Plusieurs systèmes sur les rangs

La course au pancréas artificiel s'accélère

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Publié le 24/12/2019
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Toutes les études des différentes boucles dites fermées vont dans le même sens : le pancréas artificiel améliore la prise en charge du diabète de type 1. Alors que plusieurs systèmes sont sur les rangs, la course s'est accélérée cette année.

Il faut continuer à renseigner les repas et l'activité physique

Il faut continuer à renseigner les repas et l'activité physique
Crédit photo : DR

Alors que la boucle fermée est désormais présentée comme le futur traitement standard du diabète de type 1 (DT1), la tension est montée d'un cran chez les développeurs de systèmes.

Cette année, Diabeloop a passé la vitesse supérieure. Après l'obtention du marquage CE en novembre 2018, la société française a déposé, la première, au printemps une demande de remboursement chez l'adulte auprès de la Haute Autorité de santé (HAS).

L'enjeu du pancréas artificiel est de taille dans le DT1 : par rapport à une pompe seule, ce système composé d'un capteur de glycémie en continu et d'une pompe à insuline présente l'avantage de fonctionner de façon automatique grâce à un troisième composant, un algorithme calculant la dose d'insuline, embarqué dans la pompe (système à 2 composantes) ou dans un terminal (système à 3 composantes). Pour l'instant, toutes les boucles fermées sont hybrides car elle délivre de l'insuline basale mais pas de bolus automatisés ; il est nécessaire de renseigner les repas et l'activité physique.

« Le pancréas artificiel fait toujours mieux que la pompe seule ou associée au capteur de glycémie, a déclaré au « Quotidien » le Pr Éric Renard, diabétologue au CHU de Montpellier. Les résultats des différents systèmes existants sont similaires. La boucle fermée se traduit par des bénéfices sur l'ensemble des critères : amélioration du temps dans la cible glycémique, amélioration de l'équilibre glycémique nocturne, diminution des hypoglycémies et des hyperglycémies, amélioration de la valeur moyenne de la glycémie et diminution de l'HbA1c ».

Medtronic et Diabeloop en tête

Certaines boucles fermées sont néanmoins plus avancées que d'autres, en particulier pour la commercialisation : Medtronic avec le Minimed 670G, ce système à intelligence artificielle (IA embarquée) commercialisé aux États-Unis depuis 2016, et Diabeloop avec l'algorithme DBLG1, sont en tête, les deux ayant obtenu le marquage CE l'année dernière.

Ces deux systèmes sont talonnés par l'université de Virginie et son Tandem Control IQ. Dans la course également, se défend le système Omnipod Horizon d'Insulet. Quant à l'équipe pionnière du Pr Roman Hovorka à l'université de Cambridge, elle s'est distinguée dans la recherche sans afficher de velléité commerciale jusque-là.

Diabeloop fait valoir, outre l'absence de calibration obligatoire pour le capteur (Dexcom G6), qu'il dispose d'une longueur d'avance avec l'essai SP7 (1). « C'est l'une des deux seules études randomisées contrôlées de la boucle fermée menée sur une période de 12 semaines », comme l'a rappelé le Pr Pierre-Yves Benhamou au « Quotidien » en avril, l'autre ayant été publiée en 2018 par l'université de Cambridge (2).

C'était sans compter l'arrivée début novembre dans « The New England Journal of Medicine » (3) des résultats de la 3e étude randomisée d'une boucle fermée versus pompe à insuline, avec le système Tandem IQ : l'essai iDCL, soutenu par les instituts nationaux de la santé américains (NIH). Ce système développé par l'université de Virginie est la 3e génération de DiAs, un système à deux composantes avec une pompe à insuline dotée de la technologie Control IQ et le capteur de glycémie en continu, Dexcom G6.

La qualité de vie, un critère essentiel

Le système Diabeloop sera-t-il le premier à arriver sur le marché français ? C'est l'espoir de la société grenobloise qui vise un déploiement à l'international, tant en Europe qu'aux États-Unis. Le 2 décembre, Diabeloop a annoncé avoir finalisé « la plus importante levée de fonds en Europe en intelligence artificielle (IA) thérapeutique », à hauteur de 31 millions d'euros.

Medtronic tient la distance et prévoit de déposer « au plus tard au 1er trimestre 2020 » une demande de remboursement auprès de la HAS. L'entreprise fait valoir l'expérience acquise auprès des 230 000 patients équipés dans le monde (dont 30 000 en Europe) et rappelle mener actuellement une étude randomisée internationale chez 1 500 patients (adultes et enfants). Si le système nécessite encore trois à quatre calibrations par jour, la société annonce lancer en janvier une étude sur la qualité de vie chez 300 patients dans une trentaine de centres français.

À terme, sur quels critères se fera le choix d'un système par rapport à un autre ? Pour le Pr Renard, la différence se jouera sur l'efficacité, notamment sur le gain dans la cible d'HbA1c et le pourcentage du temps en boucle fermée, mais aussi sur les préférences des médecins et des patients. Comme il l'a souligné, « la qualité de vie sera un critère essentiel pour départager les systèmes », citant en exemple la nécessité ou pas de calibrer le capteur, le confort (pompe patch pod du système Horizon) et plus largement la miniaturisation du dispositif.

(1) P-Y Benhamou, et al. Lancet Digital Health 2019; 1: e17–25
(2) M Tauschmann et al. The Lancet, n°392,1321-1329, 2018
(3) S Brown et, N Engl J Med, 381, 1707, 2019

Dr Irène Drogou

Source : Le Quotidien du médecin