Dr Franck Halimi : « Il est essentiel de détecter précocement la FA, en particulier en cas de profil à risque »

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Publié le 17/10/2019

Prévalence élevée, risque accru de décès et d’événements emboliques, notamment d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) ischémique : la fibrillation atriale doit être mieux dépistée. Les techniques ablatives occupent une place croissante, les anticoagulants oraux directs sont indiqués en première intention, et il est important de respecter les posologies retenues dans les résumés des caractéristiques du produit (RCP).

Crédit photo : Phanie

Arythmie la plus fréquente, la fibrillation atriale (FA) touche, en Europe et aux États-Unis, un adulte sur quatre au cours de la vie. Les projections estiment qu’en 2030, de 14 à 17 millions de personnes en Europe présenteront une FA.

Sa forte prévalence et les complications qui lui sont associées font de ce trouble du rythme un problème majeur de santé publique. La FA est en effet un facteur de risque indépendant de décès (risque multiplié par 2 chez la femme, et par 1,5 chez l’homme) et elle serait directement en cause dans 20 à 30 % des accidents vasculaires cérébraux, sans compter son impact délétère sur le déclin cognitif d’origine vasculaire et la qualité de vie. Elle engendre ainsi un coût de santé considérable. « Autant de facteurs qui soulignent l’importance de sa détection précoce, à la fois après un premier événement, mais aussi plus en amont dans la population naïve », insiste le Dr Franck Halimi, avant de rappeler que la FA survient plus volontiers chez des patients avec un profil particulier : cardiopathie, hypertension artérielle, syndrome d’apnées obstructives du sommeil, obésité, diabète… « Il est de ce fait essentiel d’agir très tôt et de traiter les facteurs favorisants et aggravants ».

En présence d’une FA non valvulaire paroxystique (FANV), deux questions se posent. La première porte sur le traitement de l’arythmie, la deuxième sur l’indication ou non d’une anticoagulation.

Le traitement de l’arythmie se fonde sur le recours aux anti-arythmiques, qui ne sont pas dénués d’effets secondaires, et désormais de plus en plus souvent sur les techniques ablatives, qui sont aujourd’hui préconisées dans la FA symptomatique paroxystique, récidivante et rebelle au traitement (recommandation de classe I), voire en première intention dans certaines situations (recommandation de classe II). Elle est aussi indiquée dans la FA persistante évoluant depuis moins d’un an, voire plus dans certains cas. Elle occupe une place particulière chez les patients insuffisants cardiaques, chez lesquels la restauration d’un rythme sinusal améliore le pronostic.

« The sooner, the better »

« L’ablation, lorsqu’elle est indiquée, doit être réalisée le plus tôt possible, car elle s’accompagne d’un meilleur taux de succès au prix de moins de complications procédurales, note le Dr Halimi. C’est aujourd’hui un geste sûr lorsqu’il est pratiqué par un rythmologue entraîné, dans un centre expert ».

L’indication de l’anticoagulation pour la prévention des accidents thrombo-emboliques, AVC au premier plan, est portée après stratification du risque avec le score CHA2DS2-VASC. « La réalisation d’une ablation ne modifie pas le score de risque », précise le Dr Halimi. Dans la FANV, les anticoagulants oraux directs (AOD) sont aujourd’hui indiqués en première intention selon les recommandations de la Haute Autorité de santé, et ce quel que soit le profil du patient, y compris le sujet âgé, avec peu de restrictions (doses adaptées selon le selon le poids et la fonction rénale) même chez les patients chuteurs. « Les trois grandes études cliniques ayant évalué l’apixaban, le rivaroxaban et le dabigatran ont globalement montré la non-infériorité de ces AOD, voire leur supériorité sur les antivitamines K (AVK) pour la prévention des événements thrombo-emboliques, notamment des AVC, et une diminution des hémorragies graves, en particulier intracrâniennes », précise le Dr Halimi.

Des résultats qui sont confirmés dans la vraie vie, comme en témoignent les données issues de l’Assurance-maladie colligées dans l’étude NAXOS, qui a inclus plus de 410 000 patients traités par AOD ou AVK entre janvier 2014 et décembre 2016. Selon cette étude présentée lors du dernier congrès de la Société européenne de cardiologie, les AOD ont une efficacité et une sécurité d’utilisation supérieure à celles des AVK, avec notamment moins d’hémorragies sévères même chez les sujets âgés, indique le Dr Halimi. « Toutefois, il semble y avoir un certain mésusage concernant le choix des doses, parfois trop faibles. Il est donc important de respecter les RCP et de prescrire les AOD à la bonne dose ».

D’après un entretien avec le Dr Franck Halimi, hôpital privé Parly 2, Le Chesnais et cabinet médical de la Néva, Paris.

Dr Isabelle Hoppenot

Source : lequotidiendumedecin.fr