Diagnostic de l’anxiété

De nombreux pièges

Publié le 07/09/2009
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IL FAUT rappeler que, dans la majorité des cas, l’anxiété est un processus adaptatif banal et normal qui augmente notre niveau d’éveil par rapport à notre environnement. Ce n’est que quand cette anxiété engendre symptômes, gêne et plainte qu’il faut envisager une prise en charge thérapeutique. «  Malheureusement, les symptômes somatiques de l’anxiété sont très répandus et assez peu spécifiques », poursuit le Pr Llorca. Cela s’applique aux symptômes cardiovasculaires (palpitations, tachycardie, précordialgies diffuses…), respiratoires (dyspnée, pesanteur thoracique, hyperventilation qui en elle même génère l’angoisse, par le biais d’une alcalose), neurologiques (sensations vertigineuses, céphalées, douleurs musculaires, paresthésies, troubles du sommeil, fatigue, tremblements), digestifs, (difficultés de déglutition, douleurs épigastriques ou abdominales).

Ce manque de spécificités explique que, par exemple, dans les précardialgies ou les vertiges, le trouble anxieux ne soit souvent qu’un diagnostic d’élimination plus ou moins tardif. A contrario, le Pr Llorca insiste sur certains troubles intenses, comme la dépersonnalisation ou la déréalisation, qui doivent faire évoquer une crise d’angoisse, avant d’envisager des troubles neuropsychiatriques plus graves.

Tenir compte du contexte.

À côté des manifestations somatiques, les deux autres dimensions, psychologiques et comportementales, de l’anxiété peuvent être d’une aide diagnostique :

– inquiétude, tensions, irritabilité, impatience, angoisse, panique… ;

– agitation plus souvent qu’inhibition, fuite évitement, compulsions, recherche de réassurance, d’aide, de sédation.

Les échelles ne remplacent pas l’examen, mais elles peuvent le guider en aidant à formuler des questions pertinentes. En pratique, elles sont peu utilisées en dehors des études cliniques. In fine, c’est la gêne exprimée par le patient qui déclenche la prise en charge.

Guider la pise en charge.

La démarche diagnostique a aussi pour but de reconnaître les facteurs étiologiques qui vont guider la prise en charge : anxiété réactionnelle, troubles d’adaptation, anxiété liée à une affection médicale (à commencer par l’hyperthyroïdie) ou à la prise de toxiques. Il est encore plus important de distinguer les troubles anxieux, autrefois qualifiés de « névrotiques », de l’anxiété qui accompagne la plupart des troubles psychiatriques lourds.

Autre élément important, la reconnaissance des symptômes spécifiques de l’anxiété pathologique : épisodes aigus d’anxiété (crises d’angoisse, attaques de panique), anxiétés phobiques, obsessions et compulsions.

Tous ces éléments peuvent être de nature à influencer le type de réponse thérapeutique mais trois paramètres dominent :

– la persistance et ou la récurrence des troubles anxieux, en sachant que le diagnostic d’anxiété généralisée ne peut porter avant 6 mois d’évolution ;

– l’élimination d’un état dépressif qui est souvent intriqué (ralentissement fonctionnel marqué, perte d’anticipation, insomnie du milieu de la nuit ou réveil précoce…) ;

– l’évaluation de l’intensité du handicap fonctionnel lié aux troubles anxieux (léger, modéré ou marqué).

« Le bon usage des psychotropes en général et des benzodiazépines en particulier dépend de la qualité de la demande diagnostique initiale », conclut le Pr Llorca.

Réunion organisée avec le soutien institutionnel des laboratoires Sigma-Tau.

 Dr ALAIN MARIÉ

Source : lequotidiendumedecin.fr