Peut-on ralentir le prédiabète avec de la dapagliflozine ?

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Publié le 13/01/2022

La dapagliflozine réduit l’apparition du diabète de type 2 chez les insuffisants rénaux et cardiaques indemnes au départ. Mais s’agit-il d’un réel effet préventif ou du simple masquage d’un diabète débutant, la question n’est pas tranchée.

Crédit photo : phanie

Une analyse groupée des données des participants de deux essais de phase 3, Dapa-CKD et Dapa-HF, sans antécédents de diabète et avec une HbA1c < à 6,5 % (48 mmol/mol), a été réalisée pour quantifier l’apparition de diabète de type 2 (1). 4 003 participants étaient indemnes de diabète à l’inclusion, soit 1 398 (34,9 %) dans l’essai Dapa-CKD et 2 605 (65,1 %) dans l’essai Dapa-HF). Parmi eux, 1 995 (49,8 %) avaient reçu de la dapagliflozine et 2 008 (50,2 %) un placebo. Un diabète de novo était retenu lorsque deux valeurs consécutives d’HbA1c étaient supérieures ou égales à 6,5 % [≥ 48 mmol/mol]) ou en cas de diagnostic clinique de diabète.

Sur un suivi médian de 21,2 mois (IQR 16,0 à 25,4), 126 (6,3 %) patients du groupe placebo et 85 (4,3 %) du groupe dapagliflozine ont développé un diabète de type 2, soit 3,9 vs. 2,6 pour 100 patients-années : HR = 0,67 ; IC95 [0,51 à 0,88] ; p = 0,0040. Il n’y avait pas d’hétérogénéité entre les études et aucune preuve que l’effet de la dapagliflozine puisse varier dans des sous-groupes prédéfinis (sexe, âge, état glycémique, IMC, DFG, PA systolique et médicaments cardiovasculaires reçus). Plus de 90 % des participants qui ont développé un diabète de type 2 avaient un prédiabète au départ (HbA1c [5,7 - 6,4] % soit [39-46] mmol/mol).

Au total, le traitement par la dapagliflozine a donc réduit l’incidence du diabète de type 2 d’apparition récente chez les participants atteints d’insuffisance rénale chronique et d’IC.

Mais on peut se poser la question : s’agit-il à proprement parler d’une réduction d’incidence de diabète de type 2 ou d’un effet antidiabétique de la dapagliflozine, masquant le DT2 ? Les auteurs reconnaissent eux-mêmes qu’il s’agit là d’une vraie limite dans leur étude, puisque le maintien de cet effet n’a pas été vérifié après « wash-out » de dapagliflozine. Ils repoussent cette hypothèse par une simple phrase, un peu trop brièvement selon moi, surtout pour un article publié dans une revue d’un tel niveau de rigueur.

 

Professeur Émérite, Université Grenoble-Alpes

(1) Rossing P, Inzucchi SE, Vart P, et al. Dapa-CKD and Dapa-HF Trial Committees and Investigators. Dapagliflozin and new-onset type 2 diabetes in patients with chronic kidney disease or heart failure : pooled analysis of the Dapa-CKD and Dapa-HF trials. Lancet Diabetes Endocrinol. 2022 Jan;10(1):24-34. doi: 10.1016/S2213-8587(21)00295-3.

 

Pr Serge Halimi

Source : lequotidiendumedecin.fr