AMP : l'intelligence artificielle pour améliorer la sélection des embryons

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Publié le 22/12/2022
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Crédit photo : Burger/Phanie

En vue d'améliorer le taux de succès des transferts d'embryons obtenus par fécondation in vitro (FIV), des chercheurs de l'établissement Weill Cornell Medicine (New York) ont mis au point un algorithme d'intelligence artificielle (IA) afin de mieux sélectionner les embryons. Leurs travaux sont parus dans « The Lancet Digital Health ».

Cette méthode non invasive d'évaluation des embryons permet de prédire avec une précision de près de 70 % si un embryon présente ou non une aneuploïdie (anomalie du nombre de chromosomes, une des causes principales d'échec de la FIV).

Actuellement, la sélection des embryons repose sur une analyse morphologique et morphocinétique, mais cette approche est tributaire de la variabilité intra- et inter-observateur. Un diagnostic préimplantatoire des aneuploïdies (DPI-A) peut aussi être envisagé. Néanmoins, cette technique, non autorisée en France, présente des limites, comme son caractère invasif du fait du prélèvement des cellules de l'embryon par biopsie et son coût.

« Nous pensons qu'à terme, en utilisant cette technologie basée sur l'IA, nous pourrons réduire le nombre d'embryons à biopsier, réduire les coûts et fournir un très bon outil de consultation aux patients lorsqu'ils devront prendre la décision de faire ou non un DPI-A », indique Nikica Zaninovic, co-auteur.

Un intérêt à confirmer en clinique pour sa standardisation

Grâce aux techniques de machine learning et de deep learning, l'algorithme a été entraîné à partir d'un ensemble de données obtenus à partir de 10 378 embryons dont le statut de ploïdie était connu grâce au DPI-A, provenant de 1 385 patientes. Ont été intégrés des images statiques prises au microscope 110 heures après l'injection intracytoplasmique de spermatozoïdes (microscope), mais aussi des paramètres morphocinétiques, l'évaluation morphologique des blastocystes et l'âge maternel.

Si l'âge de la mère et l'évaluation morphologique se sont révélés être de bons prédicteurs de la ploïdie de l'embryon, les paramètres morphocinétiques n'ont pas contribué à améliorer la précision de l'algorithme. Et les images statiques ne sont pas suffisantes à elles seules.

L'outil, appelé Stork-A, a permis de distinguer les embryons aneuploïdes des embryons euploïdes avec une précision de 69,3 %. La précision est de 77,6 % pour prédire l'aneuploïdie complexe par rapport à l'euploïdie.

La généralisabilité de l'algorithme a ensuite été évaluée sur deux ensembles de données indépendants, l'un provenant du Weill Cornell Medicine, le second de l'Instituto de Investigación Sanitaria La Fe de Valence en Espagne. Des résultats comparables ont été obtenus.

Ces résultats apportent la preuve de concept de cette approche, dont l'intérêt doit désormais être confirmé par des essais cliniques le comparant au DPI-A en vue de sa standardisation. Selon les auteurs américains, la vocation de cet outil n'est pas de remplacer le DPI-A mais au contraire de l'utiliser pour mieux identifier les situations où il a un intérêt.

Utiliser la vidéo pour optimiser l'outil

« C'est un autre excellent exemple de la façon dont l'IA peut potentiellement transformer la médecine. L'algorithme transforme des dizaines de milliers d'images d'embryons en modèles d'IA qui peuvent, à terme, être utilisés pour aider à améliorer l'efficacité de la FIV et démocratiser davantage son accès en réduisant les coûts », estime Olivier Elemento, co-auteur.

L'équipe de chercheurs poursuit ses travaux afin de rendre leur outil encore plus performant. Pour cela, ils utilisent désormais des vidéos du développement embryonnaire dans leur algorithme. « Nous pouvons ainsi exploiter les informations temporelles et spatiales sur le développement de l'embryon, et nous espérons que cela permettra de détecter les tendances du développement qui distinguent l'aneuploïdie de l'euploïdie avec une précision encore plus grande », précise premier auteur Josue Barnes. L'ambition est d'égaler la précision des tests génétiques.


Source : lequotidiendumedecin.fr