Fermeture percutanée de l’auricule gauche

Une alternative à l’anticoagulation

Publié le 08/12/2011
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Crédit photo : Saint Jude Medical

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LA FERMETURE percutanée de l’auricule gauche est une technique qui s’inscrit dans le cadre du traitement préventif des accidents vasculaires cérébraux (AVC) emboliques, chez les patients en fibrillation atriale (FA) chronique, pour lesquels le risque est multiplié par un facteur 5. Ces patients bénéficient actuellement des techniques ablatives et des traitements anticoagulants, antivitamines K (AVK) et depuis peu des nouvelles molécules, qui selon le dosage sont, soit plus efficaces mais associées à risque hémorragique accru, soit moins efficaces mais exposant à un moindre risque hémorragique.

Le concept de fermeture de l’auricule gauche se fonde sur le fait que chez les patients en fibrillation atriale, la très grande majorité (90 %) des thrombus se forment au niveau de l’auricule, structure anatomique complexe mais ne jouant aucun rôle dans la fonction de l’oreillette gauche. D’ailleurs, la fermeture chirurgicale de l’auricule gauche est souvent associée au geste de réparation de la valve mitrale.

La prothèse est montée dans l’oreillette droite par voie veineuse fémorale et passée dans l’oreillette gauche par ponction transseptale. Elle se réendothélialise en deux mois environ, l’occlusion de l’auricule gauche empêchant alors la formation de caillots.

« Il s’agit d’une technique nouvelle, qui fait aujourd’hui appel à deux dispositifs ayant un marquage CE. La procédure a été validée par différentes études, notamment l’essai PROTECT-AF, international, contrôlé, mené en ouvert contre warfarine. Plus de 700 patients ont été randomisés selon un schéma consistant en deux fermetures percutanées de l’auricule gauche pour un traitement anticoagulant. Il s’agissait de patients présentant une FA non valvulaire, persistante ou permanente, avec un score CHADS2 ≥ 1 », ce qui n’est pas très élevé note le Pr Emmanuel Teiger. Dans cette étude, les patients du groupe fermeture ont reçu un traitement anticoagulant pendant 45 jours, afin de faciliter l’endothélialisation de la prothèse.

Le critère principal d’évaluation associait le taux d’AVC, les décès cardio-vasculaires et les accidents emboliques systémiques. Le critère secondaire était un critère de sécurité, associant les événements liés à un saignement quel que soit son type et les événements liés à la procédure (retrait du dispositif, épanchement péricardique).

« Au terme d’un suivi moyen de 18 mois, l’étude PROTECT-AF a montré, dans une population qui n’était pourtant pas à très haut risque embolique, que la procédure de fermeture percutanée de l’auricule gauche fait aussi bien que les AVK pour prévenir les accidents thrombo-emboliques, avec moins de complications hémorragiques mais au prix de quelques complications initiales périprocédurales. Il s’agissait le plus souvent d’épanchements péricardiques (le taux d’effraction péricardique est de 5 %) ayant parfois nécessité un drainage. Cette complication semble toutefois très liée à la courbe d’apprentissage. À l’inverse, chez les patients traités par AVK, le taux de complications hémorragiques augmente, de façon logique, avec le temps », souligne le Pr Teiger, en précisant qu’il n’existe pas à l’heure actuelle de données claires comparant la procédure de fermeture aux nouveaux anticoagulants.

Pour l’instant, en France, l’intervention n’est pas remboursée, pas plus que les dispositifs. Des demandes sont en cours.

Evaluer précisément les risques embolique et hémorragique.

« En termes d’indications potentielles, le choix proposé par la Société française de cardiologie ne cible pas tout à fait la population évaluée dans l’étude PROTECT-AF, mais plutôt les patients pour lesquels il n’y a pas d’option thérapeutique, notamment ceux ayant récidivé sous anticoagulant et ceux ayant une contre-indication aux anticoagulants ou un haut risque hémorragique. Ce qui sous-tend une évaluation précise du risque hémorragique et embolique, et donc une décision au cas par cas en fonction du rapport bénéfice/risque. L’indication devra ainsi être posée par une équipe pluridisciplinaire, associant rythmologue, gériatre, neurologue, le cardiologue interventionnel jouant dans ce contexte surtout un rôle technique. Les indications pourraient initialement concerner essentiellement des patients âgés exposés à des complications hémorragiques sévères, avant de s’élargir si le bénéfice de la procédure est confirmé ».

Au Royaume-Uni, le National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE) a retenu dans sa recommandation une indication chez le patient à haut risque.

« En France, quelles que soient les indications qui seront retenues, il faudra mettre en place un registre exhaustif de toutes les implantations. Dans un premier temps, il semblerait licite de n’autoriser que quelques centres ayant une bonne expérience de la ponction transseptale à pratiquer ce geste qui, pour le National (Health Service NHS), doit être réalisé dans une structure dotée d’un service de chirurgie cardiaque sur le site afin de gérer une éventuelle complication. Mais cette technique, encore peu diffusée car récente et non remboursée, devrait à terme se développer. Un processus de formation selon un protocole rigoureux a été mis en place avec l’aide des industriels », conclut le Pr Emmanuel Teiger.

D’après un entretien avec le Pr Emmanuel Teiger, hôpital Henri-Mondor, Créteil.

Dr ISABELLE HOPPENOT

Source : Bilan spécialistes