La réforme des retraites sera-t-elle une « catastrophe » pour les praticiens libéraux, comme le redoute le Dr Thierry Lardenois, président de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (Carmf), dans une récente interview au Généraliste ?
Jean-Paul Delevoye s'est employé, ce vendredi 26 octobre, à rassurer les représentants de la Carmf réunis en colloque à Paris pour les 70 ans de la Caisse.
Devant une assemblée d'environ 400 personnes, le Haut-commissaire à la réforme des retraites a défendu le projet de régime universel que le gouvernement souhaite faire adopter par une loi à l'été 2019. Pour une entrée en application en 2025.
Dans un discours de trois quarts d'heure, l'ancien médiateur de la République a tenté de répondre aux inquiétudes des médecins libéraux. Le Dr Thierry Lardenois s'alarmait de la difficulté de passer de 42 caisses hétérogènes à un unique régime universel. Il redoutait surtout que cette refonte entraîne pour les médecins libéraux une hausse de la cotisation et une baisse du point. La réforme prévoit que tous les cotisants touchant jusqu'à trois fois le plafond de la Sécurité sociale, soit environ 120 000 euros annuels, soient inclus dans le futur régime universel. Ce scénario, qui englobe environ 65 % des médecins cotisants (pour 94 % des cotisations), signerait l'arrêt de mort de la CARMF.
L'enjeu, la solidarité intergénérationnelle
Jean-Paul Delevoye assume les orientations gouvernementales.
« Notre système de retraite est complexe, inégalitaire, injuste, fragile et à bout de souffle, a-t-il asséné. Nous ne savons pas aujourd'hui de quoi le monde salarial sera fait demain, si les professions ne vont pas changer, si l'on ne va pas devoir faire 6, 7 ou 8 boulots dans sa vie. Le système de retraite par profession est fragile. Il est nécessaire de mettre en place un régime universel. »
Lors de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait tracé la voie de cette réforme. « Un euro cotisé donnera les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé, quel que soit le statut de celui qui a cotisé », avait-il promis.
Le Haut-commissaire a ajouté que la discussion se poursuivrait avec les professions libérales pour déterminer le niveau adapté de l'effort contributif.
Un impact limité pour les médecins
« L'impact de la réforme devrait être limité pour les médecins, qui disposent déjà d'un régime en points, un rendement de 5 % et un âge de départ à la retraite à 62 ans », a-t-il encore affirmé. Des critères auxquels va répondre le régime universel.
« Nous ne ferons pas payer les dettes à ceux qui ne les ont pas créées », a-t-il encore déclaré, refusant d'endosser le costume de « fossoyeur des caisses ».
Droit dans ses bottes, Jean-Paul Delevoye ne veut pas laisser de place aux batailles sectorielles. « Je n'accepterai pas que les intérêts catégoriels l'emportent sur l'intérêt collectif », a-t-il lancé à l'assistance. « Le débat, ce n'est pas de dire, touche pas à ma caisse », a-t-il poursuivi. Nous devons faire en sorte que les jeunes reprennent confiance dans le mécanisme de solidarité intergénérationnelle, c'est un défi que nous devons relever ensemble. »
L'intervention de Jean-Paul Delevoye n'a pas rassuré les représentants de la Carmf. « Avec cette réforme, la Carmf disparaîtra. Que va devenir notre système de prévoyance, nos actions sociales et nos réserves ? Mon rôle est de défendre vos intérêts », a conclu le Dr Lardenois.
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