L’espace européen des données de santé se dessine

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Publié le 30/04/2024
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Le 24 avril, le Parlement européen a approuvé le règlement relatif à l’Espace européen des données de santé (EEDS), qui améliore l'accès des citoyens à leurs informations médicales et favorise leur partage sécurisé.

Crédit photo : GARO/PHANIE

Le Parlement européen a adopté le nouveau règlement sur l’Espace européen des données de santé (EEDS) qui permettra à partir de 2028 l'interopérabilité des dossiers numériques des patients et leur consultation par les professionnels de l'ensemble de l'Union.

Depuis 2021, les médecins français peuvent déjà consulter les résumés et les synthèses médicales électroniques de leurs patients croates, espagnols, estoniens, luxembourgeois, maltais, portugais et tchèques, et inversement pour les patients Français soignés dans ces pays, avec l'accord des patients concernés. Cette procédure sera progressivement élargie à partir de 2025 à l’ensemble de l’UE, avec d’abord Chypre, la Grèce et l’Irlande, puis s’achèvera en 2030. Dès 2026, les médecins des pays déjà intégrés au règlement pourront effectuer des e-prescriptions pour les patients concernés, lesquels pourront les faire honorer dans les pharmacies de ces pays.

Au-delà de la consultation des dossiers, le recueil et l’exploitation des données ont été l’objet de longues tractations entre les Etats et les institutions européennes, notamment en ce qui concerne « l’utilisation secondaire » de celles-ci, c’est-à-dire leur transfert à des fins de santé publique, de recherche ou industrielles. Le Parlement a notamment souligné l’importance de ces partages pour mieux combattre les maladies rares, pour lesquelles les données restent trop peu nombreuses et fragmentées. Par contre, aucun partage de données ne sera autorisé à des fins commerciales ou publicitaires, pas plus que pour les évaluations réalisées par les assurances ou dans le cadre de prêts.

Adoption d’un compromis

La question des utilisations secondaires a été particulièrement controversée lors des débats parlementaires et des allers-retours entre les différentes institutions européennes. Selon la Délégation au numérique en santé du ministère de la Santé français, le compromis adopté a été largement inspiré par la législation française sur les droits des patients, la protection de la confidentialité et la mise à disposition de ces données. Il offre donc des garanties identiques à celles déjà en vigueur au niveau national. Avec l’EEDS, les patients peuvent non seulement être informés individuellement des mouvements de données les concernant, mais ils peuvent s’y opposer. Les informations seront dans tous les cas anonymisées et pseudonymisées.

Décidée en 2022, la création de l’EEDS est maintenant effective, mais sa mise en place progressive prendra encore quatre ans, car elle implique non seulement des transcriptions et des évolutions réglementaires et techniques dans tous les États membres, mais aussi d’importants changements pour le marché des dossiers électroniques. À l’issue des votes, les deux rapporteurs du Parlement, le Croate Tomislav Sokol et l’Italienne Annalisa Tardino, ont parlé d’une « avancée majeure pour la santé numérique en Europe ». Le ministère de la santé français estime que l’Espace européen permettra « plus d’efficacité et de sécurité » dans l’utilisation des données de santé, mais aussi « une meilleure gouvernance du secteur » et un « renforcement de la souveraineté européenne » dans ce domaine.

Denis Durand de Bousingen

Source : Le Quotidien du Médecin