« À un moment, il faut taper sur la table et la renverser ! ». Président du Syndicat national des médecins remplaçants hospitaliers (SNMRH), le Dr Éric Reboli vient de lancer son parti politique, EXISTE !, huit mois avant les élections européennes de 2024.
Son objectif ? « Créer la surprise aux européennes, envoyer des représentants à Strasbourg pour faire pression », en particulier sur les questions de santé. L’urgentiste de 57 ans espère « obliger le gouvernement à négocier et à revoir sa copie ». « Énormément de choses se jouent au niveau européen dans le domaine de la santé », qu’il s’agisse « des politiques sanitaires, de la vaccination ou de la prévention ». Réinvestir l'espace politique serait ainsi « la seule manière de peser ». « Les manifestations, les grèves, les pétitions, le lobbying auprès des députés ne marchent pas, les médecins sont méprisés, dévalorisés, insultés », juge le président du SNMRH qui reproche au gouvernement « d’élaborer des lois à coups de 49.3, de décrets, d’obligations… ». Un exécutif qu’il accuse d’utiliser « la menace et la coercition » vis-à-vis des médecins qu’il « n’écoute pas ».
Deux élections législatives perdues
Le Dr Reboli n’est pas un novice en politique. Il s'est présenté plusieurs fois en vain aux élections législatives en 1997 et en 2002 (également aux cantonales en 2001), contre des personnalités comme Laurent Fabius ou François Loncle. Mais il faudra attendre mars 2023 pour que l'urgentiste renoue avec la lutte syndicale et politique. Cette fois avec la casquette de président du SNMRH où il mènera, lors de la mise en application de la loi Rist, « un combat difficile contre un gouvernement buté ».
Côté hôpital, le Dr Reboli trouve « inacceptable » que l'Objectif national de dépenses d'assurance-maladie (Ondam) soit « en dessous de l’inflation ». Et le gouvernement ne fait, selon lui, « rien pour remédier à la problématique du manque d’attractivité des métiers ». Pire, « on tape sur les remplaçants qui étaient la béquille du système et les titulaires sont maltraités. Résultat, un grand nombre de services ferment, des gens ne sont plus pris en charge », se désespère le médecin.
En ville cette fois, les libéraux seraient « traités comme des salariés de la Sécu, alors que ce sont des chefs d’entreprise », poursuit l’urgentiste qui reproche au gouvernement de ne pas compenser assez les surcoûts de l’inflation. « Ce qui me choque, c’est que certains médecins libéraux ne peuvent même plus faire une journée de grève à cause de leur trésorerie. C’est dramatique ». Quant au contrôle renforcé des indemnités journalières, il dénonce une « chasse aux sorcières ».
Son parti se veut le reflet de sa pratique qu’il qualifie lui-même « d’humaine et bienveillante ». Outre la santé, son programme fera des propositions en matière d'éducation et de culture, d'innovation et d'économie, d'environnement et de sécurité.
Santé en danger et Médecins pour demain contactés
Il lui reste à trouver des noms à placer sur sa liste. Une chose est sûre, ceux-ci ne feront pas tous partie du secteur. « Ce que vivent les médecins dans le monde de la santé, d'autres le vivent aussi dans l’éducation, la justice, la police… ».
En attendant, le Dr Reboli multiplie les contacts. À l’image du Dr Arnaud Chiche, fondateur du collectif Santé en danger, ou de la Dr Moktaria Alikada Arioua, porte-parole de Médecins pour demain et généraliste en région parisienne. Contactée par Le Quotidien, celle-ci ne sait pas encore si elle fera partie de l’aventure européenne. « Je soutiens la liste mais je n’ai pas encore terminé ma réflexion. En politique, lorsque vous ne rentrez pas dans les standards, on peut vous éjecter très vite. Et je ne compte pas avaler des couleuvres. »
Joint également par Le Quotidien, le Dr Gérald Kierzek – qui ne fera pas partie de la liste – « ne peut qu’être d’accord avec cette démarche, au sens où cela peut permettre de se rapprocher du terrain, de revenir sur du bon sens en politique ». Selon lui, « il faut peut-être que des soignants se mettent à faire de la politique pour régler les problématiques comme l’accès aux soins ».
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