AMP et autoconservation ovocytaire pour toutes, anonymat, génétique : Buzyn lève le voile sur le projet de loi bioéthique

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Publié le 24/06/2019
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Crédit photo : PHANIE

Le texte, actuellement soumis au Conseil d'État, sera officiellement présenté en Conseil des ministres le 26 juillet. Mais la ministre de la Santé Agnès Buzyn a dévoilé ce 23 juin dans le « Journal du dimanche » les grandes lignes du projet de loi de bioéthique. Il s'inspire en grande partie de l'avis 129 du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), rédigé après les États généraux de la bioéthique, et des réflexions du Conseil d'État. 

Suppression du critère médical d'infertilité pour l'AMP et l'autoconservation ovocytaire 

Le projet prévoit bien l'accès de l'assistance médicale à la procréation (AMP) à toutes les femmes. « Cette ouverture ne trahit aucune valeur éthique fondamentale. Elle ouvre un nouveau droit sans rien retirer à personne », argumente Agnès Buzyn, ajoutant que « de nombreuses études scientifiques montrent que les enfants élevés par des couples homoparentaux sont aussi heureux que les autres ».

Le recours à l'AMP sera pris en charge par la Sécurité sociale, y compris pour les couples homosexuels, mais la limitation d'âge pour le remboursement (moins 43 ans) sera maintenue. Selon « La Croix », le critère médical d'infertilité, qui conditionne actuellement l'accès à ces techniques, serait supprimé. 

En revanche, le gouvernement n'envisage pas de revenir sur l'interdiction de l'AMP post-mortem, même si « cela mérite débat », reconnaît la ministre. 

L'autoconservation ovocytaire devrait elle aussi sortir des indications strictement médicales dans lesquelles elle est circonscrite aujourd'hui. Mais son autorisation devrait être encadrée « pour éviter une baisse de la natalité », et pour « que ce ne soit pas un moyen de pression exercé sur les femmes par les employeurs pour les contraindre à retarder leur projet de maternité », précise la ministre de la Santé. Les conditions d'âge devraient faire l'objet d'un décret ; Agnès Buzyn évoque dans le « JDD » une ouverture à partir de 30 ou 32 ans. 

Jusqu'où lever l'anonymat du don de gamètes 

Comment concilier le principe fondamental de l'anonymat du don et le droit à l'accès à ses origines ? Le gouvernement propose que les personnes nées d'un don de gamètes puissent accéder, à leur majorité, et à leur demande, à des éléments sur leur donneur : données non identifiantes (âge, état de santé au moment du don, caractéristiques physiques, motivations) ou identité. Cette dernière option exigerait néanmoins que le donneur y ait donné son consentement exprès – mais il revient au Conseil d'État de dire si ce consentement doit être exprimé lors du don, ou dès que l'enfant majeur formule une demande.

« Dans tous les cas, les personnes faisant cette démarche (d'accès à leurs origines, N.D.L.R.), seront accompagnées », ajoute Agnès Buzyn. Et de rassurer quant à un risque éventuel d'une diminution des dons : « Dans les pays qui ont généralisé cet accès aux origines, les dons ont diminué avant de remonter (...) Les jeunes qui demanderont à connaître l'identité de leur donneur ne prendront pas ce dernier pour un parent. » 

L'exécutif attend aussi l'avis du Conseil d'État sur la filiation des enfants nés dans un couple de femmes. Une première option ne ferait pas de distinction entre les couples : homosexuels, hétérosexuels, ou femme célibataire pourront faire une déclaration anticipée de volonté devant notaire, avant la naissance. La seconde option (préférée par le Conseil d'État en juillet 2018) circonscrirait ce dispositif aux couples de femmes. « Inscrire la vérité de la filiation uniquement pour les uns et pas pour les autres en fonction de l'orientation sexuelle des parents créerait des inégalités. Je suis favorable à l'idée de lever le voile sur l'origine de la filiation pour tous », dit Agnès Buzyn. 

Ouverture sur la recherche sur l'embryon, mais pas sur le dépistage préconceptionnel

Le projet de loi ne devrait pas permettre l'élargissement de l'accès aux tests pré-conceptionnels pour pouvoir détecter d'éventuelles maladies génétiques, malgré les appels en ce sens de plusieurs sociétés savantes. Il autoriserait en revanche les tests génétiques sur les personnes décédées, selon « la Croix », et maintiendrait la finalité médicale comme condition de recours à tout test génétique (avec pour conséquence l'interdiction réitérée des tests en accès direct ou « récréatifs »). 

Enfin, le gouvernement devrait suivre les préconisations du CCNE et du monde de la recherche en faveur d'une distinction entre les travaux sur l'embryon et ceux sur des cellules-souches embryonnaires, dont les contraintes réglementaires devraient être allégées. 


Source : lequotidiendumedecin.fr