Traitements contre le Covid, où en est-on ? Posez vos questions au Pr Yazdan Yazdanpanah

Bonjour, ravi d'être avec vous ce matin pour répondre à vos interrogations.

J'ai eu effectivement des liens d'intérêts avec les laboratoires pharmaceutiques que j'ai arrêtés depuis 2017, date à laquelle j'ai été nommé directeur d'un institut thématique infectiologie et microbiologie à l'Inserm. Depuis cette date, je n'ai reçu aucune rémunération à titre personnel des laboratoires pharmaceutiques.

Effectivement, le traitement en ville est aujourd'hui pour les patients en ambulatoire un traitement symptomatique. Il est d'ailleurs très important de rappeler que les corticoïdes sont uniquement indiqués chez les patients qui sont oxygénorequérants. Toutefois, les anticorps monoclonaux ont une autorisation temporaire d'utilisation chez les patients en ambulatoire à risque d'évolution vers une forme sévère dans les cinq premiers jours du début de la maladie (après le début des symptômes). L'administration est malheureusement toujours hospitalière, même s'il est possible que le traitement se fasse en ambulatoire.
Les anticorps monoclonaux ont un mode d'administration intraveineux.

Aucun essai clinique n'a démontré l'efficacité de l'ivermectine dans le traitement du Covid-19. Un essai clinique canadien (Together) a même montré l'absence de son efficacité en ambulatoire chez les patients Covid. Cette molécule ne doit pas être utilisée en pratique courante pour traiter le Covid.
Ce traitement n'est pas recommandé en France, et, à ma connaissance, il n'est pas indiqué en Suisse et en Europe.

Les premiers résultats évaluant le molnupiravir chez les patients à risque d'évolution vers les formes sévères en ambulatoire dans les 5 premiers jours de la maladie ont été présenté en communiqué de presse jeudi dernier. Ces données issues d'une analyse intermédiaire montreraient une diminution de 50 % des hospitalisations et des décès chez les patients sous molnupiravir par rapport au patients sous placebo. Il s'agit de résultats prometteurs pour un traitement antiviral oral. Toutefois, pour l'instant, il s'agit d'un communiqué de presse, et il faut regarder les résultats de plus près pour se prononcer.
Si ces résultats venaient à être confirmés, il faut probablement prescrire ce traitement à des patients à risque d'évolution vers une forme sévère, et dans les cinq jours suivant l'apparition des symptômes. Ce pourrait être le premier traitement anticovid accessible à la prescription de ville.
Les laboratoires Pfizer et Roche ont également des médicaments antiviraux en cours d'évaluation. D'une manière générale, les antiviraux sont évalués au stade précoce de la maladie. A titre d'exemple, le molnupiravir n'est pas efficace chez les patients hospitalisés.

Il s'agit pour le moment des anticorps monoclonaux. Des anticorps monoclonaux de Regeneron/Roche ont montré une efficacité pour éviter l'évolution vers une maladie Covid chez les personnes exposées à un Covid (post-exposition). Les anticorps monoclonaux d'AstraZeneca, qui ont une demi-vie longue de plus de six mois, ont montré une efficacité en pré-exposition. Ces anticorps peuvent être notamment donnés aux personnes non répondeuses aux vaccins (patients immunodéprimés) pour empêcher la survenue de Covid.

Pour le moment, les anticorps monoclonaux de Roche/Regeneron peuvent être prescrits en France en accès précoce dans ces indications (prophylaxie pré- et post-exposition) chez les personnes immunodéprimées non répondeuses aux vaccins, en attendant l'arrivée éventuelle d'autres anticorps monoclonaux.

Un essai clinique de phase 2 est en cours pour évaluer l'efficacité de ce traitement.
Le développement de ce médicament n'a pas été retardé. Il y a beaucoup de traitements candidats. Pour être le plus efficient possible, il faut avoir un certain nombre de prérequis avant d'évaluer le médicament chez l'homme. Dès que les prérequis pour le clofoctol ont été obtenus, l'étude évaluant le traitement a eu son autorisation et son financement.

