Les députées Virginie Lanlo (Renaissance, Hauts-de-Seine) et Soumya Bourouaha (GDR-Nupes) ont présenté mercredi 29 mai les conclusions de leur mission flash sur le rôle de la médecine scolaire dans la lutte contre le harcèlement scolaire, commandé par la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale.
Le fléau du harcèlement scolaire concerne entre 800 000 et un million d’enfants, ont cadré les deux co-rapporteures, qui préfèrent parler d’enjeu de « santé scolaire » (incluant médecins et infirmiers scolaires, mais également psychologues de l’éducation nationale (psyEN) et assistants de service social) plutôt que de médecine scolaire seule – déplorant au passage le trop faible attrait pour tous les métiers de santé de l’Education nationale. « L’efficacité de la santé scolaire en matière de lutte contre le harcèlement se heurte à de nombreux obstacles, au premier rang desquels le manque de personnels et de moyens, l’empilement de leurs missions et des difficultés importantes de coordination », peut-on lire.
Seulement 133 nouveaux médecins en 6 ans !
Le défi est d’abord celui des moyens humains et financiers, ce qui suppose de rendre les métiers beaucoup plus attractifs. Entre 2018 et 2023, le ministère de l’Éducation nationale a recruté seulement 133 nouveaux médecins pour 300 postes ouverts (soit un taux de couverture de 44 %), relèvent les élues. Les autres professions de santé du secteur ne sont pas mieux loties. Les effectifs de psychologues scolaires diminuent depuis 2017 et « 30 postes n’ont pas été pourvus sur les 210 offerts aux sessions 2020 et 2021 des concours de recrutement ». Quant aux infirmiers et assistants de service social, leurs effectifs restent stables mais « le rendement des concours n’atteint pas 100 % » et ne permet pas de compenser les départs.
Dans ce contexte, sans surprise, pour susciter des vocations, la mission flash propose en premier lieu de jouer sur le levier budgétaire en augmentant les rémunérations de tous les personnels pour relancer l’attractivité de ces professions concernées (médecins scolaires, infirmiers scolaires, assistants de service social, psyEN).
Il conviendrait aussi d’alléger les tâches administratives « qui éloignent les professionnels du cœur de leurs missions ». Proposition : développer les secrétariats médicaux pour la prise de rendez-vous et la saisie des données.
Sur le volet spécifique de la médecine scolaire, les élues suggèrent de développer des stages en établissement scolaire pour les internes et des dispositifs similaires pour les infirmiers, assistants médicaux et psychologues en formation. Parallèlement, afin de décloisonner un système en silos, les députées avancent la piste de « passerelles entre hôpital, médecine de ville et établissements scolaires », dans les deux sens, pouvant être « un des remèdes au manque de médecins scolaires ». Une pluralité et une souplesse d’exercice également évoquée par Frédéric Valletoux lors des Assises de la pédiatrie.
Dans le second degré, une visite psy « obligatoire » devrait être organisée en classe de quatrième par les psychologues de l’éducation nationale (psyEN) « pour une orientation, si nécessaire, vers les professionnels du territoire », peut-on lire. Le caractère effectif des autres visites doit être garanti, en y affectant les ressources nécessaires ‒ moins de 20 % des élèves de 6 ans passent la visite médicale obligatoire et 60 % effectuent leur bilan infirmier à 12 ans, rappelle la mission flash.
Culture commune
Outre le renforcement des ressources humaines, la mission préconise enfin une collaboration accrue « entre les médecins scolaires et les médecins de ville », pour améliorer l’efficacité de la prévention, la détection et la prise en charge du harcèlement. Au-delà, les coopérations territoriales avec les personnels de l’accompagnement médical, psychologique et social doivent être développées en renforçant les liens avec les établissements scolaires et les centres médico-psychologiques (CMP), les maisons des adolescents et les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
La mission pointe enfin un grave problème de gouvernance nationale. « Les acteurs de la santé scolaire relèvent de chaînes hiérarchiques administratives distinctes, lit-on. La collaboration paraît très variable d’un établissement à l’autre, car tributaire des relations interpersonnelles qu’entretiennent les professionnels de la santé scolaire. » La mise en place d’un pilotage par le recteur ou le directeur académique des services de l’Éducation nationale (Dasen), sans hiérarchie entre les quatre corps impliqués en matière de santé scolaire, « contribuerait à clarifier le rôle de chacun et favoriserait le travail d’équipe ». Cette coordination devra se traduire par un partage d’informations plus systématique entre infirmiers et médecins scolaires et des liens renforcés entre les psyEN du premier et du second degrés.
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