Adénocarcinome pancréatique métastatique

L’intérêt d’un traitement intensifié de première ligne non confirmé

Publié le 18/03/2009
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L’adénocarcinome pancréatique, dont l’incidence en France est estimée à 4 500 nouveaux cas par an, a un taux de survie à 5 ans de l’ordre de 5 %. Seulement 20 % des patients ont une tumeur résécable chirurgicalement, faisant espérer un taux de survie à 5 ans de 10 à 20 %. La grande majorité ne relève donc pas d’une résection à visée curative. En effet, au moment du diagnostic, 30 % ont déjà une maladie localement avancée et 50 % une maladie métastatique : la médiane de survie de ces patients n’est que de 3-4 mois avec des soins de support et de 6 mois avec une chimiothérapie par la gemcitabine. C’est dans ce dernier groupe de patients les plus graves qu’a été réalisé un essai de phase III randomisé comparant deux stratégies de chimiothérapie : un traitement agressif par 5FU, acide folinique et cisplatine (LV5FU2-cisplatine) en première ligne suivi de gemcitabine en cas d’échec ou de toxicité versus la séquence inverse.

Une deuxième ligne intégrée dans la stratégie.

«  Lancée par la Fédération Francophone de Cancérologie Digestive (F.F.C.D.) et promue par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Marseille (AP-HM), cette étude fait suite à un essai de phase II dans lequel l’association LV5FU2-cisplatine avait donné des résultats intéressants en termes de réponse antitumorale et de médiane de survie (1), explique le Pr Seitz. Avec ce nouvel essai, c’est la première fois qu’une deuxième ligne est intégrée dans la stratégie thérapeutique du cancer pancréatique, l’idée étant qu’elle permettrait d’obtenir de meilleurs résultats ».

L’hypothèse initiale était d’obtenir une amélioration de la médiane de survie de 6,5 mois à 10 mois dans le bras investigationnel. Après analyse des résultats des 202 patients inclus, « nous avons constaté avec une certaine surprise qu’il n’y avait pas de différence significative de la survie globale – objectif principal de l’essai – entre les deux groupes, mais que la tendance était plutôt l’inverse de celle attendue », précise le Pr Seitz. La médiane de survie globale était, en effet, de 6,6 mois dans le bras traitement intensifié contre 8 mois dans le bras gemcitabine en première ligne. Ce résultat « honorable », avec un taux de survie à 1 an de 33 % (contre 18 % dans l’étude pivotale de la gemcitabine, et moins de 2 % avec le 5FU bolus ou les soins de support) conforte les autres publications qui ont montré l’intérêt de la deuxième ligne à base de 5FU-oxaliplatine.

Dans cette étude, plus de la moitié des patients ont reçu une deuxième ligne (68 % dans le bras intensifié, 55 % dans le bras standard), et le changement de protocole était plus souvent lié à la toxicité dans le bras intensifié. En ce qui concerne la survie sans progression après les deux lignes, les patients du groupe gemcitabine avaient aussi un léger avantage (non significatif) : 5,8 mois contre 5 mois. De plus, la toxicité hématologique de l’association LV5FU2-cisplatine en première comme en deuxième ligne était similaire alors que celle de la gemcitabine était plus importante lorsqu’elle était administrée en deuxième ligne : 59 % contre35 %.

Cette étude n’a donc pas confirmé les données du précédent essai de phase II. « La gemcitabine reste le standard en première ligne des adénocarcinomes pancréatiques métastatiques », commente le Pr Seitz. Depuis l’avènement de ce médicament, qui a transformé la prise en charge des patients atteints d’un cancer du pancréas non résécable, peu de progrès ont été réalisés dans ce domaine. De fait, l’espoir suscité par les essais d’associations, notamment avec les sels de platine, visant à augmenter les résultats de la gemcitabine n’a pas été confirmé à ce jour. Une utilisation graduée avec la gemcitabine en première ligne et les sels de platine en deuxième ligne semble plus intéressante et mérite d’être explorée.

* D’après un entretien avec le Pr Jean-François Seitz, CHU de la Timone, Marseille. Résultats de l’étude présentés par le Dr Laetitia Dahan en séance pleinière.

(1) Taïeb J et al. Gastroenterol Clin Biol 2 002 ; 26 : 605-9.

 Dr CATHERINE FABER

Source : lequotidiendumedecin.fr