ESMO 2020

Des avancées majeures dans les cancers du sein et du rein

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Publié le 25/09/2020

Outre les présentations sur les cancers œsophagiens en session présidentielle, trois autres études ont marqué cette édition virtuelle 2020 de l’ESMO : deux essais positifs dans le sein et le rein explorant des associations thérapeutiques en première ligne, ainsi qu’une étude académique négative dans le poumon testant une radiothérapie adjuvante ciblée.

Crédit photo : phanie

Dans les cancers du sein précoces à récepteurs hormonaux positifs (HR+) et (HER2-) mais néanmoins à haut risque peut-on faire mieux que l'hormonothérapie? C'est la question posée par l'essai monarchE qui a testé l'adjonction d'abemaciclib - un anti CD4/CD6- à l'hormonothérapie. (1) Et bien la réponse est franchement oui… 

Cancer du sein HR+ à haut risque : avantage à l'association abemaciclib/hormonothérapie

En effet, la combinaison abemaciclib/hormonothérapie réduit le risque de récidive de 25 % à 2 ans. "C 'est une réelle avancée. On n'avait pas eu de progrès depuis plus de 20 ans dans cette famille de cancers du sein qui représente plus de 70 % des cas dont 20 % à haut risque ", commente le Pr Stephen Johnston ( Londres, RU) qui présentait ces résultats au congrès.

L'étude internationale multicentrique randomisée en ouvert, monarchE, porte sur 5 637 femmes porteuses d'un cancer HR+ HER2- à haut risque. Après traitement, elles ont été randomisées en deux bras abemaciclib/hormonothérapie versus hormonothérapie seule traditionnelle et traitées ainsi durant deux ans. À 2 ans, la survie sans récidive invasive (critère primaire) était de 92,2 % dans le bras abemaciclib, versus 88,7 % dans le groupe hormonothérapie seule (RR= 0,75, 0,60-0,93; P=0,0096), soit une réduction relative de 25 % du risque de récidive invasive. De la même manière, la survie sans récidive à distance est elle aussi améliorée (93,6 % vs 90,3 %). Le bénéfice est particulièrement marqué en termes de métastases hépatiques et osseuses. Le traitement a été correctement toléré, les effets secondaires majeurs étaient dominés par la diarrhée avec quand même 16 % d'arrêts à 2 ans.

« Ce traitement devrait vite devenir un standard », selon S Johnston. « Reste néanmoins à voir s'il peut permettre de s'affranchir de la chimiothérapie. Un essai randomisé en association à la chimiothérapie versus chimiothérapie serait bienvenu. Par ailleurs, on manque encore de recul en termes de toxicité et c'est important tant au regard du nombre de femmes relevant potentiellement de ce traitement que parce qu’à long terme les effets secondaires vont influencer l'adhérence/l'acceptation des femmes », commente le Pr Giuseppe Curigliano (IEO, Italie).

Carcinome rénal métastatique : un combo immunothérapie/cabozantinib fait mieux que le sunitinib

Les premiers résultats de l'étude de phase 3 Check-Mate-9ER sont très démonstratifs. Présentés en avant-première à l'ESMO simultanément à leur publication (2), ils mettent en évidence un bénéfice en terme de réponse, survie sans progression et même survie totale chez les sujets traités par une combinaison de nivolumab ( anti PDL1) et cabozantinib (ITK) par comparaison aux patients recevant le sunitinib. « Le risque de progression ou décès est réduit de presque 50 % et les décès de 40 %. Soit un progrès pronostique important retrouvé dans cet essai dans tous les sous-groupes quel que soit l'âge, le sexe, le statut PDL1, la présence de métastases osseuses ou le score de risque (IMDC) », résume le Pr Toni Choueri (Harvard Boston, USA), coordinateur de l'essai. Seul bémol la dose de nivolumab a dû être réduite en cours d'essai chez près de la moitié des sujets. Néanmoins, on a eu moins de 3 % d'arrêts de traitement contre 9 % d'arrêts dans le bras sutinib.

« Reste désormais à savoir quelle sera à l'avenir la seconde ligne de traitement après ce combo immunothérapie/ITK puisque les mécanismes d'action déterminent le choix d'une seconde ligne après une première. Peut-être un anti VEGF mais ce sera à explorer ».

L'étude a recruté 650 patients dont 23 % à risque favorable, 58 % à risque intermédiaire et 20 % à haut risque. Ils ont été randomisés et traités avec une durée médiane de suivi de 18 mois. Au terme de ce suivi dans le bras combo, la survie sans progression - critère primaire- est significativement meilleure 16,6 vs 8,3 mois (RR=0,51; 0,41-0,64; p<0,0001) de même que la survie globale (RR=0,60; 0,40-0,89; p=0,0010 médianes non atteintes) quasi doublée. Parallèlement, le taux (56 % vs 27 %) et les durées de réponse (20 vs 12 mois) sont bien meilleurs. Ceci sans excès de toxicité à déplorer. C'est pourquoi, l'association nivolumab/cabozantinib devrait rapidement être agréée en première ligne et devenir le standard de traitement.

Cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) résécable : la radiothérapie après traitement néoadjuvant et chirurgie n'apporte rien

C'était débattu depuis fort longtemps, l'étude PORT (post operative radiotherapy) vient clore la controverse (3). Non il n'y a pas d'avantage à faire après traitement néo-adjuvant et résection complète de la radiothérapie dans les CBNPC de stade II-III avec ganglion positif. On ne voit aucun bénéfice significatif à 3 ans sur la survie sans progression.

L'étude rassemble 500 patients. À 3 ans la survie sans récidive est de 47 % après radiothérapie vs 44 % sans (NS). Pour le Dr Cécile Le Pechoux (Gustave Roussy, Villejuif), « il n'y a donc plus lieu de faire cette radiothérapie. Elle pourrait néanmoins être bénéfique pour certains sujets, nous allons l'analyser. Mais c'est tout de même à mettre en balance avec la pulmo-cardiotoxicité induite ».

D'après la conférence de presse de ESMO 2020
(1) SRD Jonhston et al. Abstract LBA5_PR ‘Abemaciclib in high risk early breast cancer’ will be presented by Stephen Johnston in the Presidential Symposium II 20 Septembre 2020. Annals of Oncology, Volume 31 Supplement 4, September 2020..SRD Jonhston et al. Abemaciclib combined with endocrine therapy for the adjuvant treatment of HR+, HER2-, node-positive, high risk, early breast cancer (monarchE) J Clin Oncol 2020; DOI: 10.1200/JCO.20.02514, https://ascopubs.org/doi/full/10.1200/JCO.20.02514
(2) TK Choueiriduring et al. Abstract 6960_PR. Nivolumab + cabozantinibvs sunitinib in first-line treatment for advanced renal cell carcinoma: first results from the randomized phase 3 CheckMate 9ER trial‘ .the Presidential Symposium le 19 SeptembreCEST.Annals of Oncology,Volume 31 Supplement 4, September 2020
(3) C Le Pechoux Abstract LBA3_PR. An international randomized trial, comparing post-operative conformal radiotherapy (PORT) to no PORT, in patients with completely resected non-small cell lung cancer (NSCLC) and mediastinal N2 involvement. Primary end-point analysis of Lung ART (IFCT-0503, UK NCRI, SAKK) NCT00410683; Presidential Symposium II, 20 Septembre 2020. Annals of Oncology,Volume 31 Supplement 4, September 2020

Pascale Solere

Source : lequotidiendumedecin.fr