Des surdoués de l’hypnose

L’enfant au centre de la relation avec le soignant

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Publié le 19/11/2018
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Crédit photo : PHANIE

Classiquement définie comme un état modifié de conscience, l’hypnose est plus un processus psychologique associé à une activité cérébrale spécifique. L’état dit de transe hypnotique, guidé par le soignant, se caractérise par une attention focalisée et absorbée, avec une dissociation (diminution du jugement, disparition de la censure et distorsion temporospatiale). Cette dissociation permet un travail thérapeutique, psychique ou analgésique, basé sur les suggestions du thérapeute. La neuro-imagerie fonctionnelle a démontré la modification complexe du fonctionnement cérébral sous hypnose, avec des changements d’activité de certaines zones cérébrales.

Cet état existe aussi de façon physiologique : c’est typiquement celui dans lequel se trouve un enfant lorsqu’il « rêve » en classe – il est à la fois ici et ailleurs. Ces moments de transe hypnotique, spontanés et réversibles, sont banals et entrecoupent régulièrement notre état d’éveil habituel dit de conscience critique.

Une adhésion plus facile

« Alors que l’adulte, souvent très cartésien, a du mal à lâcher prise, l’enfant est un surdoué de l’hypnose », souligne le Dr Gilles Brézac (Nice). La suggestibilité hypnotique est en effet bien plus grande chez l’enfant, qui a une forte capacité à utiliser son imaginaire et se détacher du réel. Il est de plus très ouvert à la nouveauté, et son adhésion à l’hypnose est plus facile, sous réserve qu’il soit mis en confiance. « Il faut donc établir une véritable alliance thérapeutique entre l’enfant et le soignant, incluant les parents en tant que cothérapeutes », poursuit le Dr Brézac.

Les techniques d’hypnose s’adaptent à l’âge, aux goûts et aux centres d’intérêt de l’enfant. Si l’induction de la transe hypnotique utilise les cinq sens et l’imaginaire, l’enfant est plus kinesthésique que l’adulte et utilise facilement les canaux olfactifs et gustatifs. L’induction est en général plus rapide, la transe beaucoup plus agitée, plus labile aussi, avec d’autres signes que chez l’adulte, yeux ouverts ou paroles par exemple.

Douleurs aiguës ou syndromes chroniques

Les indications de l’hypnose en pédiatrie sont multiples, en particulier les actes douloureux invasifs, la chirurgie, la prise en charge des brûlures, les soins en cancérologie, mais aussi les insomnies, les migraines, le syndrome du côlon irritable, l’anxiété, les troubles du langage ou du comportement. Ses seules contre-indications sont les troubles psychotiques, la surdité, le déficit intellectuel et l’absence de motivation de l’enfant.

En douleur aiguë, elle est le plus souvent utilisée dans le cadre d’une prise en charge multimodale, avec du Meopa ou une sédation. C’est important lors de certains gestes invasifs pour éviter toute expérience douloureuse, dont l’impact délétère à long terme est aujourd’hui bien établi (mémorisation négative).

De la communication avant tout

L’hypnose est aussi un mode innovant de communication adaptée à l’enfant, qui le met au centre de la relation médecin-patient en lui faisant découvrir et utiliser ses propres ressources. Ses techniques de communication et leurs règles doivent être connues pour permettre la pratique de la distraction, de la communication thérapeutique aussi bien que de l’hypnoanalgésie ou de l’hypnose formelle pour le bien-être de l’enfant.

L’hypnose permet une appréhension du soin plus humaniste et plus empathique, avec un réel bénéfice pour l’enfant, mais aussi pour le soignant. L’engouement pour les formations en témoigne.

 

« Une appréhension du soin plus humaniste et plus empathique avec un réel bénéfice pour l’enfant, mais aussi pour le soignant »

Entretien avec le Dr Gilles Brézac (hôpital Lenval, Nice)

Dr Isabelle Hoppenot 

Source : Bilan Spécialiste