Maladies lysosomales

VML lance un appel aux dons pour ses 20 ans

Publié le 05/04/2011
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« À TRAVERS l’association VML, il faut saluer l’action des associations de malades. Leur rôle de stimulant des pouvoirs publics est considérable », souligne Axel Kahn, généticien, ancien directeur de recherches à l’INSERM. Ce coup de projecteur opportun pour les familles des 2 500 malades est l’occasion d’en savoir un peu plus sur les 50 affections lysosomales, parmi lesquelles la maladie de Gaucher – la plus fréquente et la première à profiter d’un traitement spécifique –, la maladie de Fabry, la maladie de Pompe ou la maladie de Hunter.

Méconnus, ces troubles génétiques héréditaires et évolutifs, qui peuvent surgir à tout âge, se traduisent par un déficit d’enzymes lysosomales. Ce qui perturbe la destruction de substances intracellulaires provoquant, en bout de chaîne, des dérèglements du fonctionnement d’organes tels que le foie, la rate, ou la moelle épinière, des malformations (osseuses, de la peau, du visage), des problèmes neurologiques voire des dégénérescences intellectuelles. Des conséquences multiples générées par une seule cause : « Le mécanisme est univoque : le gène de l’enzyme n’est pas actif », synthétise Axel Kahn.

Depuis1955, date à laquelle le prix Nobel de médecine Christian de Duve découvre la maladie, la recherche a beaucoup évolué. Les méthodes thérapeutiques consistent le plus souvent à apporter l’enzyme déficiente par génie génétique quand les organes ne sont pas touchés. Une dizaine d’enzymes à visée thérapeutique sont actuellement disponibles, permettant aux patients de vivre « quasi normalement ». Des essais cliniques portant sur d’autres molécules sont en cours. Selon Jean-Guy Durandeau, le président de VLM, « on devrait arriver à 12 maladies couvertes assez vite ». La découverte de ces traitements a, dit-il, permis de « sauver 1 500 vies en vingt ans ».

Ce n’est pas la seule voie explorée par les chercheurs. « On peut aussi essayer d’inhiber le substrat », ajoute Axel Kahn. Ce recours vise à empêcher la production de parties de la cellule qui ne sont pas recyclées, faute des enzymes nécessaires. Parfois, le remplacement d’un organe défectueux par une transplantation s’impose, malgré la complexité d’une telle entreprise. Vient enfin, la thérapie génique, une possibilité qui, pour Axel Kahn, « va de soi mais qui (pour l’heure) vient encore loin derrière le génie génétique ».

Dépister au plus vite.

Reste que l’enjeu prioritaire, aux yeux du Dr Nadia Belmatoug, coordinatrice des centres de références des maladies lysosomales, est de déceler les symptômes au plus vite pour éviter des lésions irréversibles. Sans suivi thérapeutique, les problèmes empirent avec l’âge, au point de devenir incurables. Dans les années 1970, la mise en évidence des carences enzymatiques par une prise de sang ou le diagnostic prénatal à partir du liquide amniotique ont été des progrès décisifs. Il n’empêche que, dans bien des cas, le dépistage relève de la gageure : « Des patients seront asymptomatiques durant toute leur vie », assure-t-elle. « Il n’y a parfois aucun signe extérieur et pourtant, à l’intérieur, les viscères ont des tailles anormales et ne fonctionnent pas correctement. Or si on arrive trop tard, il faut prendre en charge les séquelles. »

La mission est d’autant plus complexe que le médecin généraliste n’est pas toujours au fait des maladies rares. « En première année de médecine, on en parle une heure et c’est tout. Le médecin, qui n’en a jamais entendu parler, n’a évidemment pas le réflexe d’envoyer le patient vers un centre de référence neurologique », observe-t-elle. Dans ces conditions, le travail de sensibilisation auprès des pouvoirs publics et des médias effectué par les représentants de l’association se révèle crucial. Au-delà, Nadia Belmatoug en appelle à la mobilisation de la chaîne médicale. « Il est indispensable de faire un travail multidisciplinaire. De l’infirmière jusqu’au ministère de la Santé. » Une fois que la maladie est identifiée, le patient est le meilleur des « experts ». « Ils en savent parfois plus que les médecins eux-mêmes », défend-elle.

Pour l’association VML, cet anniversaire a été l’occasion de rendre hommage aux 2 500 malades à travers la publication d’émouvants portraits croisés de familles et de malades photographiés par Dominique Robelet et Jean-Marie Letot dans l’ouvrage « Rare mais pas seul »*. « Il y a une pub en ce moment qui dit "Il y a des pays qui grandissent l’âme". Je puis vous dire que l’on peut appliquer ce slogan à ces personnes », raconte Dominique Robelet, qui est resté en contact avec Sylvie, Florence, Océane, Ronan ou Matilda. « Des personnes qui s’accrochent à la vie quel que soit leur âge » et leur niveau de handicap. C’est, somme toute, la traduction formelle de ce « supplément d’âme » vanté par Axel Kahn pour définir le rôle des malades et des associations. Un atout indispensable pour venir à bout de ces maladies rares, dans un contexte de baisse sensible des dons. « C’est une période difficile pour financer la recherche », regrette Jean-Guy Durandeau.

* www.vml-asso.org.

** « Rare mais pas seul », de Dominique Robelet et Jean-Marie Letot, est publié aux éditions Édite, 22 euros. Dans le sillage de sa sortie en librairie, ce livre-témoignage fera l’objet d’une exposition photo à la mairie du XIe arrondissement de Paris.

XAVIER RENARD

Source : Le Quotidien du Médecin: 8938