« Calquer le modèle d’installation des médecins sur celui des pharmaciens ». Tel est le sens de la proposition de loi de Philippe Folliot, déposée le 18 février dernier sur le bureau de l’Assemblée nationale. L’élu du Tarn (UDI) espère en ce sens lutter contre les déserts médicaux. Partant du constat « que tout ce qui a été fait depuis une dizaine d’années n’a pas réussi », il entend « passer de l’incitation à l’action ». Soutenu dans sa troisième tentative – il a déjà déposé deux textes similaires lors des précédentes législatures- par une quarantaine de parlementaires de l’opposition, il suggère des « mesures coercitives » et des incitations financières pour remédier aux disparités géographiques dans l’offre de soins.
Un numerus clausus à l’installation. Notant « que personne ne remet en cause aujourd’hui le mode d’installation des pharmaciens », Philippe Folliot propose que la logique prévalant pour les officines libérales s’applique aux médecins. « Il faudrait définir un nombre de médecin par habitants », explique-t-il. Dès lors que le quota d’un territoire serait atteint, il deviendrait impossible de s’y installer. « Dans un premier temps, cela s’appliquerait aux généralistes », précise-t-il, « et si ça marche, le système pourrait être étendu aux autres spécialités ». L’idée d’imposer une distance minimale entre les cabinets est également évoquée.
Doté d’un volet incitatif, le texte suggère la création de nouvelles aides financières de l’État. Venant s’ajouter à celles existant, les généralistes en bénéficieraient pendant les trois premières années de leur implantation. Ils pourraient également être exonérés de taxes d’habitation et foncière. La proposition de loi prévoit également un stage pratique chez un généraliste installé en milieu rural.
Du côté des syndicats comme dans la classe politique, cette proposition ne manque pas de faire réagir. À quelques jours de la manifestation des professionnels de santé contre le projet de loi Santé, « un groupe de députés UMP et Centristes fait encore pire », considère MG France. Selon l’organisation, il ne s’agit ni plus ni mois de l’institutionnalisation de « la ségrégation dont souffre la spécialité ». De l’avis de Luc Duquesnel, cette proposition traduit une méconnaissance des élus sur ce qui se fait sur le terrain. « Des départements ruraux ont apporté des solutions pour résoudre les problèmes de démographie », affirme le leader de l’UNOF pour qui « il n’existe pas une solution unique mais une succession de solutions ». L’UMP n’approuve pas non plus cette initiative parlementaire. En matière de déserts médicaux, il faut savoir « user de bon sens et de méthode », préconise Arnaud Robinet, député de la Marne et maire de Reims. Dans un texte publié aujourd’hui, le secrétaire national de l’UMP chargé de la Santé note qu’il serait « malvenu de prendre des décisions alors que le projet de loi santé n’a pas encore été examiné par le Parlement ». Reste que si cette initiative finit d’exaspérer les médecins, elle n’a que peu de chance d’aboutir. Par le passé, la classe politique s’est montrée assez réticence à ce type de texte.
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