Évaluation de la qualité osseuse

De nouvelles méthodes en préparation

Publié le 07/04/2011
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« L’ostéoporose correspond à une diminution de la résistance osseuse. Or cette dernière dépend de plusieurs paramètres reflétant la qualité osseuse, tels la géométrie, la microarchitecture, la minéralisation, l’accumulation de microlésions, le niveau de remodelage… Ainsi, la mesure de la densité minérale osseuse, telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui par absorptiométrie biphotonique à rayons X (DXA), ne reflète que l’une des composantes de la résistance osseuse. Pour mieux évaluer le risque de fracture, il faudrait pouvoir avoir accès à d’autres paramètres de qualité osseuse comme la microarchitecture ou la géométrie osseuse. C’est tout l’enjeu des nouvelles techniques en cours de mise au point », explique le Dr Briot. Pour autant, aussi prometteuses soient-elles, ces méthodes d’investigation ne sont pas encore disponibles en pratique clinique et font encore partie du domaine de la recherche.

En 2D et en 3D.

Des outils en deux dimensions, permettent à partir des images obtenues avec la DXA, d’évaluer la géométrie des pièces osseuses. Pour le moment, cette technique reste du domaine de la recherche clinique. Il a ainsi pu être montré que la diminution de l’épaisseur corticale du col fémoral est associée au risque de fracture, indépendamment de l’âge et de la DMO. De tels résultats témoignent du rôle majeur de l’os cortical dans la résistance osseuse. « Le score HSA (Hip Structural Analysis) permet à partir d’une image de DXA de mesurer différents paramètres géométriques (taille, angle, diamètre) de l’extrémité supérieure du fémur et en particulier, l’épaisseur corticale du col fémoral. Il s’avère que la mesure de l’épaisseur corticale par la radiographie ou grâce à la méthode HSA, calculé sur DXA, améliore la prédiction du risque de fracture de hanche, indépendamment de la mesure de la densité osseuse : la diminution de ce paramètre d’un écart type est associée à un doublement du risque de fracture. Enfin, il a également été montré des effets bénéfiques de certains traitements de l’ostéoporose sur ces paramètres géométriques » souligne le Dr Briot.

La technique de référence pour explorer la microarchitecture de l’os trabéculaire et de l’os cortical est l’étude histomorphométrique sur une biopsie de crête iliaque. Outre le caractère invasif, les résultats obtenus ne reflètent la microarchitecture qu’en 2 dimensions. De récentes études ont montré que des nouvelles méthodes en cours de développement peuvent se substituer à l’analyse histomorphométrique pour l’évaluation de la microarchitecture osseuse. Elles reposent par exemple, sur l’analyse en scanner 3D du tibia et du radius avec une résolution de l’ordre de 80 µm pour une faible irradiation (scanner dédié pQCT et HRQCT). Elles permettent ainsi de mesurer le nombre de travées osseuses et les altérations de la microarchitecture(espacement entre les travées, amincissement ou perforations des travées, etc…). « Le problème est que ces appareils 3D sont coûteux et qu’ils ne sont disponibles que dans quelques centres de recherche très spécialisés. C’est pourquoi l’objectif est de développer de nouveaux outils accessibles à partir de la DXA ou de la radiographie, qui permettraient d’avoir accès à des informations telles que la géométrie, la microarchitecture, l’épaisseur corticale. Elles sont cependant moins performantes que celles obtenues par l’analyse en 3D », poursuit le Dr Briot.

La VFA est également une piste explorée pour une meilleure évaluation du risque fracturaire

Dans la problématique d’identifier les personnes à risque de fracture, l’un des facteurs majeur de risque est l’antécédent personnel de fracture vertébrale. Ces fractures vertébrales étant le plus souvent asymptomatiques ou peu symptomatiques, la plupart des patientes ignorent leur existence. « On ne peut cependant pas faire de radiographie standard à tout le monde ! C’est pourquoi il semble intéressant d’avoir une approche radiographique, mais sans avoir à faire d’imagerie supplémentaire. Là encore, il est possible, à partir de la DXA et grâce à de nouveaux logiciels, de faire une VFA (vertebral fracture assessment) qui permet de diagnostiquer une déformation vertébrale sur une majeure partie du rachis (de T5 à L5). Il est ainsi possible d’avoir au cours du même examen, une ostéodensitométrie et de savoir s’il existe une déformation évocatrice de fracture vertébrale ». Cet examen est actuellement évalué dans certains centres hospitaliers. Sa valeur prédictive négative est excellente et pourrait ainsi éviter jusqu’à un tiers des radiographies réalisées pour rechercher une fracture vertébrale. En outre, cet examen présente deux avantages : l’irradiation et sont coût sont faibles. Deux arguments qui en font un examen de choix s’il devait être utilisé en pratique courante.

« Finalement, la DXA reste la méthode de référence pour mesurer la densité minérale osseuse. Puisque sa valeur prédictive du risque de fracture reste insuffisante, de nouveaux outils prometteurs sont en cours d’évaluation. Leur point commun est d’obtenir de nouvelles informations sur la géométrie et la microarchitecture osseuse, qui reflète la qualité osseuse, tout en s’appuyant sur les examens déjà pratiqués », conclut le Dr Karine Briot.

D’après un entretien avec le Dr Karine Briot, service de rhumatologie, hôpital Cochin à Paris et auteur d’une thèse de Science dont le thème est « Macroarchitecture et résistance osseuse : rôle de l’os cortical » (2009).

 Dr NATHALIE SZAPIRO

Source : Bilan spécialistes