Trouble de la réfraction qui concerne aujourd’hui 30 % des adultes, la myopie devrait toucher de 50 à 60 % de la population à l’horizon 2050, sous l’influence délétère de facteurs environnementaux, notamment le travail de près et une moins forte exposition à la lumière extérieure. « Ce constat a été fait il y a une vingtaine d’années en Asie, où on estime que la proportion de myopes devrait atteindre de 80 à 90 % de la population dans 30 ans », précise le Pr Arnaud Sauer, ophtalmopédiatre à Strasbourg.
L’enjeu aujourd’hui est donc double : freiner la progression de la myopie dans la population et, par ricochet, limiter les myopies fortes, (> – 6 δ), qui sont associées à un risque de cécité.
Lumière, travail de près
Pour ce faire, on préconise une exposition à la lumière extérieure de 2 heures par jour, ce qui permet de réduire par trois l’évolution de la myopie. Cet effet positif passe par une stimulation de la sécrétion de dopamine, qui a un effet bénéfique sur la croissance du globe oculaire.
Le deuxième type de mesures concerne le travail de près : plus on regarde de près plus on accommode, ce qui accélère l’évolution de la myopie, comme cela est par exemple le cas chez le grand lecteur. « Il faut donc limiter le travail de près, indique le Pr Sauer. Aucun effet positif n’est en revanche démontré lors de la privation aux écrans ou par le port de verres filtrants ».
Bifocales et atropine
Une intervention médicale est également possible. Alors que les lentilles rigides n’ont pas fait la preuve de leur intérêt, les lentilles ou les lunettes bifocales réduisent l’évolution de la myopie.
Enfin, un traitement pharmacologique à base d’atropine pourrait être utilisé. Les études ATOM 1 et ATOM 2 ont souligné les bénéfices de l’atropine dosée à 1 %, 0,5 % et 0,01 %, qui limite l’évolution de la myopie, à raison d’une goutte instillée le soir pour éviter les effets secondaires. Selon les données des différents essais, l'atropine à 0,01 % semble être la meilleure option en termes de rapport bénéfices/risques, mais ceci doit être confirmé par d'autres études.
Le recours à la dopamine par voie systémique, proposé dans des études en Asie, est quant à lui limité par les effets secondaires.
Une autre piste, en plein essor, se fonde sur l’orthokératologie, avec le port de lentilles la nuit, dans les myopies < – 4 ou – 5 δ. Cette stratégie permet d’éviter de porter une correction pendant la journée mais ne freine pas l’évolution de la myopie de manière durable. L’orthohkératologie n’est cependant pas recommandée chez l’enfant, du fait notamment du risque d’infection sous lentilles.
Entretien avec le Pr Arnaud Sauer, service d’ophtalmo-pédiatrie, hôpitaux universitaires de Strasbourg
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