L’angioplastie du tronc commun

Apres SYNTAX et avant EXCEL

Publié le 08/12/2011
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PAR LE Dr JACQUES BERLAND*

MALGRÉ DE TRÈS nombreuses études, registres ou cohortes, dont certains multicentriques françaises (FRIEND, LEMAX), l’angioplastie du tronc commun est encore officiellement discutée. Dans les recommandations américaines, elle se limite aux patients en angor instable avec une sténose significative, et qui ne sont pas susceptibles de bénéficier du pontage (classe IIa B) ou lorsque la dilatation peut être considérée comme une alternative à la chirurgie chez les patients avec des conditions anatomiques qui sont associées avec un faible risque de la procédure d’angioplastie et au contraire un risque élevé d’une procédure chirurgicale (classe IIb-B). Les dernières recommandations européennes sont un tout petit peu plus libérales en faisant la différence entre les lésions distales et les lésions proximales du tronc commun. Les lésions proximales ou médianes du tronc commun sont considérées en IIa-B quant aux lésions distales, il faut qu’il y ait seulement deux vaisseaux atteints avec un score SYNTAX ‹ 32 pour justifier une dilatation du tronc commun. Cette classification des risques et des indications de l’angioplastie découlent donc de l’étude SYNTAX avec trois ans de suivi.

Cette étude a comparé, depuis 2007, la chirurgie cardiaque et l’angioplastie chez les patients multitronculaires ou présentant une lésion du tronc commun chez lesquels on pouvait utiliser soit l’angioplastie avec des stents actifs au paclitaxel, soit la chirurgie de pontage. Il ne s’agissait donc pas d’une étude spécifique des lésions du tronc commun, ce qui en limite un peu la portée. Sur les 1 800 patients de l’étude SYNTAX, 705 sujets porteurs d’une lésion du tronc commun ont été randomisés et les résultats ont été présentés en fonction de la gravité du score SYNTAX qui évalue la dissémination et la complexité des lésions coronaires. Les derniers résultats après 4 ans de suivi viennent d’être rapportés au congrès TCT à San Francisco. Ils confirment que pour un score SYNTAX élevé (› 32), la chirurgie fait nettement mieux que l’angioplastie en termes de mortalité, de revascularisation et d’événements ischémiques. En revanche, pour les scores SYNTAX intermédiaires, c’est-à-dire entre 22 et 32 et bas entre 0 et 22, l’angioplastie associée au stent Taxus fait, à 4 ans, aussi bien que la chirurgie. En fait, le problème majeur de l’angioplastie du tronc commun est la sélection des patients car on sait que techniquement cette angioplastie est tout à fait réalisable dans les centres entraînés. Il est donc très important de mieux évaluer le risque chirurgical et de le comparer au risque de l’angioplastie. C’est la raison pour laquelle un score de risque global (figure) regroupant le risque chirurgical évalué par l’EuroSCORE et le risque de l’angioplastie en fonction du score SYNTAX a été développé. L’évaluation pour ce nouveau score de risque appliquée à l’étude SYNTAX montre qu’environ 40 % des patients ayant une lésion du tronc commun peuvent être dilatés avec un résultat comparable à celui de la chirurgie cardiaque à 3 ans, et que 60 % des patients devraient bénéficier de la chirurgie de pontage. Ces résultats sont malheureusement partiels et incomplets puisque l’étude SYNTAX n’était pas une étude totalement dévolue à l’angioplastie du tronc commun. Par conséquent, le système de santé américain (par l’entremise de la FDA) n’a pas considéré que ces résultats étaient suffisants pour pouvoir étendre les indications à des patients n’ayant pas de risque chirurgical particulier.

Une étude plus spécifique avec un stent de troisième génération.

C’est la raison pour laquelle a été lancée depuis quelques mois une nouvelle étude EXCEL qui dans l’indication spécifique du tronc commun va comparer directement la chirurgie à l’angioplastie mais avec un stent actif de nouvelle génération le Xience. Chez les patients avec des lésions moins complexes, le Xience a montré une supériorité par rapport aux stents actifs de première génération, que ce soit le Cypher et surtout le Taxus, en termes d’infarctus du myocarde, de thrombose de stent et de mortalité. On peut donc espérer moins d’événements ischémiques avec ce stent que dans le groupe Taxus de l’étude SYNTAX. De ce fait, l’étude EXCEL envisage non seulement l’équivalence entre chirurgie et angioplastie pour des troncs communs dont le score SYNTAX est ‹ 32, mais également une possibilité de supériorité sur le critère primaire d’efficacité de l’étude qui regroupera les infarctus, les décès et accidents vasculaires cérébraux. Quatre mille cent trente malades prévus devront être évalués par une équipe médico-chirurgicale (« Heart Team ») : 2 630 seront randomisés entre chirurgie et angioplastie avec le stent Xience et 1 500 patients seront colligés dans un registre car un des objectifs même de cette étude est de confirmer la place prédominante de l’équipe médico-chirurgicale dans le processus de décision de revascularisation soit vers l’étude randomisée, soit vers le registre. Le registre pourra comporter une cohorte de patients chirurgicaux dont les lésions seront considérées trop complexes pour l’angioplastie et un registre angioplastie pour les patients aux risques chirurgicaux trop élevés. Plus encore que l’étude SYNTAX, l’étude EXCEL apportera les renseignements indispensables permettant de positionner les deux méthodes de revascularisation pour le traitement des lésions du tronc commun.

* Clinique Saint-Hilaire, Rouen.


Source : Bilan spécialistes