illustre l'insécurité juridique dans laquelle se trouvent les médecins qui signalent des soupçons de maltraitance ou d'inceste, qui peuvent être poursuivis par le conseil de l'Ordre et par le parent soupçonné d'agression. Dans son rapport intermédiaire rendu en mars, la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), appelait à renforcer l’obligation de signalement par les médecins des violences sur les enfants, mais aussi à les protéger des poursuites disciplinaires.
(avec AFP)
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