La nouvelle version du consensus ADA/EASD met l’accent sur une approche centrée sur le patient, dans le cadre d’une démarche médicale partagée. « Cette approche dite holistique, qui fait notamment appel à l’individualisation de la prise en charge, à l’éducation thérapeutique, à l’accompagnement, au soutien et à la lutte contre l’inertie thérapeutique, est déjà celle adoptée depuis longtemps par les praticiens », note le Pr Patrice Darmon, endocrinologue-diabétologue au CHU de Marseille et coordinateur de la prise de position de la Société Francophone du Diabète sur le traitement du diabète de type 2.
Recours précoce aux associations de traitements
L’équilibre glycémique, indispensable pour la prévention des complications, en particulier microvasculaires, est le premier des quatre piliers de la prise en charge. Il repose sur l’adoption d’un mode de vie favorable (alimentation saine, activité physique régulière, qualité du sommeil) et, en cas d’efficacité insuffisante, sur la prescription de traitements anti-hyperglycémiants. « Les différents médicaments sont classés en fonction de leur puissance d’efficacité, mais on peut regretter que le praticien ne soit pas vraiment guidé dans le choix des molécules », estime le Pr Darmon. Le consensus plaide désormais pour le recours précoce à des associations thérapeutiques chez de nombreux patients, en particulier chez ceux dont l’HbA1c à la découverte du diabète est supérieure à 8,5%, chez les jeunes (moins de 40 ans) et chez les patients chez qui l’on redoute une inertie thérapeutique. Enfin, rien de nouveau sur le passage à l’insuline, mais un rappel important : chez le patient vivant avec un diabète de type 2, le premier injectable doit être un agoniste des récepteurs du GLP1, sauf dans les situations d’insulinopénie.
Deuxième pilier de la prise en charge : la protection cardio-rénale, indépendante de l’équilibre glycémique et de la metformine. Comme en 2019, il est préconisé de faire appel à un inhibiteur des SGLT2 ou un agoniste des récepteurs du GLP1 chez les patients à très haut risque cardiovasculaire ou rénal, sous réserve bien sûr du respect des contre-indications. Chez les patients ayant une insuffisance cardiaque (IC), peu de changement si ce n’est le recours privilégié en première intention à un inhibiteur des SGLT2 quel que soit le type d’IC désormais. En cas de maladie rénale chronique (DFG estimé < 60 ml/min/1,73 m2 et/ou rapport albuminurie/créatininurie > 30 mg/g), il est recommandé de prescrire en première intention un inhibiteur de SGLT2, puis de rajouter un agoniste des récepteurs du GLP1 si les objectifs glycémiques ne sont pas atteints. En cas de maladie athéromateuse avérée, le choix se portera vers un inhibiteur de SGLT2 ou un agoniste des récepteurs du GLP1, voire sur l’association des deux si les objectifs glycémiques ne sont pas atteints. C’est également le choix qui sera proposé aux patients en prévention primaire ayant plus de 55 ans et présentant au moins deux autres facteurs de risque classiques. « Cette évolution de la population cible, qui inclut de fait un nombre très élevé de patients, ne repose pas sur un niveau de preuve fort, comme l’indique le document de consensus », rapporte le Pr Darmon.
De l’importance de la perte de poids
La perte de poids, qui occupe désormais une place plus importante que dans la version précédente du consensus, représente le troisième pilier de la prise en charge. A côté des modifications du mode de vie, les experts précisent la place de la chirurgie métabolique et listent les médicaments anti-hyperglycémiants qui font perdre du poids, en particulier les agonistes des récepteurs du GLP1 de dernière génération et le tirzépatide (co-agoniste GLP1/GIP non commercialisé en France), dont les effets sur le poids (et l’HbA1c) apparaissent majeurs. « Là encore, le document de consensus classe les traitements en fonction de leur effet sur le poids, mais il manque un peu de clarté pour guider le praticien dans sa démarche », ajoute le Pr Darmon.
Le quatrième et dernier volet de la prise en charge, dédié à l’importance de contrôler l’ensemble des autres facteurs de risque cardiovasculaire, connaît peu d’évolutions.
La protection cardio-rénale est indépendante de l’équilibre glycémique et de la metformine
Entretien avec le Pr Patrice Darmon (Marseille) (1) Davies MJ et al. Management of Hyperglycemia in Type 2 Diabetes, 2022. A Consensus Report by the American Diabetes Association (ADA) and the European Association for the Study of Diabetes (EASD). Diabetes Care 2022; dci220034. https://doi.org/10.2337/dci22-0034
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