Des algorithmes redéfinis

Le diagnostic du syndrome de Cushing évolue

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Publié le 22/03/2022
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Dosages, imageries, recherches génétiques : la Société française d’endocrinologie a mis à jour ses recommandations sur la démarche diagnostique dans le syndrome de Cushing (1), tenant compte des dernières évolutions.

Crédit photo : phanie

 

Le consensus de la Société française d’endocrinologie (SFE) sur le diagnostic du syndrome de Cushing a été présenté lors de son congrès annuel et devrait être publié prochainement dans les annales d’endocrinologie (1). Il vient remplacer les consensus internationaux qui ont maintenant une douzaine d’années. C’est l’occasion de discuter des évolutions sur le diagnostic, le traitement et des nouvelles causes génétiques identifiées. Comme pour toute maladie rare, les patients doivent être adressés dans un centre de référence surrénale, doté de centres de compétences et d’une filière dédiée (Firendo).

En cas de suspicion d’un syndrome de Cushing, trois explorations hormonales sont préconisées en première intention : le dosage du cortisol salivaire à minuit, la cortisolurie des 24 heures et le test de freinage par 1 mg de dexaméthasone. « Il n’y a pas de préconisation particulière pour faire l’une de ces trois analyses plus que les autres », note le Pr Jérôme Bertherat (centre de référence maladies rares de la surrénale, hôpital Cochin, Ap-Hp).

La qualité des dosages hormonaux a bien progressé, avec des dosages plus spécifiques du cortisol sanguin et urinaire : encore faut-il un certain niveau d’exigence, parfois encore variable d’un laboratoire à l’autre. « Quand les normes de la cortisolurie des 24 heures sont très hautes (> 250 nmol/24h), c’est que le dosage n’est pas spécifique, d’où méfiance », donne pour repère le Pr Bertherat.

Concernant le diagnostic étiologique, les évolutions concernent surtout le syndrome de Cushing ACTH-dépendant (le plus fréquent, en rapport avec une cause hypophysaire). « Des progrès ont été réalisés dans les algorithmes d’explorations biologiques et d’imagerie, de sorte que, lorsque celles-ci concordent, le cathétérisme des sinus pétreux — un examen invasif — n’est plus forcément systématique en cas d’IRM hypophysaire négative », précise le spécialiste. La place des différentes imageries a également été redéfinie : « pour la pathologie hypophysaire, l’IRM est l’examen de choix alors, que pour les surrénales ou la recherche d’une tumeur ectopique, c’est le scanner. Enfin, les PET-scan au FDG servent surtout à caractériser des tumeurs de la surrénale. La hiérarchie des scintigraphies pour caractériser les tumeurs ectopiques, est la réalisation de scintigraphie TEP avec le 68Ga-Dotatoc comme traceur radioactif puis, si négatif, un TEP à la 18F-DOPA et/ou au 18F-FDG », précise le Pr Bertherat.

Des causes génétiques identifiées

Beaucoup de progrès ont été réalisés du côté des causes génétiques des tumeurs surrénaliennes. « En présence d’une hyperplasie nodulaire des surrénales, les causes génétiques sont fréquentes et doivent donc être recherchées. Il y en a plusieurs : dans les hyperplasies micronodulaires, le gène PRKAR1A est très fréquemment en cause (dans plus de 70 % des cas). Chez les autres patients, l’autre gène le plus souvent retrouvé est PRKACA. Dans l’hyperplasie macronodulaire, qui touche surtout les adultes entre 40 et 60 ans, et qui est parfois diagnostiqué devant un incidentalome surrénalien bilatéral, deux gènes ont été identifiés : ARMC5 et KDM1A », détaille le Pr Bertherat.

Dans la maladie de Cushing elle-même, le consensus précise que les causes génétiques doivent être recherchées, mais seulement chez les enfants ou les adultes jeunes. « Au-delà de la génétique de routine, il y a maintenant la possibilité, pour le syndrome de Cushing d’origine surrénalienne, de discuter le séquençage complet du génome dans le cadre du plan médecine France génomique 2025 », ajoute le spécialiste.

À noter enfin que les cancers des surrénales (essentiellement traités par mitotane) ont bénéficié des progrès de la génétique moléculaire, ce qui permet de mieux les classer sur le plan pronostique, avec l’espoir, à terme, de trouver des thérapies ciblées.

Entretien avec le Pr Jérôme Bertherat, service d’endocrinologie, centre de référence maladies rares de la surrénale, hôpital Cochin, Ap-Hp

(1) Tabarin A et al. Consensus statement by the French Society of Endocrinology (SFE) and French Society of Pediatric Endocrinology & Diabetology (SFEDP) on diagnosis of Cushing’s syndrome. Ann Endoc Fev 2022. Doi : 10.1016/j.ando.2022.02.001

Dr Nathalie Szapiro
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Source : lequotidiendumedecin.fr