La désertification médicale est telle que, désormais, des cabinets de recrutement ont fait de la recherche de médecins leur spécialité. C'est le cas du cabinet "Dias & Associés", fondé à Bordeaux par Émilie Dias en 2017, initialement ouvert à tous les secteurs d'activité et qui s’est vite spécialisé dans la recherche de professionnels de santé.
Les communes sont de plus en plus nombreuses à solliciter les services de ces entreprises privées pour trouver la perle rare. Chaque mois, la société girondine reçoit ainsi trois à quatre nouvelles demandes. Dans la majorité des cas, ses clients recherchent un médecin généraliste.
Dénicher un médecin prêt à s'installer dans sa commune peut s’avérer être un véritable casse-tête pour les mairies. « Beaucoup dépensent énormément d’argent dans la publicité pour trouver un médecin, en pensant pouvoir y parvenir seules, observe Émilie Dias, ancienne employée de banque reconvertie dans le recrutement. Mais c’est un vrai métier. Et au final, elles investissent mais ne trouvent pas leur pépite. »
Une liste des avantages proposés par les mairies
Grâce à ses services, une commune en Ardèche vient d'attirer deux nouveaux généralistes. Contre 12 500 euros hors taxe (tarif pour 2019), Émilie Dias s’engage auprès de ses clients — essentiellement des mairies, mais aussi des hôpitaux ou des associations — à trouver un candidat motivé, prêt à s’installer dans la durée. Une mission qui peut prendre jusqu'à plus d'un an.
Dès le début du processus, Émilie Dias communique aux mairies une liste des avantages accordés par certains édiles pour attirer un praticien : véhicule de service, soirée d'accueil, loyer modéré… « On insiste pour leur dire que ça ne les oblige à rien, c'est juste un tableau d’inspiration ». La chasseuse de têtes les conseille également.
Certaines communes consentent de gros efforts. Pour attirer un médecin, l'une des mairies l'ayant sollicité a ainsi promis un cabinet rénové (avec matériel fourni et secrétaire payée par la mairie), deux véhicules (un de fonction et un autre privé), ainsi qu'un logement équipé de plus de 70 mètres carrés refait à neuf gratuit pendant deux ans. Si les communes sont prêtes à accorder des faveurs, elles ont également certaines exigences. Il n'est ainsi pas rare que les édiles exigent que le généraliste soit détenteur d'un DU de gériatrie ou de pédiatrie.
Pour trouver le praticien idéal, la chasseuse de têtes poste des annonces sur des sites de recrutement. Elle trie ensuite parmi les très nombreuses candidatures. « On reste très humain, on ne s’attache pas qu’aux diplômes, même si on les vérifie », précise Émilie Dias, détentrice d’une licence internationale en gestion des ressources humaines. La majorité des candidatures étant celles de praticiens étrangers, Émilie Dias se doit d'être « constamment informée sur l’aspect purement juridique », notamment pour savoir si un candidat peut s'inscrire à l'Ordre des médecins.
La transparence pour éviter les échecs
Le cabinet multiplie ensuite les entretiens avec les candidats afin de s’assurer de leur fiabilité, avant de les présenter aux mairies. Pendant cette phase, Émilie Dias doit composer avec leurs exigences. « Nous faisons très attention à ce qu'ils veulent », souligne-t-elle.
Pour la commune d'Ardèche accueillant deux nouveaux médecins, l'entrepreneuse avait un temps songé à un praticien « amoureux de la nature et amateur de sport ». « Mais sa femme avait une exigence : être à proximité d’un grand centre commercial pour pouvoir faire du shopping et ne pas s’ennuyer, ce que je ne pouvais pas lui offrir en Ardèche, se souvient la chasseuse de têtes. Cela peut paraître ridicule, mais c'est une décision de couple, de vie. Et si madame a peur de s’ennuyer, je suis obligée d’en tenir compte. » Commerces, services publics, logement : durant tout le processus, Émilie Dias affirme ne jamais mentir sur les caractéristiques de la commune. « On joue la transparence pour s’assurer qu’il n’y a pas d’échec ! »
Ce qui n’empêche toutefois pas les déconvenues. Début 2018, une médecin franco-britannique avait ainsi fait faux bond au maire de Bourth (Eure) deux semaines avant de prendre son poste. Le cabinet d’Émilie Dias était donc reparti de zéro, pour finalement en trouver un autre, en activité depuis janvier 2019.
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