Sténose carotidienne avant 75 ans

Mieux vaut ne pas tarder pour envisager l’endartériectomie

Publié le 27/09/2010
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POUR POSITIFS qu’ils soient les résultats d’une étude publiée dans le «Lancet» à propos de l’endartériectomie pour sténose carotidienne, doivent être tempérés en fonction des progrès de la médecine actuelle et de l’espérance de vie. En effet, le très vaste travail international ACST-1 (Asymptomatic Carotid Surgery Trial) a été mené sur 10 ans. Il montre, à ce terme, que la chirurgie réduit le risque de survenue d’un AVC chez les sujets de moins de 75 ans asymptomatiques. Mais avant de modérer la portée de l’étude, il apparaît nécessaire d’en préciser les détails.

Entre 1993 et 2003, dans 126 centres (dont celui de Nîmes) répartis dans 30 pays, 3 120 patients asymptomatiques ont été enrôlés. Tous étaient porteurs d’une sténose carotidienne uni- ou bilatérale, en général supérieure à 60 % et n’ayant pas occasionné de pathologie marquante (AVC, AIT, trouble neurologique). Après tirage au sort, ils bénéficiaient soit d’une endartériectomie immédiate (dans le mois en moyenne) soit d’une chirurgie différée (endartériectomie ou autre). Le traitement médical était laissé au gré des médecins traitants. Le suivi a été réalisé soit jusqu’au décès soit jusqu’à une médiane de 9 ans. Les investigateurs, Alison Halliday (Oxford) et coll., ont focalisé leur attention sur la morbi-mortalité postopératoire (décès ou AVC dans les 30 jours) ainsi que sur la survenue d’un AVC ultérieurement.

Le risque péri-opératoire.

Chaque groupe était constitué de 1 560 patients. Le risque péri-opératoire (c’est-à-dire dans le premier mois) de décès ou d’AVC a été évalué à 3 %. Il a été enregistré 26 AVC non-invalidants et 34 accidents fatals ou avec séquelles au cours de 1979 endartériectomies. En excluant les complications du premier mois, le risque d’AVC à 5 ans a été évalué à 4,1 % pour l’intervention immédiate et à 10 % pour l’intervention différée (gain : 5,9 %). À 10 ans, ces taux passent respectivement à 10,8 et 16,9 % (gain 6,1 %). En combinant les données du premier mois et ultérieures, les risques à 5 ans s’établissent respectivement à 6,9 et 10,9 % (gain 4,1 %), à 10 ans ils passent à 13,4 et 17,9 % (gain 4,6 %). Les auteurs remarquent que les risques chirurgicaux étaient peut-être moindres chez les patients sous hypolipémiants. Mais cette impression, disent-ils, mérite d’être confirmée par des études de plus grande ampleur que la leur. Ils ajoutent que le bénéfice est similaire pour les hommes et les femmes âgés au maximum de 75 ans à l’enrôlement, mais pas au-delà.

Antihypertenseur et statine.

Ces résultats doivent être tempérés selon les traitements proposés actuellement chez ces patients. Ils sont en général sous traitements antihypertenseur, antithrombotique et hypolipémiant. Dès lors, proposent les auteurs, « s’il existe un risque de décès d’une autre cause dépassant 50 % dans les 10 ans (comme c’était le cas pour ceux de plus de 75 ans à l’enrôlement) le bénéfice absolu à 10 ans serait réduit de plus de moitié, tout en laissant le risque chirurgical inchangé. Bien qu’un bon traitement antihypertenseur et les statines actuelles puissent réduire le taux d’accidents occlusifs de plus d’un tiers, les patients porteurs d’une sténose carotidienne serrée ne peuvent voir leur risque complètement aboli par le traitement médical seul. Dès lors un succès chirurgical pourrait compléter utilement un traitement médical efficace tout particulièrement chez ceux qui pourraient avoir une espérance de vie dépassant raisonnablement 10 ans. »

Ils concluent que « le bénéfice net pour les futurs patients dépendra de leur risque attaché à des lésions carotidiennes non opérées (qui pourra être réduit par le traitement), des futurs risques chirurgicaux (qui pourront différer de ceux de l’essai) et d’une espérance de vie dépassant 10 ans ».

Lancet, vol 376, pp. 1074-1084.

Dr GUY BENZADON

Source : Le Quotidien du Médecin: 8823