Le tennisman Richard Gasquet contrôlé positif

La cocaïne, une drogue forcément dopante

Publié le 12/05/2009
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Crédit photo : AFP

EX-PETIT PRODIGE du tennis français (classé 7 e mondial en 2007), Richard Gasquet, 23 ans, encourt deux ans de suspension. Contrôlé positif fin mars au Masters 1 000 de Miami, il vient lui-même de confirmer que l’échantillon B de ses urines avait aussi révélé des traces de cocaïne. Le Bitterrois clame son innocence, l’analyse capillaire auquel il s’est soumis volontairement s’étant révélée par ailleurs négative, ce qui exclut une consommation régulière.

Après l’affaire Martina Hingis, contrôlée positive à la cocaïne à Wimbledon en 2007, le cas Gasquet suscite à nouveau des interrogations sur un produit à usage dit récréatif ou social. À ce jour, aucune étude scientifique n’aurait validé les effets ergogéniques (augmentation de la force, de l’endurance ou de la taille des muscles) de la cocaïne sur les performances sportives, une étude en double aveugle n’étant pas réalisable : le groupe sous cocaïne ne pourrait ignorer très longtemps s’il prend le placebo ou le produit. Un sportif peut-il alors invoquer le dérapage festif, sans volonté de sa part d’améliorer ses performances en compétition ? À la suite du CIO, dès 1971, l’AMA a répondu par la négative en classant la cocaïne dans la section des « Stimulants » recherchés lors des contrôles. En France, elle figure dans la nomenclature « S6 Stimulants non spécifiés interdits en compétition », une classe qui inclut, entre autres, les amphétamines, la méthamphétamine et le modafinil, tous produits qui, selon l’AFLD (Agence française de lutte contre le dopage), « visent à accroître la concentration, l’attention et à diminuer artificiellement la sensation de fatigue ». L’agence, précise Philippe Sagot, ne dénombre annuellement que trois ou quatre cas, dans quelques disciplines comme le golf et le water-polo, très loin derrière la prévalence des cannabinoïdes, autre drogue récréative et qui arrive en tête de toutes les substances détectées (environ 30 % de celles-ci).

« Un formidable dopant mental ».

Selon le « Dictionnaire du dopage »*, la cocaïne a une action sympathicomimétique, en particulier au niveau du système cardiovasculaire, c’est un anesthésique local d’action rapide au niveau des muqueuses et un euphorisant à doses modérées. Elle expose à des complications cardiovasculaires (infarctus du myocarde), neurologiques (accidents ischémiques) et pulmonaires (pneumothorax). « Elle est principalement recherchée par les sportifs, explique le Dr Jean-Pierre de Mondenard, médecin du sport et auteur du « Dictionnaire », pour supprimer la sensation de fatigue pendant environ 45 minutes, soit le temps de parcourir 3 km à pied, une distance que les Indiens avaient baptisée la cocada. C’est un formidable dopant mental, qui accentue l’acuité cérébrale afin de mieux percevoir la lecture du jeu, ajuste les réflexes procure la sensation d’invincibilité avec des forces décuplée et augmente l’endurance sans viatique nutritionnel. »

Le médecin du sport réfute l’allégation selon laquelle elle serait dépourvue d’effets ergogéniques, dès lors que « l’atténuation de la sensation de fatigue permet d’augmenter les durées des entraînements. C’est la raison pour laquelle la cocaïne est très recherchée pour soulever la fonte. » « La prise de produit par les sportifs peut s’inscrire, estime-t-il encore, dans une volonté pure et dure de dopage. Mais elle peut aussi relever du domaine festif. Dans les deux cas, chacun doit être maître des substances présentes dans son corps et dans ses urines et c’est une aberration que les recherches ne soient pas effectuées sur les périodes hors-compétition. »

Parmi les possibilités de défense qui s’offrent maintenant à Richard Gasquet, la thèse d’une prise involontaire pourrait être invoquée. Dans l’histoire, quelques cas de dopages dit « à rebours », ou dopage « to loose », signale le Dr de Mondernard, ont défrayé la chronique, avec des sportifs qui ont fait boire des infusions de cocaïne à leurs compétiteurs, pour qu’ils soient confondus lors de procédures de contrôle.

* Masson, 1 240 p., 2004.

 CHRISTIAN DELAHAYE

Source : lequotidiendumedecin.fr