Des fédérations mécontentes

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Publié le 08/09/2016
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En passant d'un certificat annuel à un examen trisannuel complété par des autoquestionnaires annuels, la loi de santé n'a pas fait l'unanimité au sein des fédérations sportives et des médecins du sport.

Le Dr Olivier Rouillon, médecin fédéral de la fédération française de golf, ne cache ainsi pas son scepticisme : « Pour un certain nombre de populations, une visite bien menée tous les 3 ans ne me dérange pas, explique-t-il, mais il y a des tranches d'âge pour lesquels une visite annuelle est nécessaire. Je pense notamment aux plus de 50 ans qui souhaitent faire de la compétition et aux enfants ».

Concernant l'autoquestionnaire mis en place par le ministère, le Dr Rouillon estime que « les sportifs vont vite comprendre qu'il faut répondre "non" à toutes les questions pour ne pas être "embêtés". Ils ne vont peut-être passer sous silence le fait qu'ils sont fumeurs ou qu'un de leur parent était diabétique ».

Le conseil médical du comité national olympique et sportif français (CNOSF), auquel appartient le Dr Rouillon, avait pris position en faveur d'un espacement des visites médicales, mais s'était opposé à une visite médicale tous les 3 ans chez les enfants. « pour certains enfants issus de milieux défavorisés, la visite médicale de non contre indication à la pratique sportive est le seul moment où des pathologies comme des scolioses pourront être dépistées », prévient le Dr Rouillon, qui s'élève également contre le concept de certificat médical valable pour tous les sports. « En tant que médecin, je ne signerais pas un tel certificat : quel point commun y a-t-il entre un enfant qui veut faire du golf et un autre qui souhaite faire du handball, interroge-t-il ? les contraintes ne sont pas les mêmes, ni le retentissement d'une blessure. »

Les fédérations déresponsabilisées

Même son de cloche chez Jean Luc Rouge, président de la fédération française de judo, très mécontents que l'avis des comités médicaux des différentes fédérations ait été ignoré. « Le décret ne nous convient pas du tout, car il ne fait aucune différence entre la compétition et le loisir », affirme-t-il. Auparavant, l'article L 231-2 du code du sport permettait aux fédérations de demander un certificat médical selon une fréquence qu'elles définissent. « Les médecins de chaque fédération sont capables de déterminer la fréquence des examens dans leur discipline, il ne faut pas mettre tout le monde dans le même sac », gronde Jean Luc Rouge.

Les fédérations regrettent aussi l'application de ces règles aux étrangers venus participer à des compétitions en France. « J'organise bientôt le tournoi de Paris, avec un Géorgien et un Tchétchène qui ne pourront pas combattre : seuls quelques pays européens demandent des certificats médicaux », explique Jean Luc Rouge.

« Ces nouvelles règles sont problématiques dans les compétitions d'athlétismes où beaucoup d'étrangers se rendent » confirme le Dr Jean Michel Serra, médecin de l'équipe de France d'athlétisme. Pour le Dr Serra « la difficulté, c'est avant tout cette harmonisation des certificats dans les différents sports. Certaines disciplines imposent une forte charge cardiovasculaire comme les disciplines de très longue distance ou les courses hors stade qui ont le vent en poupe. Elles exposent les pratiquants à des risques dont ils ne sont pas forcément conscients », conclut-il.

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du médecin: 9515