Mélange sauvage de vaccins : une pratique non recommandée, rappelle l’Ordre qui sanctionne un généraliste de Vendée

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Publié le 16/04/2022

Crédit photo : Phanie

Le Dr F. s’est rendu coupable d’un manquement aux obligations déontologiques en administrant à certains de ses patients des mélanges sauvages de vaccins dans le cadre du schéma vaccinal pédiatrique obligatoire. La chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins des Pays de la Loire l’a sanctionné de six mois de suspension d’exercice le 23 mars dernier.

Les pratiques du généraliste avaient été signalées début 2021 au Conseil départemental de Vendée par des confrères exerçant dans le même cabinet. Aujourd’hui installé dans les Deux-Sèvres, il a un mois pour faire appel de la décision, après sa notification.

Le Dr F. a reconnu avoir associé dans la même seringue les vaccins, Infanrix Hexa et Prevenar, ainsi que Infanrix Hexa et Priorix. Dans le jugement que « Le Quotidien » s’est procuré, la chambre disciplinaire a considéré qu’il avait ainsi exposé « ses très jeunes patients à des risques injustifiés pour leur santé, notamment en ne leur offrant pas une protection vaccinale valide ».

Aucune étude de compatibilité

Le médecin a procédé à cette combinaison « sans aucune validation préalable de son innocuité et de son immunogénicité, par les organismes ou autorités compétentes », relève l’instance ordinale. Elle rappelle qu’« en l’absence d’études de compatibilité, ce médicament ne doit pas être mélangé avec d'autres médicaments » (comme le spécifie la notice d’Infanrix Hexa, page 14).

C’est « une pratique prohibée », confirme au « Quotidien » le Pr Robert Cohen, pédiatre au CHI de Créteil et membre d’Infovac, la plateforme d’information sur les vaccinations dédiée aux professionnels de santé. « Les adjuvants ou les composants d’un vaccin peuvent inhiber un autre vaccin avec lequel il serait mélangé », poursuit le pédiatre infectiologue qui rappelle que les vaccins combinés autorisés ont, eux, « fait l’objet d’études de compatibilité et d’absence d’interférences immunologiques ».

Les risques pour les patients ? « On ne craint pas spécialement d’effet nocif, répond le Pr Cohen. Il y a eu de très nombreuses erreurs de vaccination avec des combinaisons sauvages par le passé et, à ma connaissance, il n’y a pas eu de remontée par la pharmacovigilance. » Par contre, cela peut inhiber le vaccin. « Face à une telle situation, il faut impérativement refaire toutes les vaccinations concernées car on ne sait pas si l’enfant est protégé ou non », conclut le pédiatre.

Des motivations obscures

Le Dr F. n’explique pas ses motivations pour se livrer à ce type de mélange. « Tout le monde a envie de faire moins de piqûres aux enfants, reconnaît le Pr Cohen. Mais, ce n’est pas une raison pour faire n’importe quoi. » Infovac a reçu de nombreuses demandes d’informations à ce sujet il y a plusieurs années, « mais ce n’est plus le cas maintenant », confie l’expert, preuve que les médecins auraient désormais intégré ces informations.

Le Dr F. dit avoir cessé ces pratiques après avoir été sermonné par l’Ordre en avril 2021, ce qui n’a visiblement pas suffi pour dissuader l’instance de le sanctionner. La chambre disciplinaire lui a ainsi reproché de n’avoir « initié aucune action à l’égard des patients concernés, en vue de leur proposer une protection vaccinale valide », un manquement à ses obligations déontologiques.

Régime sans gluten, traitement Covid...

La chambre n’a en revanche pas retenu l’accusation du Conseil départemental qui reprochait au médecin une utilisation frauduleuse de la carte Vitale d’un patient résident d’un Ehpad, estimant qu’il n’y avait aucune « intention frauduleuse ».

La chambre ne s’est pas non plus prononcée sur certaines pratiques controversées du Dr F., comme la prescription de régimes sans gluten et sans lactose. Le généraliste se justifie aussi de ne pas recourir à la contraception hormonale et de prescrire aux patients atteints de Covid-19 des traitements qui, dit-il, « n’avaient pas pour objet de “soigner” cette maladie mais de prévenir certaines de ses conséquences ». Pour sa défense, le Dr F. avait fait appel au cabinet de maître Fabrice Di Vizio, figure de proue des contestataires opposés à la vaccination contre le Covid.


Source : lequotidiendumedecin.fr