Fin du Ségur centré sur l'hôpital, les médecins libéraux restent sur leur faim

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Publié le 21/07/2020
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Crédit photo : BURGER/PHANIE

Après les annonces sur les salaires la semaine dernière, le gouvernement a clôturé ce mardi matin le Ségur de la santé en présentant une série de dispositions pour « accélérer la transformation du système » de santé.

L’essentiel des 33 mesures présentées par Olivier Véran concerne l’hôpital avec notamment l’annonce d’une enveloppe de 50 millions d’euros pour créer 4 000 lits « à la demande ». D’autres réformes impacteront le système de façon plus globale. C’est le cas notamment de la rénovation de l’Ondam, les acteurs de santé appelant à ce que celui-ci s’appuie davantage sur les tendances épidémiologiques. Le ministre de la Santé a donc indiqué qu’il allait saisir le Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie (HCAAM) afin qu’il fasse des propositions d’évolution de l’Ondam en vue du PLFSS 2022.
Sur les 19 milliards d’euros d’investissements nouveaux prévus dans la santé (hors revalorisation salariale), 13 sont consacrés à la reprise de la dette hospitalière et sur les 6 restant, 2,5 milliards seront engagés sur « des projets structurants sur les relations ville-hôpital » a précisé Olivier Véran.

Soins non programmés et télémédecine : chantiers prioritaires

S'estimant tenue à l'écart de ce Ségur de la Santé, la médecine de ville était surtout concernée à travers le quatrième pilier de cette concertation dont l'objectif était de « fédérer les acteurs de santé dans les territoires au service des usagers ». « La crise a montré que la médecine de ville joue un rôle crucial dans la télésanté et l’accès aux soins non programmés », a souligné le ministre de la Santé. Pour assurer le développement de la télémédecine dans tous les territoires, Olivier Véran a redit que  la prise en charge à 100 % de la téléconsultation mise en place pendant la crise, serait prolongé « le temps nécessaire » (elle est pour l'heure prévue jusqu'à fin 2020, NDLR). Il a aussi appelé les partenaires conventionnels à s’emparer rapidement des sujets de la télé-expertise et de la télésurveillance.
Pour améliorer l’accès aux soins non programmés, le gouvernement veut s’appuyer sur le développement de l’exercice coordonné. Il prévoit d'accélérer le déploiement des infirmiers en pratiques avancées (IPA) auprès des généralistes, avec pour objectif 3 000 IPA formés d’ici à 2022.

Outre le doublement des maisons et centres de santé, le cadre et les missions des équipes de soins primaires et spécialisées seront formalisées et un « mécanisme de bonus financier » sera mis en place pour les CPTS créées en 2020-2021 et celles qui remplissent des missions de régulation et coordination en matière de soins non programmés. Encore une fois, le ministère de la Santé renvoie les médecins vers l’assurance maladie et la négociation d’un avenant conventionnel d’ici la fin 2020. « Ce sont des mesures que nous réclamions depuis longtemps et qui vont dans le bon sens », estime le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.

Sur les soins non programmés, le gouvernement mise aussi beaucoup sur la concrétisation du Service d’accès aux soins (SAS), il prévoit l’ouverture de la plateforme numérique d’ici la fin de l’année ainsi que le déploiement des premières expérimentations organisationnelles. Le ministre de la Santé a en revanche une nouvelle fois botté en touche sur la question du numéro unique, affirmant que « rien n’était tranché ». Sans donner  plus de détails, le gouvernement souhaite aussi que s'engage une réflexion sur la « rénovation de la permanence des soins ».

À quand un Ségur de la médecine libérale ?

À ces mesures s'ajoutent la volonté de développer l’exercice mixte, celle de donner plus d’autonomie aux hôpitaux de proximité ou la création de ROSP pour les autres spécialités, mais c’est à peu près tout pour ce qui concerne la médecine de ville. Et ce n’est pas suffisant pour les principaux intéressés qui veulent plus et rapidement. « Nous en restons aux grandes idées, mais au-delà des mots il faut maintenant des actes et des moyens. À ce jour le Ségur de la Santé n’a pas répondu à nos attentes », considère le Dr Ortiz. Constatant que les moyens ont été mis pour l’hôpital « de manière légitime », il en attend de même pour la médecine libérale pour laquelle rien de concret n’a été promis pour le moment. « On nous fixe des négociations conventionnelles d’ici fin 2020 pour l’exercice coordonné et la télémédecine, mais ça n’est pas suffisant, il faut en ouvrir une plus large, notamment pour pouvoir, comme cela a été le cas pour les salaires hospitaliers, parler de revalorisation de l’acte médical. » Une négociation conventionnelle que les médecins libéraux souhaiteraient entamer rapidement mais il n’est pas certain que l’assurance maladie partage cet empressement. « Elle souhaiterait probablement la décaler le plus possible mais ce ne serait pas acceptable, nous n’allons pas attendre deux ans », souligne le Dr Ortiz. « Le ministre a parlé d’un Ségur de la santé publique, je l’appelle à ouvrir un Ségur de la médecine libérale », conclut-il.


Source : lequotidiendumedecin.fr