ÉDITORIAL

Touche pas à mon alcoolique !

Publié le 03/03/2014
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Marisol Touraine a tranché : la prise en charge de l’alcoolo-dépendance est l’affaire du généraliste. Celui-ci est à la fois capable de mettre en place le suivi médico-social du patient alcoolo dépendant et la prescription du médicament le mieux adapté à son patient. Quelle affaire me direz-vous, encore heureux… Sachez, chers lecteurs que cette décision n’a pas été facile à prendre tant ont été fortes les pressions opposées : discussions sans fins entre l’ANSM, la Commission de Transparence de la Haute Autorité de santé et surtout la Direction Générale de la Santé. Cette dernière s’est illustrée par une approche particulièrement peu audacieuse du sujet, préférant une prescription très restreinte du nalmefène, réservée aux addictologues ouvrant ainsi largement le parapluie du principe de précaution, plutôt que de la laisser aux généralistes, soi disant « pivots de notre système de santé ». Finalement, vont être mis sur le marché deux produits modifiant profondément l’approche thérapeutique de l’alcoolo-dépendance, le premier, déjà cité bénéficiant d’une AMM européenne et le second, le baclofène, actuellement prescrit par une dizaine de milliers de généralistes, dans l’attente d’une RTU et du résultat de deux essais cliniques en cours. Certes, ces deux molécules ne vont pas subitement régler la question majeure de l’alcoolisme en France mais si la ministre ne s’était pas rangée résolument aux côtés des généralistes, en répondant à Dominique Orliac la députée du Lot qui posait la question, on aurait pu douter de l’existence même d’une politique de santé publique en France et voir se répéter la même histoire que celle du vaccin H5N1…

Dr Gérard Kouchner

Source : Le Quotidien du Médecin: 9306