« On m’a proposé cette place pour porter la santé dans notre famille politique en Europe », confie au Quotidien le Pr Laurent Castillo, 5e sur la liste des Républicains (LR) pour les élections européennes. Soit en position potentiellement éligible, ce qui n’a pas manqué de faire des envieux dans le parti dirigé par son ami Éric Ciotti, lesquels lui reprochent d’être méconnu au niveau national. Peu importe, le PU-PH et spécialiste ORL niçois, qui préside le conseil médical de l’Institution universitaire de la face et du cou (IUFC), trace sa route.
Également conseiller ordinal des Alpes-Maritimes et membre du Conseil national des universités, le Pr Castillo tient à défendre son regard original de praticien : il n’est pas un politique. Enfin presque, si l’on met de côté sa candidature malheureuse aux élections législatives de 2022 dans la troisième circonscription des Alpes-Maritimes (score de 12,81 %), son poste de suppléant d’Honoré Colomas aux départementales de 2015 et son titre de coordinateur départemental d’« Oser la France », le laboratoire d’idées de l’ex-député LR Julien Aubert. Quoi qu’il en soit, s’il est élu, le Pr Castillo compte bien conserver une activité clinique.
Médicaments : la quête de souveraineté
Selon le praticien de 62 ans, l’Europe peut acquérir un rôle « majeur » en matière de santé. C’est pourquoi il défend en premier lieu le repositionnement dans les pays européens – et en France particulièrement – de la production de médicaments, une souveraineté pharmaceutique indispensable pour combattre les pénuries. « On le constate déjà : quand on prescrit des antibiotiques pour une otite, il n’y en a parfois pas en pharmacie ! Ce n’est pas normal qu’on ne soit pas capable d’assurer la délivrance d’amoxicilline ou de paracétamol… », se désole-t-il.
L’occasion pour lui de critiquer au passage « le brillant énarque qui s’est dit que le prix des médicaments allait baisser avec les génériques » et d’appeler à augmenter l’investissement européen sur la recherche et le développement. Car, observe-t-il, « tous les nouveaux médicaments, comme les biothérapies ou les CAR-T cells, à haute valeur médicale et financière ajoutée, viennent des États-Unis ». Son objectif serait ainsi de doubler le budget européen consacré à la recherche à hauteur de 4 % d’ici à 2030.
Davantage de campagnes de prévention
Le deuxième axe de travail LR sur la santé pour les européennes porte sur la prévention. Pour corriger le retard français, le Pr Castillo recommande de réaliser de grandes campagnes de prévention à l’échelle continentale notamment sur les maladies cardiovasculaires. « Un investissement aujourd’hui pour demain », défend-il, citant le mauvais chiffre de l’espérance de vie en bonne santé… en France : « 64 ans, contre 72 ans dans des pays nordiques », par exemple. « À terme, c’est aussi faire des économies de santé ! », argumente-t-il.
Interrogé plus particulièrement sur l’IVG, le Pr Castillo assure qu’il n’y a « pas de sujet », ni de son côté, ni chez François-Xavier Bellamy, la tête de liste du parti LR, qui s’est pourtant exprimé par le passé contre « la banalisation » de l’acte ; estimant même qu’il aurait voté « non » pour son inscription dans la Constitution (s’il avait été parlementaire national). Le Pr Castillo, lui, se dit « très à l’aise avec la loi et sa constitutionnalisation ».
Pas emballé par la convention médicale
« Profondément choqué » – comme nombre de nos lecteurs – par le choix de l’ancien ministre de la Santé Olivier Véran de se former « pour aller gonfler des lèvres ou des pommettes », le PU-PH niçois estime qu’il « aurait pu faire autre chose qu’une activité rentable, alors qu’il est neurologue et en plus député… » Mais ce n’est pas la médecine esthétique que critique le Pr Castillo, explique-t-il, argumentant qu’il est d’ailleurs responsable d’un diplôme inter-universitaire (DIU) d’« anatomie des structures superficielles de la face appliquée aux techniques d’injection et de volumétrie à visée esthétique » !
Quid du C à 30 euros, proposé par la Cnam aux syndicats dans son projet de convention médicale ? Le candidat LR aux européennes n’est pas si enthousiaste : « C’est certes une avancée, certes avec des impératifs financiers… Mais c’est certain qu’on n’embarquera pas toute la profession ! » Le pont rhétorique avec la médecine esthétique est construit : « Si un bilan d’hypertension artérielle était rémunéré autant qu’une aiguille qui injecte de l’acide hyaluronique dans une lèvre supérieure, il y aurait beaucoup plus de généralistes ! », clame le spécialiste ORL exerçant en secteur 2.
Contre la régulation à l’installation
Alors que le député socialiste Guillaume Garot présentera bientôt la deuxième mouture de son texte transpartisan introduisant un conventionnement sélectif, le Pr Castillo se déclare opposé à toute mesure de régulation. « On ne peut pas imposer aux médecins de s’installer dans des déserts non seulement médicaux, mais aussi scolaires et publics ! »
Quant aux jeunes Français qui s’expatrient à l’étranger pour faire des études de médecine, le PU-PH cite le texte du Dr Yannick Neuder et invite à les rapatrier dans l’Hexagone. Il note aussi que « certains pays, comme la Grèce, ont deux fois plus de médecins par habitant que nous ! »
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