L’engagement en santé…

Publié le 16/06/2023
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VU PAR ALICE DE MAXIMY - Le 24 mai dernier, les Femmes de Santé de l’année 2023 ont été révélées durant le salon SantExpo. Soutenu par trois ministères et par de nombreux partenaires, dont la Fédération hospitalière de France, cet événement est devenu un incontournable de la santé. Il vise à promouvoir les rôles modèles féminins et corriger une inégalité professionnelle dans le secteur de la santé : les femmes sont encore trop souvent présentées dans les médias dans des seconds rôles ou en tant que témoins et non en tant qu’expertes.

J’ai toujours su qu’on ne choisissait pas la santé, un secteur professionnel somme toute ardu et difficile, par hasard. On s’y engage. La fleur au fusil certes, mais on s’y « engage ». Engage… D’après notre dictionnaire chéri : « S’engager » correspond à entreprendre une action, y participer ; se lancer ; prendre nettement position, en particulier sur des problèmes politiques, sociaux, économiques ; ou encore s'enrôler. Quant à l’« engagement », c’est l’acte par lequel on s'engage à accomplir quelque chose ; c’est une promesse, une convention ou un contrat par lesquels on se lie.

Parmi les synonymes on trouve : parole, serment ; parmi les contraires : abandon, désaveu, reniement. Des mots lourds de sens, tout de même. On dit d’ailleurs, faire « honneur » à ses engagements. Cela impose donc un « code d’honneur ». Et d’ailleurs, les médecins prêtent serment.

Ce principe d’engagement nous incite à continuer dans le secteur de la santé, contre vents et marées, car arrêter, le quitter, serait finalement se désavouer soi-même, voire briser un serment envers les autres. Quelle pression ! Qu’est ce qui fait que l’on « tient » un engagement (tenir, encore un mot fort car effectivement en santé, il faut tenir) ?

Huit femmes de santé partagent leur engagement

J’ai posé cette question aux huit femmes mises en lumière par le collectif Femmes de Santé le 24 mai dernier.

Pour la première, Pr Cécile Badoual, médecin-chercheuse de renom à l’hôpital européen Georges-Pompidou, qui a ouvert la première consultation hospitalière dédiée aux cancers liés aux HPV brisant ainsi un paradigme établi qui soignait les cancers en fonction des zones anatomiques concernées et non en fonction de leur cause, l’engagement en santé se manifeste par le besoin de prendre soin de manière globale et de lutter contre la discrimination des personnes à qui l’on a diagnostiqué une lésion cancéreuse due aux HPV.

Pour la deuxième, Colette Casimir, cadre dirigeante devenue ingénieure en éducation thérapeutique, faisant à 62 ans une thèse de doctorat sur la sexualité des femmes atteintes d’un cancer, il s’agit de se sentir en vie et de lever un tabou énorme.

Aude Michon Bouquet, ex-comptable devenue danseuse et chorégraphe, donne un peu de répit aux femmes atteintes de cancer en leur faisant oublier la maladie le temps d’une salsa. Ce qui lui permet de tenir ? Le fait de pouvoir créer avec ces femmes.

Pour Charlotte Bouvard, qui défend les droits des bébés prématurés et de leurs parents, l’engagement permet de donner un sens à une épreuve qui n’en avait pas : celle d’avoir connu son fils, né trop tôt, quatre jours après sa naissance.

Soulager les parents et rendre le sourire à un enfant en lui permettant d’être acteur de son propre traitement, par le jeu et la récompense, c’est ce qui motive Alexandra de la Fontaine, une start-uppeuse dont le petit robot aide l’observance chez les petits asthmatiques sévères.

Quand l’intelligence artificielle et la génétique rencontrent l’anatomopathologie, cela donne une possibilité de détecter les anomalies de réparation de l’ADN sur des coupes de tissus de glande mammaire et de détecter un cancer ou un risque de cancer suffisamment tôt… Ouvrir une voie, gagner du temps pour toutes ces femmes, c’est ce qui motive la Dr Anne Vincent-Salomon, médecin-chercheuse de l’Institut Curie.

Créer un festival en santé mentale pour les jeunes par les jeunes (un immense succès, dès sa première édition) pour rompre leur isolement et faire parler d’une maladie taboue permet à Clémence Monvoisin, pair-aidante, d’accompagner des milliers de personnes.

Last but not least, la Dr Marianne Lainé souhaite que l’IVG ne soit pas « un traumatisme mais un incident de parcours de la vie » pour ces femmes qui viennent de tous les départements voisins afin de bénéficier d’une prise en charge rapide (premier RDV en moins de 48 heures), humaine, tolérante. L’institut médical Simone Veil est une nouvelle organisation des soins de ville, pour permettre aux femmes qui décident d’avorter d’être accompagnées dignement, et surtout, rapidement.

Briser les tabous, vivre, créer, changer la donne, lutter contre les discriminations, briser les paradigmes, changer une épreuve en action, être utile, donner du sens, aider les femmes, sauver des vies… Autant de Femmes de Santé, autant de raisons, autant de courages, autant de persévérances, autant d’engagements en santé.

Alice de Maximy

Source : lequotidiendumedecin.fr