Tumeur, greffon, infection

La surveillance lymphoïde du stress varie selon les individus

Publié le 07/12/2011
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Crédit photo : S Toubon

DE NOTRE CORRESPONDANTE

LE SYSTÈME immunitaire a pour fonction de protéger l’intégrité de l’organisme, que ce soit en luttant contre l’infection ou en répondant à une perturbation tissulaire causée par des stress non microbiens comme des produits chimiques ou une transformation maligne. Il apparaît de plus en plus que ces réponses aux corps étrangers et au soi altéré ne sont pas complètement distinctes.

Ainsi, la reconnaissance par les cellules NK et les cellules T gamma delta, via leur récepteur NKG2D, de certains antigènes de stress comme la molécule MICA est impliquée aussi bien dans l’infection que dans la maladie inflammatoire et la maladie auto-immune et dans la surveillance tumorale. Et elle pourrait également être impliquée dans le rejet de greffe. D’où le grand intérêt pour mieux comprendre cette « surveillance lymphoïde du stress » car elle pourrait être exploitée à des fins thérapeutiques.

Une étude britannique justifie cet intérêt. « Nos résultats montrent qu’il existe dans le sang humain des lymphocytes (cellules NK et cellules T gamma delta) qui peuvent répondre très rapidement à des marqueurs moléculaires de dysrégulation cellulaire, appelés antigènes de stress, sans qu’il y ait une infection », explique au « Quotidien » le Dr Adrian Hayday (King’s College London, Royaume-Uni).

« Bien que nous ayons établi cela in vivo chez des animaux de laboratoire (Stri et coll., " Nat Immunol ", 2008), la généralité d’une telle réponse de " surveillance au stress " n’avait pas été établie chez les humains. Cela est important, car les marqueurs moléculaires de dysrégulation cellulaire, ou antigènes de stress, peuvent être exprimés par les cellules tumorales, ce qui ouvre la perspective que des cellules tumorales puissent être reconnues de cette façon par le système immunitaire et puissent être éradiquées. »

« En plus de découvrir que chaque individu produit ces réponses de " surveillance du stress ", ce travail a découvert avec surprise que les individus présentent des modes très différents de réactivité. En fait, certains individus ignorent complètement les cellules portant des taux élevés d’antigènes de stress, tout en reconnaissant facilement les cellules ayant de faibles taux d’antigènes de stress. Nous expliquons cela en proposant que les réponses des personnes sont réglées au fil du temps pour produire des réponses les plus appropriées à l’impact des facteurs environnementaux déclenchants sur leurs cellules. »

Évaluer la faculté de réponse d’un individu.

« Jusqu’à présent, la réponse de " surveillance du stress " était considérée comme une réponse générique, avec des réponses plus importantes à des taux élevés d’antigènes de stress. Ces résultats bouleversent cette orthodoxie. Ils pourraient expliquer pourquoi certains individus génèrent une surveillance tumorale très efficace et d’autres non, et ils fournissent des méthodes simples pour évaluer la faculté de répondre d’une personne, par exemple durant un traitement. Les rescousses lymphoïdes de "surveillance du stress" pourraient concerner d’autres composants importants des interactions environnementales, comme la réponse à l’infection virale, et si ces réponses étaient déclenchées de manière inappropriée, elles pourraient favoriser des pathologies inflammatoires. La capacité de mesurer le niveau de réactivité de " la surveillance du stress " d’un individu au cours du temps procure une façon d’évaluer si cette réponse sous-tend des variations individuelles dans d’autres aspects de la santé et de la maladie. Nos prochains objectifs sont de mieux comprendre quelles sont les cellules et molécules impliquées dans la " surveillance du stress " et quelles sont les implications. Nous voulons également commencer à surveiller quel impact ont les traitements comme la chimiothérapie sur ce composant des mécanismes immunoprotecteurs propre a chacun. »

Science Translational Medicine, Shafi et coll., 30 nov 2011

 Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 9054