Thérapies ciblées en oncologie : le chantier de l'accès aux tests diagnostiques va enfin débuter

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Publié le 23/05/2023
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Crédit photo : S. Toubon

Le 9 juin prochain, la Haute Autorité de santé (HAS) rendra aux sociétés savantes et autres parties prenantes sa première expertise globale sur les tests génomiques. Il s'agit de la première étape d'un long processus visant à améliorer l'accessibilité aux tests biomarqueurs, essentiels pour assurer aux patients un véritable accès aux thérapies ciblées contre le cancer.

Il existe aujourd'hui 122 indications pour lesquelles une des 77 molécules de thérapie ciblée disponibles en France peut être prescrite. Mais pour savoir si le patient est éligible, il est nécessaire de procéder à un test biomarqueur, c'est-à-dire à la recherche d'anomalies moléculaires (amplification d’HER2, mutation de l'EGFR, translocation d’ALK…) pouvant être ciblées par un traitement de précision. Or, « on a un besoin de 500 000 tests par an pour couvrir la totalité de ces 122 indications, calcule le Pr Pascal Pujol, chef du service d’oncogénétique du CHU de Montpellier et président de la société française de médecine prédictive et personnalisée. En théorie, les thérapies ciblées sont entrées dans le soin courant, mais en pratique, nous n'avons pas les informations génomiques pour les prescrire », ajoute-t-il lors d'un atelier organisé par le laboratoire Amgen.

Actuellement, les examens génomiques sont partiellement pris en charge via un système assez complexe. Le remboursement CPAM (60 à 70 % du coût) est possible pour l'établissement d'un caryotype, une analyse par Fish (Fluorescent In Situ Hybridization), le dépistage du syndrome de l'X fragile ou encore un diagnostic prénatal (DPN). Les recherches de biomarqueurs nécessaires aux thérapies ciblées sont prises en charge via le référentiel des actes innovants hors nomenclature de biologie et d’anatomopathologie (RIHN) mis en place par la Direction générale de la santé (DGS) et la Direction générale de l'offre de soins (DGOS). Le plan France médecine génomique 2025 prend en charge certains examens dans le cadre de l'évaluation visant à les faire rembourser par l'Assurance-maladie.

« Le problème du RIHN, c'est qu'il s'agit d'une enveloppe fermée, explique le Pr Pujol, et que les examens sont remboursés à la moitié de leur cotation, et un an après ! C'est compliqué pour les petites structures hospitalières. »

Huit ans de retard

Normalement, les tests biomarqueurs devaient sortir des RIHN en 2015. Face au retard pris par les pouvoirs publics, « Axel Khan avait initié une action en février 2021, avec Unicancer, l'Inca et les sociétés savantes, se souvient le Pr Pujol. Il a écrit à Olivier Véran qui avait saisi la HAS. C'est à la suite de cette saisine que cette dernière a initié le travail en cours. »

Mais le travail a pris du retard : le calendrier de travail, ainsi que la hiérarchisation des tests biomarqueurs en oncologie par typologie après enquête de terrain devait initialement être communiqué en janvier 2022. La HAS a donc un an et demi de retard, et la suite de son travail « prendra au moins un an », prédit le Pr Pujol.

Par la suite, la HAS va évaluer chaque test ou famille de tests par ordre de priorité, puis présentera à l'Union nationale des caisses d'Assurance-maladie (Uncam) une proposition d'inscription de certains tests. « Il y a une certaine inertie », reconnaît le Pr Pujol.

Mais plusieurs acteurs espèrent beaucoup du comité ad hoc mis en place par la HAS : la commission d’évaluation des technologies de santé diagnostiques, pronostiques et prédictives (CEDiag), créé en avril dernier.


Source : lequotidiendumedecin.fr