Le Centre international de recherche sur le cancer fête ses 50 ans

Un combat sous le signe de la coopération

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Publié le 13/06/2016
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À l'origine, l'idée de la création d'un centre international de lutte contre le cancer vient d'un journaliste niçois, Yves Poggiolo, bouleversé par la perte de son épouse, emportée par un cancer.

Il demande le soutien de son ami Emmanuel d’Astier de La Vigerie, rédacteur en chef du journal « Libération », qui porte son idée devant le Conseil mondial de la paix, une organisation œuvrant en faveur du désarmement nucléaire. Finalement, c'est une lettre co-signée par douze personnalités et publiée dans le Monde en 1963, qui convaincra le général de Gaulle de la nécessité de la création du Centre international de recherche sur le cancer. « Cette lettre ouverte appelait les États-Unis, la France, l'Union soviétique et le Royaume-Uni à " consentir à un prélèvement dérisoire de 0,5 % de leurs budgets militaires" pour financer un organisme de recherche sur le cancer », raconte le Dr Christopher Wild, directeur du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC).

Le centre sera créé officiellement le 20 mai 1965 par une résolution de l'Assemblée mondiale de la santé (organe de décision de l'OMS). Cependant, au lieu des 349 millions d'euros attendus, correspondant aux 0,5 % de budget militaire des États participants, le budget du centre s'élève alors tout juste à 885 000 euros... Il dépasse 43 millions d'euros aujourd'hui. Depuis sa création, le centre est le bras de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en matière de lutte contre le cancer, mais il tire aussi parti de son écosystème lyonnais, avec des partenariats et des coopérations avec les CHU, l'Institut national du cancer (InCa), les pouvoirs publics et l'industrie, notamment avec Lyon biopôle et le Cancéropôle Lyon-Auvergne-Rhône-Alpes (CLARA).

Plus de 900 agents évalués

« Le cancer représente une cause de mortalité majeure à travers le monde, rappelle le Dr Christopher Wild. C'est le facteur numéro 1 pour la mortalité en Europe, en Amérique du Nord et en Australie et il arrive en deuxième place dans de nombreux pays d'Afrique et d'Amérique latine. Et la situation s'aggrave rapidement en raison de la croissance de l'espérance de vie et de l'augmentation de l'exposition aux facteurs de risque. » Dans ce contexte, le CIRC est un outil précieux pour la prévention du cancer. « Nous avons décidé de concentrer nos efforts autour de trois axes : décrire l'incidence du cancer, en comprendre les causes et évaluer les interventions de santé publique et leurs mises en œuvre », détaille le Dr Wild. Le CIRC a par exemple réalisé une étude prospective européenne sur le cancer et la nutrition (EPIC) qui a établi le lien entre l'obésité et la mortalité due au cancer. Il œuvre aussi à identifier les facteurs susceptibles d'accroître le risque de cancer et publie ensuite les monographies du CIRC. « Les organismes de santé publique utilisent ensuite ces informations dans leurs actions visant à prévenir l'exposition à ces cancérogènes potentiels. Depuis 1971, plus de 900 agents ont été évalués », poursuit le Dr Wild. Le CIRC mène également des interventions directes contre des facteurs de risque connus, par exemple en encourageant la vaccination contre le virus du papillome humain. « Nous avons également un rôle important de formation. Nous recevons de jeunes chercheurs venus du monde entier. Actuellement, une centaine sur 330 personnes est au centre pour une courte durée. Et nous avons reçu plus de 600 personnes depuis 1966, à des fins de formation ».

Anne-Gaëlle Moulun

Source : Le Quotidien du médecin: 9504