Thérapie fœtale

Les réserves de l’Académie de Médecine

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Publié le 19/12/2016
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

La spécialité s'est en effet développée ces cinquante dernières années avec l'essor du diagnostic prénatal, assorti de la mise au point de traitements médicaux et chirurgicaux innovants.

Pour autant, un mauvais pronostic n'autorise pas à proposer n'importe quoi… même si l'alternative à cette thérapie fœtale est l'interruption médicale de grossesse. Ainsi, pour l'Académie, sont concernées par la thérapeutique fœtale les anomalies présentant « un risque d'aggravation irréversible pendant la vie intra-utérine, ou de séquelles graves et irrémédiables à la naissance ». Celles-ci uniquement. Elle rappelle que « l'innovation technique exige une approche professionnelle et éthique spécifique ». Il s'agit donc de ne pas confondre intérêt thérapeutique et intérêt scientifique. L'accompagnement et le soutien psychologique doivent être assurés dans tous les cas, qu'il y ait intervention thérapeutique ou pas.

Droit à l'interruption médicale de grossesse

L'Académie évoque par ailleurs le droit à l'interruption médicale de grossesse ; elle plaide également pour le développement des soins palliatifs néonatals. Certaines pratiques sont d'ores et déjà validées : la prévention du syndrome de détresse respiratoire aiguë du prématuré (administration de bêtaméthasone en cas de menace d'accouchement prématuré), le traitement de l'anémie fœtale par transfusion in utero, ou le traitement chirurgical du syndrome transfuseur-transfusé. D'autres sont en cours d'évaluation comme la prévention de l'hypoplasie pulmonaire dans la hernie diaphragmatique congénitale (doublement des taux de survie des formes les plus sévères), la dilatation de la valve aortique dans les sténoses aortiques critiques, ou encore le traitement de l'infection fœtale symptomatique à cytomégalovirus (valaciclovir). Enfin, certaines ont été consacrées par l'usage en dépit du faible niveau de preuves : dysthyroïdies fœtales dans la maladie de Basedow maternelle, traitement de l'infection fœtale par le toxoplasme, troubles de la conduction auriculo-ventriculaire fœtale chez les femmes enceintes porteuses d'anticorps anti-SSA ou SSB ou encore prévention de la virilisation dans l'hyperplasie congénitale des surrénales.

L'Académie est très réservée en revanche sur l'intérêt d'une cure de myéloméningocèle (du spina-bifida), réalisée aujourd'hui à utérus ouvert (pour la première fois à Trousseau en 2014), dont les risques pour la grossesse en cours et les suivantes éventuelles ne sont pas justifiés, d'autant que les parents acceptent encore mal le principe d'une intervention… La solution viendra peut-être de la chirurgie endoscopique. Les thérapeutiques fœtales doivent s'envisager dans des centres référents hyperspécialisés, garants d'une approche multidisciplinaire. Des centres référents en chirurgie fœtale pourraient être adossés aux centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal (CPDPN) où les nouvelles techniques seraient soumises à validation.

Dr Brigitte Blond

Source : Le Quotidien du médecin: 9544