Convention, le tour de chauffe

Négos : retrouvailles apaisées malgré l'incertitude

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Publié le 24/11/2023
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L'ouverture des négociations conventionnelles s'est déroulée dans un climat relativement serein. En attendant d'entrer dans le dur et d'aborder les sujets qui fâchent.

Crédit photo :  Harsin/Phanie

Jusqu'ici, tout va bien… Il n'y a pas eu de psychodrame, en tout cas, à l’occasion de la reprise des pourparlers conventionnels entre l’Assurance-maladie et les syndicats médicaux. Contrairement à l'an passé, la première multilatérale de négos s'est même déroulée dans un « climat constructif », a jugé le directeur général de la Cnam, Thomas Fatôme. 

Huit mois après l'échec du round précédent, les organisations syndicales ont salué de leur côté une réunion « apaisée, bienveillante » et un changement de méthode, avec davantage de transparence. Et sur le fond, « on ne refait pas le match », a admis Thomas Fatôme lors d'un video live dans les locaux du Quotidien. « Ça ne veut pas dire que les problèmes ont disparu, mais il faut travailler différemment, avec des propositions nouvelles » pour relever les défis que sont « un accès aux soins sous tension, une attractivité de la médecine libérale en danger, des dépenses maladie dynamiques et un déficit qui reste élevé », a-t-il énuméré.

Lors de ce premier échange avec les syndicats, le patron de la Sécu a décliné les axes de travail fixés par la lettre de cadrage d'Aurélien Rousseau : attractivité de la médecine libérale, pertinence et qualité des soins, organisation des soins et… évolution des modes de rémunération. Et pour chaque orientation, Thomas Fatôme a détaillé le programme étalé jusqu'au 25 janvier (lire encadré). Sur le volet attractivité, la Cnam a affiché sa volonté de « valoriser la consultation clinique pour aller au-delà du règlement arbitral » et de « réduire les déséquilibres de rémunération entre spécialités médicales ». Un premier focus sur les généralistes était prévu cette semaine. 

Pas un long fleuve tranquille 

Ces retrouvailles positives ne préjugent en rien d'une suite idyllique. Les partenaires connaissent la contrainte budgétaire, la volonté aussi de l'exécutif d'obtenir des contreparties aux futures revalorisations d'honoraires – sur l'accès aux soins, la sobriété du système de santé ou la pertinence des actes et des prescriptions. 

« On a déjà beaucoup discuté, chacun a pu faire part de ses attentes… et de ses doutes », avance la Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France. « La volonté de coconstruction de la Cnam semble réelle », admet la Dr Sophie Bauer, présidente du SML, qui précise aussitôt que ces négociations ne ressembleront pas à un long fleuve tranquille. « On voit que plusieurs sujets sont déjà des propositions recyclées, comme le développement des forfaits. Or nous pousserons pour un investissement maximal sur la revalorisation des consultations », cadre la Dr Sophie Bauer, qui n’abandonne pas l'horizon du C à 50 euros. Sa consœur généraliste, la Dr Mélanie Rica-Henry, cheffe de file du mouvement Médecins pour demain, enfonce le clou. « Les questions de pertinence des soins et de diagnostic rappellent furieusement les rémunérations forfaitaires sur objectifs. Notre association, tout comme l’UFML-S, la FMF et le SML, y est opposée. » Une façon de dessiner de futurs rapprochements ? 

« Tout ou rien »

Thomas Fatôme prédit une « négociation difficile ». Et le directeur de la Caisse a déjà prévenu les syndicats. La négo devra aboutir à un deal global donnant-donnant. « Soit il y aura un accord sur la totalité des quatre axes de travail de la lettre de cadrage, soit il n’y aura pas d’accord du tout. » Une logique cohérente mais qui pourrait compliquer l'atteinte d'un compromis majoritaire, au regard de l'ampleur des attentes. « Tout le monde a à cœur de réussir cette convention mais nous n’avons parlé ni enveloppe globale, ni tarifs, ni montant des actes ou des forfaits. Ce n’était pas l’objet de ces retrouvailles », décrypte le Dr Franck Devulder, président de la CSMF.

La prochaine multilatérale, le 21 décembre, aura valeur de premier test. Quant aux étudiants et internes, présents en tant qu'« observateurs », ils affichent leur volonté de peser. « Nous sommes contents d’être présents autour de la table mais nous regrettons de ne pouvoir participer aux bilatérales alors que c’est notre avenir de futurs médecins qui se joue », avertit Florie Sullerot, présidente de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG). Interrogé par Le Quotidien, Thomas Fatôme a promis que les « juniors » seraient bien maintenus dans la boucle, à la faveur de rencontres spécifiques.

16 réunions mais pas de date butoir

Pour ce round, pas moins de 16 réunions sont programmées et étalées jusqu'au 25 janvier. Outre trois séances multilatérales en présentiel – 15 novembre, 21 décembre et 25 janvier –, 13 rendez-vous intermédiaires sont au menu avec des groupes techniques (ou focus) par spécialité qui concerneront les généralistes, pédiatres, psychiatres mais aussi les autres spécialités cliniques, médico-techniques et de bloc opératoire. D’autres focus seront centrés sur la pratique : pertinence et qualité des soins, travail en équipe et conditions d’exercice. Une séance prévue le 10 janvier abordera le forfait prévention. Pour l'heure, la Cnam n'a pas fixé de date butoir pour cette nouvelle séquence et l'obtention d'un accord.


Source : Le Quotidien du médecin