La France est un des pays où la consommation de cannabis est la plus répandue : 40 % des jeunes de 17 ans affirment l'avoir expérimenté au moins une fois. Dans ce contexte, les chercheurs de l’Inserm et de Sorbonne Université à l’Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique ont souhaité savoir quel était l'impact d'une consommation précoce de cannabis sur le parcours de vie. Selon les données publiées dans la revue « Drug and Alcohol Dependence », la consommation de cannabis avant l'âge de 16 ans est associée à un risque accru de chômage à l'âge adulte.
Les auteurs ont utilisé les données de la cohorte française Tempo, mise en place en 2009. Pour leur analyse, ils ont retenu 1 487 membres de la cohorte ayant participé à au moins une des quatre vagues de questionnaires entre 2009 et 2018.
En prenant en compte les autres facteurs traditionnellement associés à un statut socio-économique dégradé, ils ont constaté que les personnes qui ont expérimenté le cannabis à 16 ans ou avant étaient associées à un surrisque de 71 % de connaître une période de chômage à l'âge à adulte, si on les compare à celles qui l'ont expérimenté après 16 ans. Si elles sont comparées aux jeunes qui n'ont jamais fumé de cannabis, le risque de connaître une période de chômage était multiplié par 2,4. Les « expérimentateurs tardifs » avaient 39 % de risque en plus de connaître une période de chômage que les non-expérimentateurs. Le chômage de longue durée était par ailleurs 3,84 fois plus fréquent chez les expérimentateurs précoces.
Par ailleurs, en comparant les expérimentateurs précoces et tardifs de cannabis, les chercheurs ont constaté que la probabilité de connaître des épisodes de chômage répétés était 92 % plus élevée dans le groupe des consommateurs les plus jeunes par rapport aux consommateurs âgés de plus de 16 ans au moment de leur initiation à la drogue.
Un marqueur de risque d’épisodes de chômage répétés
Ce n'est pas le premier travail du genre mené en France. Des études plus anciennes avaient déjà établi un lien entre l’initiation précoce de la consommation de cannabis pendant l’adolescence et le niveau d’étude atteint plus tard. Cette nouvelle étude démontre qu'elle constitue également un marqueur de risque d’épisodes de chômage répétés.
« Ces résultats viennent s’ajouter à la littérature existante qui montre qu’en plus de la fréquence de la consommation de cannabis, l’âge de la première expérience du cannabis est associé à des conséquences néfastes non seulement sur la santé mais aussi sur la vie sociale et économique des individus, explique Maria Melchior, directrice de recherche Inserm et dernière auteure de l’étude. La consommation de cannabis avant l’âge de 16 ans peut donc être considérée comme un marqueur de risque de chômage. Reporter le plus tard possible les expérimentations de cannabis devrait être un objectif des politiques publiques. »
Pour les chercheurs, un nouveau chapitre s'ouvre. En s’appuyant sur les données recueillies via la cohorte Tempo, ils vont tenter d'identifier les facteurs prédictifs des trajectoires de consommation du cannabis dans le temps.
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