Étude observationnelle de patients goutteux

L’hyperuricémie chronique, marqueur de risque global

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Publié le 14/03/2016
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GOUTTE

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Crédit photo : PHANIE

Pour éviter les conséquences rhumatologiques, néphrologiques et cardiovasculaires d’une hyperuricémie chronique, l’uricémie doit être strictement inférieure à 60 mg/l. « Une valeur plafond dont les patients sont, semble-t-il, peu conscients… », note le Pr Luc Fernandez, médecin généraliste (université Pierre et Marie Curie).

L’étude observationnelle ADAGIO (fActeur D’ahésion A la prise en charGe du patient gOutteux en médecine générale), promue par les laboratoires Menarini, permet d’identifier les facteurs d’observance à la prise en charge des patients goutteux consultant en médecine générale. 630 médecins généralistes ont ainsi inclus 1 441 patients traités depuis plus de 3 mois. Le patient « type » est un homme, de 64,4 ans en moyenne, en surcharge pondérale (pour 85 %, avec un IMC moyen de 29,4), fumeur (22 %), hypertendu (70 %), dyslipidémique (62 %). 24 % ont un diabète de type 2, 10 % une insuffisance rénale, 17 % souffrent conjointement de ces 3 facteurs de risque vasculaire, HTA, diabète de type 2 et dyslipidémie ; près de la moitié présentent une comorbidité (dépression par exemple) ; ils prennent 5 comprimés par jour en moyenne, et ne sont, en majorité, pas à l’objectif thérapeutique (58,5 %). 15 % font deux accès aigus de goutte par an.

Risques cardiovasculaires

Les principaux facteurs significativement associés à une bonne observance à la prise en charge de leur goutte (médicament et règles hygiéno-diététiques) sont : l’âge (de plus de 70 ans), l’atteinte de la valeur seuil, le score de satisfaction vis-à-vis du traitement. « Par contre, souligne-t-il, l’observance diminue avec le nombre de comprimés pris par ailleurs. » Pour faciliter la prise de conscience, puis la prise en charge, il conseille un questionnaire d’évaluation des croyances et un entretien motivationnel. La crise témoigne d’un dépôt cristallin dans l’articulation, entretenu par l’excès d’acide urique dans le sang. La partie immergée de l’iceberg en quelque sorte, puisque les hyperuricémiques sont aussi plus souvent victimes d’événements cardiovasculaires. « Les mécanismes physiopathologiques à la manœuvre restent à démontrer par des études d’intervention, signale le Pr Franck Paganelli, cardiologue (CHU de Marseille), même si le taux de décès intrahospitaliers au décours ou de complications est à l’évidence augmenté. » Chaque augmentation de10 mg/l du taux d’acide urique élève de 31 % le risque de mortalité à un an des patients dont la coronaropathie est stable.

Complications rénales

Enfin, le rein, voie d‘élimination de l’acide urique, n’est pas épargné. « L’hyperuricémie favorise toutes les autres lithiases, décrit le Pr Jean-Pierre Fauvel, néphrologue (Lyon), mais encore la dégradation de la fonction rénale, déjà fragilisée par le vieillissement. » Les capacités d’élimination de l’acide urique en sont réduites et les patients deviennent de plus en plus hyperuricémiques, d’autant que l’insuffisance rénale les oblige à prendre des diurétiques… « La goutte est une maladie complexe, qui mérite un traitement, observé, pour atteindre la cible thérapeutique et ainsi préserver ces différents organes » résume le Pr Thomas Bardin, rhumatologue à l’hôpital Lariboisière (Paris).

Dr Brigitte Blond

Source : Le Quotidien du médecin: 9479