* Avant de tourner des films, de mettre en scène parfois au théâtre, Amos Gitai a fait des études d’architecture, suivant les pas de son père, grande figure formée au Bauhaus et ayant fui le nazisme en 1933. Son premier film, en 1980, il a à peine 30 ans, est consacré à l’édification d’une maison à Jérusalem. « House » est immédiatement interdit en Israël. Amos Gitaï reviendra pourtant souvent à ce thème et c’est cette matière qu’il reprend dans la version pour le théâtre sous ce même titre. Dans un décor monumental d’échafaudages, plus d’une douzaine d’interprètes se croisent, venus d’horizons différents. On parle anglais, arabe, français, hébreu, yiddish. Tout est surtitré en français et en anglais et les comédiens font assaut d’exploits linguistiques, tel Micha Lescot dans un long monologue en hébreu… Le spectacle s’ouvre par des images de Jeanne Moreau lisant une lettre d’Efratia Gitai, la mère de l’artiste, femme remarquable, intellectuelle aiguë. L’on pénètre dans un univers polyphonique cher à Gitai, qui fait du chantier un monde. Il reprend des extraits de ses films : « House » de 1980, « House in Jerusalem » de 1997, « News from Home/News from House » de 2005. Et laisse les faits parler. Les interprètes sont remarquables qui échangent, laissent filer le temps, nous font saisir, en témoignages sincères, l’histoire de cette terre toujours en plein tourments. (La Colline, jusqu’au 13 avril)
* À la Cartoucherie, où viennent de s’achever triomphalement les représentations de« l’Île d’or », et alors qu’Ariane Mnouchkine et un groupe de comédiens séjournent en Ukraine pour animer des stages, les désormais célèbres Dakh Daughters, groupe théâtral et musical formé à Kiev en 2012, sont accueillies au Théâtre du Soleil. Sous la férule tendre de leur fondateur, le metteur en scène Vlad Troitskyi, et avec Tetiana Troitska, elles présentent « Danse macabre », spectacle puissant créé au Préau, à Vire, où Lucie Berelowitsch leur a grand ouvert les portes, dès mars dernier. Les témoignages des six comédiennes et chanteuses et d’autres femmes, des chants, de la musique, des lumières envoûtantes, l’ensemble est bouleversant (Théâtre du Soleil, jusqu’au 2 avril). Ici, on n’oublie pas non plus l’Afghanistan et le 1er avril à 16 heures, on pourra voir « Kaboul, le 15 août 2021 », spectacle solidaire, avec les Afghans de la Cartoucherie, notamment.
* La guerre est un élément important des tragédies shakespeariennes. Jean-François Sivadier a choisi la traduction de Jean-Michel Déprats pour monter « Othello ». On n’oublie pas le film d’Orson Welles… mais on aime découvrir les regards des metteurs en scène sur cette pièce très difficile. Sivadier aime bousculer les chefs-d’œuvre et il surligne volontiers ce qu’il peut y avoir de risible, voire de franchement comique, en certains personnages ou en certaines scènes. Cela vaut quelques morceaux de bravoure réjouissants. Notamment avec Roderigo, qu’incarne de toute son énergie et sa mobilité physique et sensible Gulliver Hecq, frais émoulu de l’École du Théâtre national de Strasbourg, irrésistible. Les aînés, Cyril Bothorel (trois rôles) et Stephen Butel (Cassio), consubstantiels à la troupe, sont excellents. Jisca Kalvanda est parfaite en Emilia, mais être le Doge de Venise est moins évident. Émilie Lehuraux sort également à peine de l’École du TNS ; ravissante et hyperdouée, elle donne une personnalité forte à Desdémone, et est aussi Bianca, différente. Et puis il y a le couple Othello/Iago. Ce dernier est joué par le grand Nicolas Bouchaud ; fourbe et vénéneux, manipulateur, il fait peur, s’amuse… et séduit, comme toujours, le public qui l’adore. Othello est un interprète que l’on a vu grandir du conservatoire de Montpellier jusqu’à celui de Paris, puis de rôle en rôle : Adama Diop est l’intelligence du texte, du jeu, du personnage, il est impressionnant. Fier, puissant, Othello, trompé, visage blanchi en un étrange rituel ; à la fin, on a de la compassion pour lui. Dans un décor monumental et angoissant, Jean-François Sivadier signe un « Othello » très personnel et profondément fidèle, au-delà des facéties apparentes. (Odéon, jusqu’au 22 avril)
* Si le grandiose vous écrase, voyez « Une étoile », d’Isabelle Le Nouvel. Des humeurs nostalgiques, sentimentales, enveloppent Léna. Une Macha Méril fine et douloureuse, bien entourée par Marc Citti, Laurent D’Olce, Claire Magnin et la danseuse Aurélie Loussouarn. La mise en scène de Stefan Druet-Toukaïeff est sobre et fluide. Le public devine trop vite le secret… Le plaisir du jeu suffit ! (Montparnasse)
* Juste à côté, amusez-vous avec « Quai des Orfèvres », polar délicieusement rétro. La metteuse en scène et comédienne Raphaëlle Lémann est retournée à l’origine, « Légitime défense », le roman de Stanislas-André Steeman (1908-1970) que l’écrivain transforma en pièce de théâtre, avant qu’Henri-Georges Clouzot en fît un film. En commissaire entêté, Philippe Perrussel est parfait. François Nambot a les justes faiblesses de Noël et Raphaëlle Lémann les mystères de Belle. Malvina Morisseau, l’amie séduisante, Bertrand Mounier, le gardien indiscret, complètent une distribution solide. On se distrait, amusé. (Petit Montparnasse)
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