Une action surtout subjective

Le cannabis soulage la spasticité de la SEP

Publié le 09/12/2009
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EST-IL PLUS IMPORTANT que l’amélioration d’une symptomatologie soit uniquement subjective ou qu’elle soit confirmée par des mesures objectives ? L’étude publiée dans « BMC Neurology » portant sur l’intérêt du cannabis au cours de la sclérose en plaques, n’y répond pas vraiment. Elle constate, que les patients disent ressentir une amélioration de leur spasticité alors que les tests objectifs le confirment peu.

La méta-analyse menée par S. E. Lakhan et M. Rowland (Los Angeles) souhaitait apporter une conclusion quasi définitive sur le thème du soulagement de la SEP par des extraits de cannabis. Leur travail est parti de notions, relativement anciennes, attribuant à cette plante une certaine efficacité sur la spasticité au cours de l’affection. Plus récemment, des extraits globaux de delta9-tétrahydrocannabinol (THC) associés à du cannabidiol (CBD) ont semblé efficaces tout en créant moins d’intoxications et d’effet latéraux. Mais comme aucune étude n’avait de méthodologie suffisante pour juger de leur activité, l’équipe a réalisé une méta-analyse de 6 études (de 1999 à 2009) évaluant leur association sur la spasticité. Au cours de ces diverses études la spasticité des patients a été jugée avant et après traitement.

« Nous avons trouvé que l’association des extraits de THC et de CBD peut réduire la spasticité chez les patients atteints de SEP. Bien qu’une sensation subjective de diminution du symptôme ait été globalement relevée de façon significative, les mesures objectives de la spasticité n’ont pu mettre en évidence de changements significatifs » écrivent les auteurs. Ils ajoutent d’ailleurs, que la distinction entre la perception de soulagement d’un symptôme et des modifications physiologiques objectives chez l’humain devrait être une priorité pour de futures recherches. « Il existe des preuves que les cannabinoïdes peuvent avoir une activité neuroprotectrice et anti-inflammatoire dans la SEP. Leur potentiel thérapeutique est dès lors compréhensible et doit attirer fortement l’attention » concluent-ils.

Des échelles de mesure.

Au plan des mesures objectives qu’étaient l’IRM ou le périmètre de marche, elles n’ont pas confirmé les améliorations rapportées par les patients sur des échelles de mesure. Si, sur le long terme, l’échelle de spasticité d’Ashworth montre une amélioration significative, elle demeure faible et uniquement chez les patients sous THC. Les études manquent, déplore l’équipe, d’une mesure validée et objective de la spasticité.

En outre, la méta-analyse connaît quelques faiblesses. Elle ne contient pas les études non publiées, peut-être des travaux sont-ils en cours avec l’association THC + CBD ? Il se peut aussi que des études aient été écartées par manque de description de leur méthodologie. Enfin, il est possible que des participants aux études contre placebo aient découvert leur groupe, ce qui aurait influé sur leur jugement.

Reste les effets délétères. Ils sont dose-dépendants et le CBD atténue bien ceux dus au THC. Curieusement ils ont été souvent rapportés dans les groupes sous placebo. Et dans un essai sur le long terme, ils ne semblent pas attribuables au cannabis. Pour les auteurs, il est important de bien les prendre en compte. En comparant les effets secondaires au soulagement de la détresse et des handicaps, ils se demandent si le jeu en vaut la chandelle.

BMC Neurology, 4 décembre 2009.

Dr GUY BENZADON

Source : lequotidiendumedecin.fr