Livi, Qare et Medadom… Ces trois plateformes de téléconsultation font l'objet de vives critiques, notamment de la part du syndicat MG France, qui les accuse d'être trop « coûteuses », « hors-sol », source de « mésusages » et à l'origine de « dérives ».
Le syndicat de généralistes a analysé les premiers résultats d'une étude pilotée par les caisses primaires d'Île-de-France – ayant comparé les téléconsultations pratiquées par des généralistes traitants et celles effectuées par trois plateformes dédiées à cet usage (Livi, Qare et Medadom). MG France constate d'abord la « cible manifestement ratée » des patients à qui bénéficient ces plateformes. « Les principaux bénéficiaires de ces téléconsultations ne sont pas les patients âgés polypathologiques n'ayant plus de médecin traitant comme on a voulu nous le faire croire », cinglait MG France, qui dénonçait aussi certains surcoûts (26 % des actes facturés avec des majorations de nuit ou de dimanche), le taux 2,5 fois plus élevé de prescription d'antibiotiques via les consultations à distance des plateformes ou encore la revoyure plus fréquente.
Position dogmatique
Contactées par Le Quotidien, les trois plateformes visées souhaitent aujourd'hui « rétablir l'équilibre » et répondre à cette étude et à l'analyse du syndicat de généralistes. « Nous n'avons pas été très surpris par le communiqué de MG France, confesse la Dr Julie Salomon, directrice médicale de Qare. Ce syndicat a une position dogmatique vis-à-vis des plateformes de téléconsultation. Les chiffres qu'ils ont sortis sont partiaux et manquent de contextualisation. Il existe indéniablement des écarts entre les téléconsultations proposées par les médecins traitants et les plateformes mais cela s'explique car les modalités d'accès et les motifs de recours sont bien différents », recadre-t-elle. En clair, il n'est pas absurde de constater des profils de patients différents puisque les patients jeunes et urbains sont les plus enclins à utiliser les plateformes.
Le Dr Nicolas Leblanc, directeur médical de Livi, partage ce constat. Il regrette « les polémiques inutiles » et les « procès à répétition » contre les opérateurs de téléconsultation. « Ce n'est pas la bonne manière de coopérer, juge ce médecin de santé publique. Nous devons créer les conditions d'une bonne entente entre tous les acteurs du système de soins car les besoins de santé des Français n'ont pas le temps pour ce genre de polémiques ! ».
Utilité médicale
Déterminé à apporter sa pierre au débat, le spécialiste des bornes et cabines de téléconsultation Medadom a même diffusé un communiqué pour souligner le « service médical rendu aux patients », notamment à tous ceux dépourvus de médecin traitant. « Au sein de Medadom, plus de 20 % des patients ne disposent pas de médecin traitant (soit deux fois la moyenne nationale) et ils n’ont comme seule alternative qu’une prise en charge en soins non programmés », souligne l'opérateur.
Comme ses deux homologues, cette société revendique d'être une des solutions en matière d'accès aux soins, notamment pour des patients démunis ou précaires. « Au sein des plateformes, la proportion de bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire est deux fois supérieure à la moyenne nationale. Cela prouve que la téléconsultation, autrefois absente, est une solution efficace pour les patients les plus précaires », fait valoir le Dr Eli-Dan Mimouni, directeur médical et cofondateur de Medadom.
Les plateformes assument de s'adresser à une cible jeune et citadine. « Nous soignons majoritairement des urbains car 82 % de la population française habite en ville mais ce n'est pas pour autant qu'ils n'ont pas problème de santé », souligne le Dr Nicolas Leblanc (Livi). « En santé publique, les jeunes sont les plus difficiles à attraper, remarque aussi la Dr Julie Salomon (Qare). Le fait d'avoir une patientèle plus jeune sur les plateformes nous permet d'atteindre davantage cette population et de faire passer des messages de bonnes pratiques, de dépistage et de prévention ». « Nous sommes le dernier filet pour tous ceux qui n'ont pas accès aux soins courants. Grâce à notre activité, de nombreux passages aux urgences sont évités chaque année », synthétise Nicolas Leblanc.
Plus d'antibiotiques mais…
S'agissant du surcroît de prescriptions d'antibiotiques — 2,5 fois plus élevées dans le cadre des téléconsultations des plateformes — les opérateurs privés ciblés invitent à comparer ce qui est comparable. « Les motifs de recours sur les plateformes ne sont pas les mêmes que ceux des généralistes traitants, analyse Julie Salomon. Nous avons par exemple beaucoup d'infections sexuellement transmissibles, de cystites ou d'infections ORL. Ces pathologies amènent évidemment à de l'antibiothérapie ». D'ailleurs, recadre-t-elle, « l'étude montre qu'il y a globalement moins de prescriptions sur les plateformes (31 % versus 39 % pour les généralistes traitants). On observe notamment des écarts importants sur la prescription d'antidouleurs ou de psychotropes (2 % versus 10 %). Tout ça est logique car les médecins traitants prennent en charge des patients plus âgés aux pathologies plus lourdes. Contrairement à ce qu'insinue MG France, cela prouve que tout n'est pas binaire ».
Les trois sociétés déclarent ne pas avoir attendu les résultats de l'étude pour renforcer leur lutte contre l'antibiorésistance. Medadom a mis en place les ordonnances conditionnelles avec Trod et communique auprès de ses pharmaciens équipés de bornes ou de cabines sur l'intérêt de réaliser un Trod en amont de la téléconsultation dans certains cas. Quant à la plateforme Livi, promet son directeur médical Nicolas Leblanc, elle a monté un groupe de travail pour « mettre en place des actions afin que l'antibiothérapie soit prescrite dans la justesse des référentiels et des bonnes pratiques médicales, auxquelles nous sommes très attachés ».
54 % des médecins femmes ont été victimes de violences sexistes et sexuelles, selon une enquête de l’Ordre
Installation : quand un cabinet éphémère séduit les jeunes praticiens
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier