L'activité physique a-t-elle toute sa place dans le parcours de soins ?

Malgré la loi de santé, le sport sur ordonnance en mal de reconnaissance

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Publié le 17/10/2016
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Crédit photo : PHANIE

En dévoilant les résultats d'une enquête nationale, baptisée Podium*, sur les conditions d’accès à l’activité physique en cancérologie, Jean-Marc Descotes, directeur général de la fédération nationale CAMI Sport&Cancer, n'a pas caché sa déception. Si la pratique régulière d'une activité physique adaptée tend à prouver son efficacité en complément des traitements conventionnels (pour réduire les effets secondaires, limiter les rechutes…), le remboursement de ces séances de sport n'est pas à l'ordre du jour. 

De fait, malgré les résultats encourageants soulignés dans de nombreuses études publiées depuis cinq ans (amélioration de la qualité de vie et de survie), les pouvoirs publics continuent de faire la sourde oreille. Selon Jean-Marc Descotes, le décret attendu courant novembre issu de la loi de santé portant sur la prescription d'activité physique aux patients en ALD va doucher les espoirs de prise en charge Sécu. Une mauvaise nouvelle pour le Dr Thierry Bouillet, président de cette même fédération, qui souligne « les bénéfices multiples d’activités physiques adaptées et bien encadrées, dont l’intensité et la fréquence doivent être aussi bien dosées qu’un traitement médicamenteux ».   

Prescrit par 40 % des jeunes oncologues dans les hôpitaux 

L'étude Podium, menée en collaboration avec Amgen, a été réalisée auprès de 1 554 patients (dont deux tiers de femmes souffrant d'un cancer du sein) et de 900 soignants. Le bénéfice a été constaté dans tous les cas de figure (cancer du sein, hématologique, digestif, poumon, ORL, urologique). Selon cette enquête, 90 % des patients sondés ont constaté une baisse de la fatigue et une amélioration de leur qualité de vie notamment grâce à l’amélioration de leurs capacités cardio-respiratoires. Dans cette cohorte, 83 % des patients affirment ressentir une amélioration de leurs chances de guérison et une meilleure tolérance au traitement.

Parmi les 450 prescripteurs ayant participé à l'étude, seuls 40 % des oncologues et 15 % des généralistes évoquent avec leurs malades l’activité physique encadrée et spécifique à la cancérologie. Les jeunes praticiens hospitaliers du secteur public semblent plus volontiers prescripteurs dans ce domaine. Parmi les freins, 60 % des médecins expliquent ne pas connaître suffisamment les indications et contre-indications de ces séances de sport, et la moitié d’entre eux manquent de temps en consultation pour évoquer ces thérapies non médicamenteuses.

Trois quarts des soignants seraient néanmoins favorables à une prise en charge par l’assurance-maladie ou les mutuelles. Mais le Dr Florian Scotté, oncologue à l’Hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP, Paris), pointe ici une autre difficulté. « Les rares salles de sport qui ont vu le jour dans les hôpitaux pour permettre aux patients de démarrer ces activités sont souvent les premières réquisitionnées par les équipes de direction qui cherchent à étendre des hôpitaux de jour pour développer les activités ambulatoires ». L'inscription pleine et entière du sport adapté dans le parcours de soins n'est sans doute pas pour tout de suite.   

*Première enquête nationale sur les recommandations et les déterminants psychosociologiques et physiques de la pratique de l’activité physique en oncologie et en hématologie 

 

 

 

Laurence Mauduit

Source : Le Quotidien du médecin: 9526