Brève

Jean-François Cibien (APH) : « Le gang de l'administration centrale nous empêche d'avancer »

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Publié le 04/03/2021
Dans la continuité des négociations autour du Ségur, le projet d'ordonnance sur la gouvernance hospitalière a été retoqué par le Conseil supérieur des professions médicales avec un vote négatif des trois collèges statutaires de praticiens. Explications par Jean-François Cibien, président d'Action Praticien Hôpital, union d'Avenir hospitalier et de la Confédération des praticiens des hôpitaux.
Cibien

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Décision Santé : Pourquoi les trois collèges statutaires de praticiens hospitaliers ont voté contre le projet d'ordonnance qui devait instaurer une réforme de la gouvernance "relative aux groupements hospitaliers de territoire à la médicalisation de la gouvernance" ?

JF Cibien : Précision, à l'inverse la FHF a voté unanimement pour. Cette ordonnance n'est donc approuvée que par la gouvernance en place. Alors que la loi HPST a conduit à instaurer un seul pilote à la tête du bateau hôpital, c'est-à-dire le directeur, tout le monde a compris qu'il s'agissait d'une erreur. Suite à la pandémie, les médecins hospitaliers ont repris le pouvoir sur l'administration qui les étouffe, avec des solutions fonctionnelles efficaces. Nous avons alors pensé qu'il y aurait un rééquilibrage de cette gouvernance vers la remédicalisation dans les suites du Ségur.

Quelles étaient vos revendications ?

Dans le cadre de la remédicalisation, nous souhaitions un rôle renforcé du président de la CME et de la CME, d'autant plus si l'on monte au niveau du GHT. Nous demandions aussi que les chefs de service soient élus par leurs pairs dans le cadre d'un projet médical. Enfin, notre objectif était de mettre en place une instance indépendante de la CME pour construire le volet social des praticiens afin de conserver les talents au sein de l’hôpital public.

La gouvernance était une suite logique de la hausse des rémunérations demandées lors du Ségur. Pourquoi êtes-vous si déçu ?

Le Ségur avait été annoncé comme un choc d'attractivité pour les praticiens et les soignants hospitaliers. Mais c'est de la poudre aux yeux. Le différentiel de salaire entre public et privé est de 1 à 3 et peut aller jusqu'à 10. Pour les négociations, nous sommes partis du rapport Claris qui invitait à la remédicalisation : nous pensions que les ordonnances allaient donner plus de latitude aux présidents de la CME, à leurs vice-présidents, et surtout à la CME. L’ordonnance nous propose des mesures qui sont aux yeux des praticiens très largement insuffisantes.

Un autre élément important du rapport est la notion de service. Pendant le Ségur, a été évoquée la possibilité de faire élire le chef de service par ses pairs dans le cadre d'un projet de service. C'est ce qu'on appelle la démocratie sanitaire. Or cette mesure n'a pas été retenue : dans le rapport Claris, plus de 50 % des praticiens ayant répondu aux questionnaires indiquent qu'ils ne s'estiment plus concernés par la vie institutionnelle de l'établissement. Un tiers des postes de PH sont aujourd’hui vacants. Les jeunes ne veulent plus venir travailler à l'hôpital. Par exemple, aux urgences de l’hôpital de Marmande, il faudrait 12 praticiens. Il n'y en a plus qu'un, les autres ont quitté la structure.

Quelles sont les suites de cette négociation ?

Le projet d'ordonnance va être représenté le 16 mars mais à l'identique. La gouvernance selon nous devrait être un partage des responsabilités. Le président de al CME fait vivre le projet d'établissement. Le directeur devrait s'occuper de la partie financière et de la partie juridique et de l’aide au pilotage des projets et de l’établissement. Mais avec la loi HPST ce dernier gère tout. Or la plupart des établissements sont en déficit car ils n'ont pas l'enveloppe suffisante pour pouvoir remplir leurs missions. En France, on raisonne à l'instant T. Le pilotage de l'information au sein du directoire doit être réellement partagé. Les cerveaux et les bras on les a dans ce pays et plus particulièrement au sein de l’hôpital. Mais le gang de l'administration centrale nous empêche d'avancer.

Après ce constat, quelles sont vos intentions ?

Nous continuerons à avancer pour porter et apporter le changement nécessaire pour construire l'hôpital de demain. Car si l'hôpital tombe, l’accès à la santé pour tous dans le pays sera très en difficulté. Et la santé pour notre nation est un des piliers qui tient la République. Il nous faut trouver le moyen d'éteindre ensemble l'incendie pour repartir sur une base plus saine. APH continuera à défendre les praticiens hospitaliers, leurs droits et l’hôpital public.


Source : lequotidiendumedecin.fr