Les anticorps monoclonaux ont peu d'effets secondaires. Ils n'ont pas la même efficacité que les vaccins. Ils ne peuvent pas remplacer les vaccins. Ils peuvent être utilisés chez les personnes qui ne répondent pas aux vaccins.

Les vaccins de Valneva et de Sanofi sont toujours en cours d'évaluation. Ils peuvent avoir un intérêt notamment dans le cadre de vaccination de rappel. Je ne peux pas me prononcer sur les dates de sortie qui dépendent de beaucoup d'éléments.

L'artésunate est un traitement antipaludéen évalué dans le Covid chez les patients hospitalisés évalué par l'OMS. Il faut attendre les résultats de l'essai clinique de phase 3 en cours avant de se prononcer.

Il y a effectivement une étude du Lancet sur l'efficacité du budésonide en inhalation chez les patients en ambulatoire. Les critères de jugement de cette étude ne sont pas très convaincants, même s'ils sont positifs sur certains critères (pas d'efficacité si on se base sur le nombre de patients hospitalisés et décès). Actuellement, les corticoïdes inhalés sont évalués en France dans le cadre de l'étude Coverage. Pour le moment, on ne peut pas proposer une prescription large de cette molécule.

Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, et en particulier la fluvoxamine, ont en effet été évalués dans le traitement du Covid. Les résultats sont assez prometteurs dans le cadre des études observationnelles, mais aussi dans un essai clinique canadien. En revanche, ces données ne sont toujours pas suffisantes pour recommander cette molécule hors du cadre des essais cliniques.

Il n'y a pas d'indication pour les traitements antibiotiques de manière systématique chez le patient Covid, quel que soit l'antibiotique. Ils sont indiqués si l'on suspecte une surinfection bactérienne.

Non. Cette piste n'est pas définitivement enterrée. On pense toujours qu'il y a une efficacité chez les patients immunodéprimés qui ne sont pas capables de produire des anticorps contre la maladie. Des équipes françaises ont beaucoup travaillé sur cette indication. Cela peut aussi avoir un intérêt s'ils sont donnés rapidement après le début de la symptomatologie, bien qu'ils soient plus compliqués à administrer qu'un traitement per os, d'un point de vue logistique.

Les études cliniques évaluant la colchicine n'ont pas montré l'efficacité de cette molécule. Elle ne doit pas être prescrite en pratique courante.

Je ne crois pas que l'aspirine soit contre-indiquée. C'est son usage systématique, à n'importe quel stade de la maladie, qui doit être évité.

Malheureusement, on ne connaît pas encore très bien la physiopathologie du Covid long. Par conséquent, il est très compliqué de proposer des traitements, en dehors des traitements symptomatiques. Il s'agit d'un des domaines sur lesquels l'ANRS va s'investir pour promouvoir la recherche.

En tout cas, à ma connaissance, il ne s'agit pas d'une des pistes les plus prometteuses.

Les traitements antiviraux les plus avancés sont les anticorps monoclonaux. Mais il s'agit de traitement intraveineux, ce qui complique leur usage, qui peuvent avoir une efficacité variable en fonction des variants, et qui sont chers. Les résultats du molnupiravir sont prometteurs, et s'ils se confirment, ils vont avoir un impact très important. Les essais cliniques sur les autres antiviraux qui vont être bientôt disponibles sont aussi important (les molécules de Pfizer et Roche). Enfin, les essais cliniques sur les antidépresseurs sont à suivre.

Il est probable que le Covid devienne une virose respiratoire endémique. C'est en fonction de la proportion de personnes vaccinées, des traitements disponibles et de l'absence de circulation de variants résistants, que l'on pourra la considérer comme maladie qui peut être gérée en pratique courante.

Je vous remercie pour vos questions, et je remercie le Quotidien du Médecin pour son invitation.