Une nouvelle donne IRM dans la schizophrénie

Le mode veille cérébral est suractivé et surconnecté

Publié le 26/01/2009
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DES ANOMALIES fonctionnelles cérébrales viennent d’être mises en évidence par des chercheurs américains chez des sujets schizophrènes et leurs parents au premier degré. À l’inverse de ce que l’on observe chez les sujets sains, les circuits cérébraux fonctionnant quand le cerveau est au repos resteraient chez les patients activés lors d’exercices cognitifs ; ils seraient de plus surconnectés à une autre région impliquée dans la schizophrénie. L’équipe de Susan Whitfield-Gabrieli a utilisé la technique d’IRM fonctionnelle pour étudier l’activité cérébrale, au repos et lors d’exercices de mémorisation, chez des patients schizophrènes, leurs parents au premier degré et des sujets contrôles.

Une activation trop forte.

Quand le cerveau n’est pas mobilisé sur une activité cognitive particulière, c’est-à-dire quand il est au repos, certains circuits s’enclenchent « par défaut » comme le mode veille d’un ordinateur. Ces zones cérébrales sont situées dans le cortex médian préfrontal (MPFC) et le cortex cingulaire postérieur. L’étude montre chez les sujets contrôles que, quand le cerveau est mobilisé sur des exercices cognitifs (mémorisation), les circuits du repos sont inhibés. En revanche, dans les mêmes conditions, la zone du MPFC reste activée chez les sujets malades et leurs parents. Plus les circuits cérébraux du mode « veille » sont inhibés, meilleures sont les performances cognitives et moins sévères sont les symptômes psychiatriques.

Des connections anormales.

Des études antérieures ont décrit qu’un dysfonctionnement du cortex préfrontal dorsolatéral droit (DLPFC) peut jouer un rôle dans les déficits cliniques, neuropsychologiques et sociaux de la maladie. Chez les patients et leurs parents, lors d’exercices de mémorisation, Whitfield et coll ont effectivement constaté une activation du DLPFC, qui n’est pas retrouvée chez les contrôles. Plus intéressant encore, les chercheurs ont observé une connexion anormalement élevée entre le DLPFC et le MPFC du mode veille, que ce soit au repos ou lors d’exercices cognitifs. Le degré de cette connectivité est corrélé à l’atteinte psychopathologique et l’est de manière inverse aux performances cognitives.

Chez les sujets schizophrènes, il apparaît ainsi que moins le MPFC reste activé au cours d’exercices cognitifs, moindre est la connexion anormale entre le MPFC et le DLPFC et meilleures sont les performances cognitives et psychiques. Ces résultats suggèrent que l’hyperactivation et l’hyperconnectivité des circuits du mode veille du cerveau sont associées à la schizophrénie et à la gravité de la maladie. Ces anomalies fonctionnelles pourraient traduire une incapacité chez les schizophrènes à empêcher leurs pensées intérieures et à allouer leurs ressources vers des tâches cognitives. En brouillant la frontière entre monologue intérieur et perceptions externes, la sollicitation constante du mode veille pourrait participer à l’ambiguïté des interprétations psychotiques.

Whitfield-Gabrieli S et coll. Proc Natl Acad Sci USA en ligne. Hyperactivity and hyperconnectivity of the default network in schizophrenia and in first-degree relatives of persosn with schizophrenia.

Dr IRÈNE DROGOU

Source : lequotidiendumedecin.fr