Être une femme, un facteur de risque de non-retour à l'emploi après un AVC

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Publié le 21/04/2022
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Crédit photo : PHANIE

Quelles sont les raisons qui bloquent le retour à l'emploi des femmes actives après un accident vasculaire cérébral (AVC) ? C'est la question que se posent des chercheurs allemands, à la suite de leurs travaux publiés dans « Stroke » sur les différences entre hommes et femmes dans le retour à l'emploi en post-AVC.

L'équipe dirigée par la Dr Marianne Hahn (de l'université Johannes Gutenberg à Mayence) a travaillé à partir des données de 606 des 6 635 patients (dont 27,7 % de femmes) inscrits dans le registre allemand de l'AVC et du traitement endovasculaire (GRS-ET) et pris en charge entre 2015 et 2019. La sélection des patients s'est basée sur le type de pathologie, la sociologie et l'évolution clinique. Il ne s'agissait que de personnes actives, ayant survécu au moins 90 jours à un AVC avec occlusion d'un gros vaisseau (24 à 46 % des AVC ischémiques) traité par thrombectomie mécanique.

Moitié moins de chances de retour à l'emploi

Au bout de 3 mois, 35,6 % des patients avaient retrouvé un emploi. Les femmes présentaient globalement moins de comorbidités et de facteurs de risque que les hommes : elles étaient plus jeunes (51,5 ans contre 55), moins fumeuses (29,9 % contre 39,6 %) et leurs AVC étaient moins souvent liés à une athérosclérose (22,2 % contre 38,8 %). Avec de telles différences, il était attendu qu'elles présentent un bien meilleur taux de retour à l'emploi, or ce n'est pas le cas. L'équipe a même observé un taux légèrement plus faible : 34,5 % contre 36,1 %. En tenant compte des différents facteurs de risque, les auteurs ont calculé que le fait d'être une femme est un facteur indépendant de risque de non-retour à l'emploi, puisqu’associé à une baisse de 57,3 % de la chance de reprise d'un emploi.

Les autres facteurs de risque identifiés étaient un score NIHSS (reflétant la sévérité clinique initiale) élevé 24 heures après l'événement, l'importance de l'athérosclérose sous-jacente et la durée de l'hospitalisation. Les patients qui ont pu retrouver leur emploi avaient aussi bénéficié d'une prise en charge plus rapide en moyenne. Les facteurs associés à une amélioration des chances de retour à l'emploi étaient la bonne récupération fonctionnelle et l'association entre une thrombectomie mécanique et une thrombolyse intraveineuse.

Les auteurs notent qu'une part importante des patients qui n'ont pas pu reprendre leur activité professionnelle étaient toujours hospitalisés en soins de suite et réadaptation, « ce qui montre le besoin de cette population en soins de réadaptation », insistent-ils.

Des causes systémiques

« Les différences genrées de revenus sont susceptibles de constituer une entrave au retour à l'emploi des femmes après un AVC ischémique », analysent les auteurs. Moins payées, les femmes seraient moins incitées à retourner au travail. Une autre piste d'explication possible résiderait dans la nature même des emplois occupés par les femmes. Ces derniers nécessiteraient plus fréquemment une bonne expression orale. De tels ressorts explicatifs devront être explorés dans d'autres études : « nous n'avions pas la possibilité d'obtenir des informations sur le parcours socio-économique des patientes de notre étude », reconnaissent les chercheurs.

Le retour au travail améliore le bien-être, l'estime de soi et la satisfaction de vivre. Or, il « ne dépend pas que de l'évolution fonctionnelle du patient, expliquent les auteurs. Il a été démontré que des interventions ciblées de réadaptation professionnelle en milieu professionnel améliorent les taux de retour au travail ».


Source : lequotidiendumedecin.fr