À l’approche des élections municipales (15 et 22 mars), les Français sont plus que jamais préoccupés par les questions de santé. Selon un sondage BVA dont les résultats ont été dévoilés vendredi lors d'un débat des Contrepoints de la Santé, 82 % de la population estime que la santé, l’accès aux soins et la qualité des soins sont un enjeu important de l’élection à venir. 42 % le jugent même très important. Ces chiffres viennent confirmer l’impression d'élus sur le terrain.
« Nous sommes de plus en plus interpellés sur ces enjeux, même en dehors des périodes électorales », observe Frédéric Valletoux, maire de Fontainebleau (Seine-et-Marne) et président de la Fédération hospitalière de France (FHF). Selon l’élu, candidat à sa réélection, la santé n’était jusqu'à récemment qu’un sujet « très marginal » pour les administrés, évoqué par ceux-ci à l'occasion d’évènements ponctuels, comme une « fermeture de maternité ». « Aujourd’hui, plus un seul candidat ne fait campagne sans qu’on ne lui pose des questions relatives à la santé », souligne le patron de la FHF.
Le Dr Bernard Jomier, généraliste, conseiller municipal de Paris et sénateur, estime lui que « la santé a toujours été l'une des principales préoccupations pour les Français ». « Qu'elle soit devenue un sujet politique est relativement nouveau », ajoute-t-il néanmoins.
Étant donné les difficultés d'accès aux soins auxquelles sont confrontés les Français (5,4 millions d'entre eux n'avaient pas de médecin traitant en 2019, ndlr), il y a fort à parier que les questions de santé auront leur importance au moment où les Français glisseront leur bulletin de vote dans l'urne les 15 et 22 mars prochains. Et si la santé ne fait pour l'heure pas partie des prérogatives des maires, neuf Français sur dix souhaitent voir l’État leur donner des moyens supplémentaires pour « pallier les difficultés d’accès aux soins dans leur ville », selon le sondage de BVA.
« Les citoyens ont conscience que les élus ont fait leur boulot »
En dépit de cette absence de pouvoir en matière de santé, de nombreux élus se sont déjà mobilisés (en finançant des maisons de santé ou en aidant des praticiens à se loger par exemple) sans que cela ne soit toutefois suffisant. « En dix ans, les collectivités locales ont investi presque un milliard d’euros, sans pour autant enrayer complètement la désertification », remarque Christophe Bouillon, président de l'Association des petites villes de France (APVF) et député de Seine-Maritime. Le parlementaire estime que les édiles peuvent également jouer un rôle en assurant le lien entre les différents acteurs locaux de santé mais souligne que la bonne volonté des maires ne suffit pas.
Candidat à Barentin (Seine-Maritime), Christophe Bouillon souhaite donc que l'État joue « la carte de l’attractivité » (services publics, animation culturelle, sportive) et agisse sur les mobilités. De manière à permettre à un médecin d’exercer à 50 km de son domicile, par exemple. Invité à se positionner sur la liberté d'installation, le président de l'APVF botte en touche. « Les citoyens ont bien conscience que les élus ont fait leur boulot. Et donc ils se demandent aujourd'hui à quelle porte taper », fait-il valoir.
De son côté, Frédéric Valletoux souhaite que l'État « donne aux territoires la capacité d’innover, d’inventer en dehors du cadre établi ». « Peut-être que la seule disposition à prendre serait de reconnaître aux professionnels de santé un droit à l’expérimentation réelle », suggère-t-il. Une possibilité déjà offerte par l'article 51 du budget de la Sécu 2018. Mais le maire de Fontainebleau critique la lenteur du dispositif. « On en reparlera dans dix ans de l'article 51, ironise-t-il. Moi je parle d’un droit à l’expérimentation. Il figure dans la Constitution depuis 2004 mais n’a jamais été mis en œuvre. »
Santé environnementale : les maires peuvent déjà agir
À défaut de pouvoir réellement influer sur les questions d'accès aux soins, les mairies peuvent déjà agir en matière de santé environnementale, explique Bernard Jomier. « Les élus locaux peuvent être très utiles dans les domaines où ils ont des compétences particulières, explique le sénateur. Le logement, les mobilités l'urbanisme et activité physique sont des producteurs de santé. Les politiques qu'ils mettent en œuvre dans ces domaines font d'eux des acteurs de santé de premier plan. » « Lorsque vous faites de la prévention sur l’obésité que vous favorisez l’installation de pistes cyclables, vous agissez dans le domaine de la santé », appuie de son côté Christophe Bouillon.
Selon Bernard Jomier, les maires pourraient même en faire davantage, à condition que la répartition des tâches soit adaptée aux évolutions du système de santé (épidémiologie, vieillissement de la population…). « Nous avons besoin d'une clarification des compétences. Nous travaillons dessus au Sénat, car celle-ci n'est pas adaptée. Et il faut ensuite dire aux élus locaux, aux collectivités, ce qu’on attend d'eux et évidemment leur donner des moyens. »
*Enquête quantitative réalisée par Internet du 19 au 20 février 2020 auprès d'un échantillon de 1 000 personnes âgées de 18 ans et plus, représentatifs de la population française.
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