L’aide médicale d’État (AME) n’a pas fini de susciter des débats enflammés. Tandis que la ministre de la Santé et de l’Accès aux soins était auditionnée mardi 12 novembre par la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale sur la mission santé du projet de loi de finances (PLF, dont dépendent les crédits alloués à l’AME), les débats ont à nouveau été vifs sur la question du budget et de la réforme de ce dispositif d’accès gratuit aux soins pour les étrangers en situation irrégulière, créé en 2000, cible répétée de la droite et de l’extrême droite.
Fraude marginale
Pourtant, selon Geneviève Darrieussecq, fidèle à son discours sur ce dossier, il s’agit de « l’argent public le mieux contrôlé de la République ». Une première vérification a priori est opérée sur les dossiers d’inscription – seuls 2 % d’entre eux ne seraient pas conformes – et, un autre contrôle a posteriori sur les dépenses. là aussi, la fraude serait « très marginale » selon l’allergologue.
Alors que le dossier divise au sein même du camp gouvernemental, la ministre a souhaité tordre le cou aux « caricatures » sur l’AME. Les interventions pour « oreilles décollées », liées à des problèmes infectieux ou de santé – et « jamais esthétique », a insisté la ministre – auraient représenté seulement 10 000 euros en 2023. La pose d’anneaux gastriques équivaudrait à 4 000 euros ! Loin des affirmations de certains députés au sujet de la gabegie supposée de l’AME… « Ce que je souhaiterais, vraiment, c’est que l’on soit dans une vraie responsabilité sanitaire et de santé publique : il faut que l’AME reste l’AME ! », a-t-elle clamé devant les députés.
Vers une quasi-reconduction des crédits ?
Créditée dans le budget 2025 initial du gouvernement d’1,3 milliard d’euros, en augmentation de 9 % sur un an, l’AME avait été calculée avant la dissolution, à partir d’une estimation de l’augmentation des besoins. La ministre a indiqué souhaiter « reproduire et tenir » le budget de l’année passée (soit 1,2 milliard). Un amendement du gouvernement, porté par Laurent Saint-Martin, ministre du Budget et des Comptes publics, devrait être déposé en ce sens en séance au Sénat.
S’appuyant sur le rapport Evin-Stefanini consacré au sujet, Geneviève Darrieussecq a souligné à nouveau qu’il s’agissait d’une mesure de santé publique, argumentant que « les plus grands traitements pris en charge par l’AME sont les antiviraux contre le VIH ». De plus, a-t-elle ajouté, cette aide permet une prise en charge en médecine de ville, évitant de fait des embouteillages aux urgences et à l’hôpital. À la clé, une réduction des coûts.
La création d’une « aide médicale d’urgence (qui consisterait à réduire le périmètre de l’AME) coûterait beaucoup plus cher, avec des risques sanitaires pour la population française. Je porte la raison et l’humanité : il ne faut pas déraisonner dans ce domaine-là », a-t-elle lancé.
La ministre n’exclut pas toutefois d’adapter le dispositif à la marge, dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques, de façon aussi à « éviter des choses qui ne paraîtraient pas justes ». Fin 2023, quelque 466 000 personnes ont bénéficié de cette aide, qui n’est pas un facteur d’attractivité migratoire, a affirmé au Quotidien l’ancien ministre Claude Evin, co-auteur du rapport.
Des sénateurs veulent raboter l’AME de 200 millions
Mais dans le même temps, à la commission des Finances, la majorité sénatoriale - une alliance entre LR et les centristes - a voté une diminution du budget alloué à l’AME de 200 millions d’euros. La proposition votée à l’initiative du sénateur centriste Vincent Delahaye consiste à conditionner les prises en charge de prestations « non urgentes » comme les opérations de la cataracte ou encore la pose de prothèses de genoux à un « accord préalable » de l’Assurance-maladie. En parallèle, les sénateurs demandent au gouvernement d’élargir la liste de ces actes non urgents, fixés par décret.
La majorité de droite du Sénat appelle régulièrement, ces dernières années, à transformer l’AME en aide médicale d’urgence (AMU), en réduisant son panier de soins. L’an passé, les sénateurs avaient proposé de réduire de 400 millions ses crédits, sans succès. Le dispositif sénatorial adopté en commission devra à nouveau être adopté en séance publique au mois de décembre pour figurer dans le projet de loi de finances.
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